Bien que le Code fasse la distinction entre discrimination directe et discrimination indirecte[11], cette distinction est moins importante qu’elle ne l’a déjà été, en particulier dans le secteur de l’incapacité. C’est là le résultat de l’impact global de deux facteurs. Tout d’abord, la Cour suprême du Canada a brouillé la distinction entre les deux notions à des fins d’ordre pratique et elle a mis au point un critère unique à trois volets[12]. La Cour d’appel de l’Ontario a appliqué le même principe dans le contexte ontarien, plus particulièrement dans le domaine de l’handicap et des tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool[13].
En deuxième lieu, l’article 17 du Code apporte un élément de défense, lorsqu’une personne ayant un handicap est incapable de s’acquitter d’une fonction essentielle. Cependant, ce moyen de défense ne vaut que si l’exigence est raisonnable et établie de bonne foi, et uniquement si les besoins de la personne ont été pris en compte dans la mesure où il n’en résulte pas de préjudice injustifié. Comme les employeurs soutiennent habituellement qu’il est essentiel que l’employé puisse s’acquitter de ses obligations en pleine possession de ses facultés, l’article 17 du Code constituera une partie importante de la défense de l’intimé.
Quoi qu’il en soit, la Cour d’appel de l’Ontario a conclu que, sauf dans les cas de discrimination directe les plus manifestes, il faut s’appliquer à déterminer si l’employeur peut justifier la politique ou norme à l’aide du nouveau critère à trois volets élaboré par la Cour suprême du Canada[14]. Suivant cette approche, des politiques d’entreprise telles que l’administration de tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool auront pour corollaire la nécessité de tenir compte des besoins des employés, et ce, fait à souligner, sur une base individuelle[15]. La CODP appuie cette position. L’individualisation est primordiale pour la notion de dignité des personnes qui ont un handicap et pour celle de prise en compte de leurs besoins en raison d’un handicap, peu importe qu’une forme précise de tests de dépistage de la consommation de drogues et d’alcool puisse être considérée comme une mesure de discrimination « directe » ou « indirecte »[16] . Les règles « générales » ne tenant pas compte des circonstances particulières, elles sont nécessairement inaptes à répondre aux besoins individuels et donc susceptibles d’être invalidées.
[11] Voir, p. ex., les articles 5 et 11 du Code.
[12] British Columbia (Public Service Employee Relations Commission) c. B.C.G.S.E.U., (1999) 176 D.L.R. (4th ) 1 (S.C.C.) [ci-après Meiorin].
[13]Entrop c. Imperial Oil Ltd. (décision non publiée de la Cour d’appel de l’Ontario, 21 juillet 2000).
[14] Ibid., aux para. 79-82.
[15] Ibid.
[16] Voir, de façon générale, le document de la CODP intitulé Politique et directives concernant le handicap et l'obligation d'accommodement, dans Commission ontarienne des droits de la personne, Politique des droits de la personne en Ontario (Imprimeur de la Reine pour l’Ontario, Toronto : 1999).