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Problèmes systémiques et sociétaux liés aux droits de la personne en matière

Motifs du Code
L’état d’assisté social
Organizational responsibility
accessibilité

5.1. Conception inclusive dans le secteur du logement

Les personnes protégées en vertu de tous les motifs prévus au Code devraient pouvoir accéder à un logement et avoir les mêmes devoirs et obligations que les autres, dans la dignité et sans obstacle. Les fournisseurs de logements et d’autres parties responsables, dont le gouvernement, doivent s’assurer que le logement qu’ils offrent et les programmes qu’ils administrent reposent sur une conception inclusive. Ils doivent également éliminer les obstacles existants au logement et sujets à la norme de préjudice injustifié. Lors de cette consultation, la Commission a appris que certains problèmes découlaient de lacunes en matière de conception inclusive, tant dans les caractéristiques physiques des édifices que dans les politiques et les programmes applicables.

Conception de construction et caractéristiques physiques

Comme l’a indiqué le document de référence, il faut intégrer des principes de conception universelle au développement et à la construction du logement, et aucun nouvel obstacle ne devrait être créé à l’étape de la construction ou de la rénovation des installations[91]. Les éléments de conception inclusive reliés aux caractéristiques physiques des édifices peuvent avantager les personnes protégées en vertu de quelques motifs prévus au Code, ainsi que d’autres locataires. Par exemple, un appartement entièrement insonorisé répondrait aux besoins d’un locataire qui utilise un support de marche ou un locataire ayant plusieurs enfants, tout en étant avantageux pour les occupants des unités voisines.

Bien que les principes de conception inclusive s’appliquent à tous les motifs prévus au Code, la plupart des personnes consultées ont indiqué à la Commission qu’il existait des situations où l’on ne respectait pas ces principes reliés aux handicaps. Par exemple, la division de l’Ontario de l’ACSM a indiqué que la conception inclusive visant à répondre aux besoins des personnes ayant une maladie mentale (et qui préfèrent souvent vivre en solitaire plutôt que d’avoir un colocataire) nécessiterait la création de studios et d’appartements à une chambre plus abordables. La Société canadienne de l’ouïe a remarqué que la plupart des logements locatifs ne sont pas dotés du matériel de protection contre les incendies qui assurent que tous les locataires, y compris les personnes ayant une déficience auditive, soient avertis rapidement en cas d’incendie. Le personnel de la clinique juridique Hamilton Mountain Legal and Community Services a indiqué avoir reçu plusieurs appels de locataires concernant des édifices sans rampe d’accès ou l’existence d’autres obstacles à la mobilité. On a souvent parlé des préoccupations concernant l’absence de systèmes d’avertisseur optique et acoustique qui permettent aux locataires handicapés d’identifier les visiteurs avant de leur donner accès au logement. La Commission a également dit que les personnes souffrant de polysensibilité chimique étaient confrontées à une pénurie de logements locatifs répondant à leurs besoins étant donné que les appartements ont généralement de la moquette.

Les fournisseurs de logements ont émis des réserves sur le fait qu’on les oblige à revoir la conception de leurs édifices ou à modifier leurs immeubles plus anciens afin de répondre aux exigences en matière d’adaptation. Selon la FRPO, les exigences relatives à l’adaptation et à la conception inclusive ne devraient s’appliquer qu’aux nouveaux édifices. La Commission convient que l’accent mis sur la conception inclusive de tous les nouveaux édifices serait avantageux pour les fournisseurs de logements, les locataires et la société dans son ensemble. Toutefois, l’obligation pour les fournisseurs de logements de supprimer les obstacles existants, sujets à la norme de préjudice injustifié, serait toujours en vigueur.

Le fait que le Code du bâtiment en vigueur omette d’établir des normes de conception inclusive a soulevé certaines questions. Le MAML a indiqué que plusieurs exigences liées à l’accessibilité sont mentionnées à la section « Aménagement pour accès facile » du Code du bâtiment et que le Code du bâtiment avait été modifié la dernière fois en 2006. Toutefois, bon nombre des préoccupations de la Commission, indiquées dans son mémoire de 2002 sur le Code du bâtiment, n’ont pas encore fait l’objet d’un suivi[92]. Les groupes de défense des droits des locataires ont indiqué que le Code du bâtiment ne permet pas encore l’accès au logement à un grand nombre de personnes handicapées, y compris celles qui utilisent des dispositifs de déplacement encombrants et les personnes ayant une sensibilité à des facteurs environnementaux (Hamilton Mountain Community and Legal Services). Pour se défendre contre une plainte fondée sur la discrimination aux termes du Code, l’argument de conformité aux codes du bâtiment pertinents a été clairement rejeté[93].

Des personnes et des organisations consultées, notamment le CDPH, ont également exprimé leur inquiétude sur les lacunes liées aux normes qui ont été établies à ce jour dans la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario (LAPHO)[94]. Selon eux, les éventuelles normes, telles que les normes d’accessibilité au milieu bâti, peuvent également ne pas répondre aux besoins. Le MAML a indiqué qu’il dirigeait le Comité chargé d’établir ces normes. Le ministère des Services sociaux et communautaires (MSSC) est responsable de l’application de la LAPHO[95].

Programmes, politiques et pratiques

Les principes de conception inclusive ne s’appliquent pas uniquement aux édifices, structures physiques et autres éléments de construction. Ils concernent également les programmes, politiques et pratiques qui pourraient représenter des obstacles à l’accès pour les personnes protégées en vertu du Code[96]. Le rapporteur spécial qui s’est penché sur le logement convenable a indiqué que la conception des politiques et des programmes devrait être fondée sur un cadre relatif aux droits de la personne et reconnaître pleinement le droit à un logement adéquat[97].

La Commission a appris que l’Ontario devait absolument se doter de programmes de logement conçus de façon à inclure les groupes protégés par le Code et qui ont des besoins spécifiques. Par exemple, l’ACE a reconnu qu’il fallait augmenter l’accès à des options de logement suffisant, convenable et abordable pour les aînés ayant une maladie mentale, des besoins physiques complexes et une maladie chronique. L’OFIFC a ajouté que, même si les jeunes Autochtones sont surreprésentés dans les systèmes de protection de l’enfance et de justice pour les adolescents et qu’ils risquent de se retrouver dans la rue à leur remise en liberté, il n’existe aucun programme de logement abordable et spécifique pour les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain.

L’ATTSO a indiqué que le système de logement n’assurait pas la neutralité par rapport au mode d’occupation des logements. On a plutôt indiqué que les personnes à revenu plus élevé, dont le régime de marché ne constitue pas un obstacle et qui achètent une maison, ont droit à une aide disproportionnée grâce aux programmes et aux subventions du gouvernement. Cette situation confirme que les personnes à faible revenu, dont les droits en matière de logement sont négligés, reçoivent très peu d’aide, ou pas du tout, et sont parfois forcés de vivre dans des logements insalubres.

Des personnes et des organisations consultées, notamment le CERA et le SRAC, ont donné des exemples de programmes, de politiques et de pratiques du gouvernement qui peuvent aller à l’encontre des principes de conception inclusive :

  • L’attribution des logements sociaux fondée sur un ordre chronologique (touchant les jeunes, les nouveaux arrivants et les personnes ayant des besoins immédiats);
  • L’omission de verser une allocation de logement ou une aide d’urgence aux personnes à risque élevé de devenir itinérantes;
  • L’omission de verser une allocation de logement ou une aide d’urgence ou d’offrir un hébergement de rechange aux personnes risquant l’expulsion en raison de circonstances imprévues;
  • L’absence de politiques claires en ce qui a trait à l’interprétation (langages ASL et LSQ, et langues autres que le français et l’anglais) et d’autres services donnant droit à un traitement égal en matière d’accès au logement;
  • La présence d’obstacles comportementaux à l’origine de certaines caractéristiques de conception (p. ex., imposition d’exigences strictes en matière d’information à fournir pour les bénéficiaires de l’assistance sociale qui sont d’emblée perçus comme des fraudeurs ou exclusion des personnes handicapées de certains types de logement sous prétexte que le logement ne leur conviendrait pas).

D’autres personnes consultées ont indiqué que, dans certaines circonstances, des fournisseurs de logements peuvent avoir omis de respecter leurs devoirs en matière de conception inclusive. Par exemple, la règle interdisant la présence d’animaux de compagnie dans un appartement peut constituer un obstacle à l’accès au logement pour un jeune sans-abri ou une personne ayant une maladie mentale, une déficience visuelle ou un autre handicap.

5.2. Logement convenable et abordable

Le rapporteur spécial des Nations Unies sur le logement convenable, M. Miloon Kothari, a utilisé les termes « très désolant et très dérangeant » pour qualifier ce qu’il a vu durant la mission d’enquête qu’il a effectuée au Canada[98]. Dans les observations préliminaires qu’il a recueillies lors de sa mission au Canada effectuée en octobre 2007, M. Kothari a parlé de l’impact profond et dévastateur de cette crise nationale sur les conditions de vie de femmes, de jeunes, d’enfants et d’hommes, et il constate qu’en dépit de cette crise, le gouvernement fédéral engrange depuis 1998 un surplus annuel de plusieurs milliards de dollars[99].

Dans ses recommandations du 12 mars 2008 sur le logement convenable, M. Kothari a proposé les mesures suivantes afin d’assurer la protection du droit au logement convenable[100] :

  • Adoption d’une approche humanitaire alliée à une approche basée sur les droits humains de façon à affronter les conditions de logement inadéquates et le sans-abrisme;
  • Reconnaissance du droit au logement convenable par l’adoption de lois et de politiques et par un engagement budgétaire;
  • Établissement de mesures concrètes afin de mettre ce droit en pratique.

Le projet de loi 47, Loi visant à consacrer le droit à un logement convenable comme droit humain universel, a franchi l’étape de la première lecture le 27 mars 2008. Ce projet de loi d’initiative parlementaire reconnaît que chaque personne a droit à un logement convenable, conformément aux droits reconnus au paragraphe 11 (1) du PIDESC[101]. L’adoption d’une telle loi constituerait un formidable pas vers la réalisation des droits reconnus dans le PIDESC en Ontario.

Certaines organisations, comme l’ALSBLO et la Fédération de l’habitation coopérative du Canada, ont indiqué qu’il existe des mécanismes d’intervention visant à promouvoir le développement du logement destiné aux groupes protégés, comme la Déclaration de principes provinciale[102]. Bien que la Déclaration de principes provinciale exige que les autorités chargées de la planification établissent un minimum de cibles en matière de logement accessible aux ménages à revenu faible et modeste, et qu’elles permettent et facilitent l’implantation de logements adaptés, on a remarqué que les municipalités établissaient leurs propres stratégies en matière de logement sans toujours tenir compte des politiques en vigueur qui ne faisaient pas partie des priorités budgétaires. Lors d’autres présentations et discussions qui ont eu lieu à des tables rondes, on a indiqué que la mise en place d’une stratégie globale et cohérente en matière de logement se faisait difficilement en raison du chevauchement des compétences entre les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux.

Bien que le Canada soit doté d’un système fédéral unique dans lequel le logement est du ressort des provinces et des territoires[103], M. Kothari a clairement indiqué qu’il s’attendait à ce que les ordres du gouvernement travaillent ensemble : « Néanmoins, que l’autorité soit d’ordre fédéral, provincial, municipal ou autre, l’État devrait trouver des stratégies qui assureraient la mise en œuvre du droit à un logement convenable. »[104]

Le 29 avril 2005, les gouvernements provincial et fédéral ont signé une entente de quatre ans relativement au Programme de logement abordable (PLA), laquelle viendra à échéance en 2009. Les deux ordres de gouvernement et les administrations municipales investissent 734 millions de dollars sur la durée du programme afin d’augmenter de 20 000 unités la production de logements abordables et d’offrir des allocations de logement aux familles à faible revenu de l’Ontario (MAML). Le MAML a indiqué que, selon le PLA, la priorité sera accordée, sans y être limitée, aux Autochtones, aux nouveaux immigrants, aux personnes handicapées, aux aînés à faible revenu, aux personnes ayant une maladie mentale, aux victimes de violence conjugale et aux petits salariés.

Des personnes consultées ont reconnu que de nouveaux logements abordables ont été construits en vertu du PLA et que d’autres sont en cours de construction et d’aménagement[105], mais plusieurs étaient préoccupées de la définition donnée à la notion d’« abordabilité ». Le MAML a indiqué que, pour les logements locatifs construits en vertu du PLA, le prix du loyer doit équivaloir ou être inférieur au loyer moyen du marché établi par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), et a précisé que le prix de location moyen des ensembles locatifs doit être de 20 % inférieur au loyer moyen du marché. On a fait valoir que ces unités seraient quand même abordables pour bon nombre de personnes et de groupes désignés par les motifs prévus au Code.

Des personnes consultées étaient également inquiètes du fait que, malgré la mise sur pied du PLA, on n’a pas réussi à combler l’immense besoin en matière de logements abordables.

Ce programme n’éliminera pas le besoin considérable en matière de logements subventionnés en Ontario. Les loyers ne seront pas abordables pour les ménages inscrits sur les listes d’attente pour le logement social (125 000 en 2004), car les prix seront fixés juste sous les prix de location moyen en vigueur dans le secteur privé. (Kensington-Bellwoods Community Legal Services)

On s’est toutefois réjoui que l’actuel gouvernement de l’Ontario ait accompli des progrès dans certains secteurs du logement destiné aux ménages à faible revenu. Par exemple, des personnes consultées ont émis des commentaires positifs sur certaines initiatives comme le Programme de supplément au loyer pour l’épanouissement communautaire[106] et le Programme provincial de banques d’aide au loyer qui fournit une aide financière aux locataires pour le paiement d’arriérés pouvant correspondre jusqu’à deux mois de loyer[107]. Les ménages qui bénéficient d’une aide en vertu du Programme de supplément au loyer pour l’épanouissement communautaire reçoivent un supplément au loyer représentant 30 % de leur revenu (MAML). Le MAML a en outre indiqué qu’il y a actuellement plus de 6 600 ménages qui reçoivent un supplément au loyer et que 1 321 d’entre eux vivent dans un logement avec services de soutien.

D’un autre côté, on a soulevé la question de la disponibilité de ces programmes, comparativement au nombre de personnes qui en ont besoin. De plus, la Commission a appris que les critères d’admissibilité associés à certains de ces programmes les rendent inaccessibles aux personnes recevant des prestations d’invalidité ou bénéficiaires de l’aide sociale. Le MAML a indiqué que certains gestionnaires de services permettent ou interdisent aux assistés sociaux, ainsi qu’aux locataires de logements sociaux, d’avoir accès à la banque d’aide au loyer étant donné qu’ils bénéficient déjà d’autres programmes. On a indiqué à la Commission que des critères d’admissibilité semblables existent pour d’autres programmes, lesquels pourraient atténuer le désavantage qu’ils représentent pour ces personnes et ces groupes protégés par le Code.

Le programme Toit pour toi – aide ontarienne aux familles locataires, appelé simplement Toit pour toi, en est un exemple concret. Des personnes consultées ont fait remarquer que le ministère des Affaires municipales et du Logement avait trouvé un titre bien accrocheur pour ce programme, mais que les critères d’admissibilité éliminaient bon nombre de locataires à faible revenu. La Commission a appris que les assistés sociaux et les pensionnés ne peuvent pas bénéficier de la prestation mensuelle de 100 $ par mois et que seules les familles ayant un enfant à charge de moins de 18 ans sont admissibles au programme. Les personnes seules, les couples sans enfant et les parents dont les enfants ont atteint l’âge adulte ne peuvent pas non plus s’inscrire à ce programme (PACE).

Logement social

Il y a plus de 250 000 unités de logement social en Ontario, y compris du logement coopératif, sans but lucratif et privé, et des unités modifiées et avec services de soutien. La plupart sont financés et administrés par les municipalités (MAML). Le MAML a indiqué que c’était la responsabilité de la province de répondre aux besoins des ménages vulnérables et à faible revenu, par exemple en donnant la priorité aux victimes de violence conjugale, en protégeant le nombre d’unités modifiées à l’intention des personnes ayant un handicap physique et en mettant en vigueur des règles s’appliquant au logement social spécial pour les sans-abri. Le SMHN a indiqué qu’il y avait plusieurs types de logements sociaux et qu’on ne devrait pas présumer que le logement social est administré de la même façon dans toute la province étant donné que les capacités et les priorités diffèrent selon chaque région. Par exemple, le logement social n’est pas entièrement réglementé en vertu de la LRLS[108].

Des personnes consultées ont indiqué que la clientèle des logements sociaux est, par rapport à celle des logements locatifs privés, plutôt constituée de personnes handicapées, d’aînés, de familles monoparentales, de nouveaux immigrants et des personnes racialisées. Les locataires de logements sociaux doivent composer avec un faible revenu et des besoins spéciaux, et affronter les obstacles qui y sont associés (North Peel and Dufferin Community Legal Services)[109].

Les fournisseurs de logements sociaux ont parlé du rôle important qu’ils jouent étant donné qu’ils offrent l’accès au logement abordable à des groupes protégés par le Code et à des personnes à faible revenu. Pour les personnes à faible revenu, le logement social comble un vide en incluant des logements avec services de soutien, des subventions du gouvernement et des loyers indexés sur le revenu qui ne seraient pas nécessairement accessibles aux locataires du secteur privé. Toutefois, les fournisseurs de logements ont indiqué que la rareté des logements sociaux leur causait des problèmes sur le plan de la gestion des exigences d’admissibilité prescrites par la LRLS et de l’administration des listes d’attente (voir ci dessous).

Le CERA et le SRAC ont indiqué que le logement social doit être considéré comme l’une des nombreuses mesures positives qu’exigent les gouvernements pour s’attaquer aux besoins uniques des groupes défavorisés en matière de logement :

À cet égard, d’autres facteurs s’appliquent au logement social : les ressources que les gouvernements consacrent au secteur du logement subventionné sont-elles raisonnables et suffisantes pour résoudre le problème grandissant des sans-abri parmi les groupes protégés par le Code? Le programme est-il conçu de façon à respecter l’obligation de prendre des mesures raisonnables et, ainsi, à aider les groupes défavorisés à accéder à un logement convenable?

De nombreuses personnes consultées ont discuté du logement avec services de soutien. Ce type de logement fait le pont entre le logement, les services de soutien et les soins de santé en offrant divers programmes, notamment l’aide à la vie autonome, les soins de longue durée et d’autres services offerts aux locataires. La province finance directement et administre les logements exclusifs avec services de soutien (MAML). Les services de soutien sont essentiels, car ils contribuent à l’intégration et à la participation dans la société, ou dans un ensemble résidentiel, de personnes qui ont été marginalisées en raison des motifs prévus au Code, et en particulier des personnes ayant une maladie mentale. Lorsqu’ils sont offerts, ces services aident les locataires à s’entendre avec les locateurs et les autres locataires, et à conserver leur logement. Un logement avec services de soutien appropriés peut entraîner d’importantes répercussions sur la qualité de vie d’une personne :

J’ai passé plus de 30 ans dans une maison de soins de longue durée simplement parce qu’il n’existait pas de logement adapté à ma condition de personne handicapée. Lorsque l’occasion s’est enfin présentée, j’étais devenu tellement dépendant de ce type de soins que je n’étais pas préparé psychologiquement à quitter cet établissement. Je reçois maintenant des soins auxiliaires continus à l’unité d’habitation offrant des services de soutien où je vis, et ma vie a changé. Je me sens mieux, tant du point de vue physique que mental. J’ai un travail à temps partiel. Je suis maintenant capable de donner de mon temps à mes pairs, [dans un] hôpital de réadaptation. Je fais partie de différents conseils d’administration, ce que je n’avais ni le goût ni la chance de faire auparavant. (Un locataire d’un logement avec services de soutien)

Toutefois, la Commission a appris que les critères visant à accéder aux services de soutien sont parfois si stricts qu’il faut être un sans-abri pour y être admissible. Vu le nombre peu élevé de logements avec services de soutien, les personnes ayant une maladie mentale sont éventuellement condamnées à demeurer en institution, même si leur état de santé ne justifie aucunement qu’elles y restent[110]. La Commission a appris que les personnes lourdement handicapées, qui ont absolument besoin de vivre dans un logement avec services de soutien, se voient souvent refuser l’accès à ce type de logement en raison de leurs besoins qui sont considérés comme trop grands. Ces personnes risquent alors de se retrouver en institution ou dans la rue.

La pénurie de logements sociaux disponibles et le fonctionnement des listes d’attente entraînent des situations où des personnes sont parfois placées inutilement dans un logement avec services de soutien tandis que d’autres ayant des besoins particuliers ne peuvent pas en obtenir un. On a, par exemple, mentionné à la Commission des cas de femmes qui avaient été placées dans des logements avec services de soutien par suite de violence familiale, ainsi que d’autres cas où des personnes ayant une déficience mentale ou physique étaient placées dans des logements pour personnes âgées où elles ne recevaient pas les soins dont elles avaient besoin. La Commission a appris que, dans certains cas, des locateurs, leurs représentants et d’autres fournisseurs de logements devaient jouer le rôle de travailleur social avec des locataires ayant une limitation mentale pour combler le manque de services de soutien appropriés. La Commission a également appris que cette lacune pouvait éventuellement entraîner l’expulsion d’un locataire qui serait incapable de vivre de façon autonome dans son logement si ces services ne lui sont pas offerts.

Quelques fournisseurs de logements ont insisté sur l’importance de conserver et de financer le logement spécialisé afin de répondre aux besoins des groupes particuliers, protégés en vertu du Code. Par exemple, l’organisme Mainstay Housing a affirmé disposer du personnel et des outils nécessaires pour aider les locataires ayant une maladie mentale et en route vers la guérison, ce que les locateurs et les fournisseurs de logements sociaux ne peuvent pas offrir. Ces points de vue rejoignaient ceux d’autres fournisseurs de logements, notamment l’organisme Ontario Association of Non-Profit Homes and Services for Seniors :

Les fournisseurs de logements sociaux pour personnes âgées s’engagent à créer et à gérer des logements communautaires répondant aux besoins particuliers des aînés, liés à l’isolement social et aux problèmes de mobilité, dans des logements autonomes ou dans des résidences offrant des services leur permettant de conserver leur autonomie.

D’autres fournisseurs de logements ont souligné l’importance de veiller à ce que les personnes qui font l’objet de plusieurs motifs de discrimination reçoivent des services appropriés. Un participant a indiqué qu’après la décentralisation des pouvoirs provinciaux aux municipalités, plusieurs foyers ethniques pour personnes âgées ont perdu leur mandat. Les aînés de différents horizons ethniques ont alors dû recourir à la liste d’attente centrale afin d’obtenir un logement dans n’importe quel immeuble, même ceux qui ne sont pas prévus pour répondre aux besoins relatifs à un milieu de vie correspondant à leur culture.

On a fait part à la Commission des problèmes découlant de la consolidation des services de soutien communautaires offerts par plusieurs fournisseurs de soins de santé financés par la province grâce aux réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS). Plus précisément, on a mentionné à la Commission que les services destinés aux personnes ayant un handicap physique, comme les aides à l’alimentation, au bain et à la toilette et l’administration de médicaments, sont supprimés si ces personnes vivent dans un logement social. Par conséquent, les personnes qui ont vécu de façon autonome pendant plusieurs années ont dû déménager ou simplement se passer des services essentiels dont ils ont besoin pour vivre de façon autonome.

Des personnes consultées ont également parlé des problèmes que vivent certains locataires de logements avec services de soutien, relativement à des règles concernant les visiteurs ou l’utilisation d’aides motorisées à la mobilité dans les édifices. Lorsqu’un même service offre à des personnes handicapées un logement et des services d’auxiliaires et qu’une plainte visant un élément peut compromettre l’autre, ces locataires choisissent la plupart du temps de ne pas se plaindre et sont de plus en plus vulnérables aux abus (Hamilton Mountain Community and Legal Services).

On a également fait part de préoccupations concernant l’aide sous forme de loyer indexé sur le revenu, qui est offerte à un fournisseur de logements sociaux et administrée par un gestionnaire de services en vertu de la LRLS. Ce type d’aide permet à une famille ou à une personne admissible d’obtenir un loyer dont le coût est proportionnel à son revenu. C’est un élément important des stratégies actuelles visant à rendre le logement plus abordable pour les personnes et les familles à faible revenu. Toutefois, la Commission a appris que les exigences en matière de loyer indexé sur le revenu touchent particulièrement les personnes ayant une maladie mentale.

Bon nombre de personnes ayant une maladie mentale ne disposent pas de compte bancaire, ne remplissent pas de déclaration de revenus ou ont perdu leur carte d’identité, et le processus de demande n’est pas complet tant que les formalités administratives ne sont pas réglées. Lorsqu’une personne est inscrite sur une liste, il peut s’écouler plus de 18 mois avant qu’elle obtienne un appartement à une chambre et il arrive souvent que le [fournisseur de logements] fixe la date d’entrée au milieu du mois, lorsque le client ne dispose pas d’argent pour verser un loyer supplémentaire ou effectuer un dépôt pour les services publics. (PACE)

Un autre point abordé à l’égard des programmes d’aide sous forme de loyer indexé sur le revenu concerne la situation où un locataire à faible revenu obtient un revenu supplémentaire. Dans un tel cas, le fournisseur de logements sociaux diminue automatiquement la subvention au logement. En 2007, un rapport d’étude sur la pauvreté systémique, publié par la Fondation Metcalf, l’auteur indique que pour chaque dollar que gagne un immigrant torontois recevant plusieurs services sociaux, la location du logement social s’élève de 30 cents sur ce dollar[111]. Selon les commentaires de l’auteur, le fait de suspendre de façon non coordonnée l’aide accordée aux pauvres de l’Ontario rend impossible pour ces bénéficiaires de passer à l’étape de la véritable autonomie ou de briser le cercle vicieux de la pauvreté[112].

Le problème du nombre de personnes sur les listes d’attente d’un logement subventionné a été mentionné lors des dernières observations[113] du CESCR et il a également été soulevé par des groupes de défense des droits des locataires et des fournisseurs de logements au cours de cette consultation. Les services municipaux sont tenus par la province et les conseils municipaux de mettre à jour la liste d’attente pour du logement social (MAML). La Commission a appris que les délais d’attente excessifs associés à l’accès à un logement abordable, tant pour le logement social que les coopératives d’habitation, signifie que le logement subventionné n’est pas une option viable pour une grande majorité de locataires à faible revenu en Ontario, dont bon nombre sont protégés en vertu du Code. On a fourni de nombreux exemples de temps d’attente, variant entre 5 et 10 ans, et des changements radicaux que vivaient les locataires durant cette période.

Durant la longue attente pour obtenir un logement abordable, peu de personnes reçoivent le logement dont ils ont besoin, au moment opportun : les jeunes deviennent des adultes, les familles s’agrandissent, les personnes ayant une maladie ou un handicap grave continuent de souffrir, les nouveaux arrivants se débrouillent comme ils peuvent pour loger leur famille, et les personnes âgées et les sans-abri décèdent. (FHCC)

Il en résulte en bout de ligne que, durant cette période d’attente, un bon nombre de personnes consacrent plus de 50 % de leur revenu à leur loyer. Par exemple, la société Catholic Children’s Aid Society of Metropolitan Toronto a décrit le cas d’une cliente ayant deux enfants, qui avait été sur une liste pour un logement social pendant 9 ans et qui, entretemps, dépensait en frais de loyer plus de 70 % de son revenu. D’autres personnes ne se donnent même pas la peine de s’inscrire à une liste en raison des temps d’attente[114].

Étant donné le besoin aigu en matière de logements subventionnés et abordables, et vu la rareté de la ressource, certaines personnes seront éliminées à la présélection ou mises sur une liste d’attente (ALSBLO). Par exemple, la Commission a appris que, dans le cas des Autochtones à la recherche d’un logement, on les redirige souvent vers des organismes autochtones plutôt que de leur accorder la priorité sur les listes d’attente d’un logement social. Toutefois, puisque le besoin en matière d’habitation parmi la population autochtone urbaine est impérieux et exagérément élevé, la demande pour du logement social tenant compte des besoins des Autochtones dépasse de beaucoup l’offre et la disponibilité d’unités de logement destinées à cette population (OFIFC).

Les listes d’attente sont fondées sur la date de la demande, et l’on accorde la priorité aux victimes de violence conjugale partout dans la province (MAML). Toutefois, on a indiqué à la Commission que le nombre de personnes sur les listes d’attente rendaient inutile ce statut de priorité, car les femmes victimes de violence ne sont peut-être pas en mesure de quitter leur domicile au moment où elles devraient le faire. Les femmes vivant une telle situation sont forcées de choisir entre deux mauvaises solutions ayant des conséquences graves pour elles-mêmes et leurs enfants :

Ces femmes entament un processus de prise de décision complexe. Dois-je essayer de survivre avec peu de moyens économiques et risquer de voir mes enfants avoir faim, souffrir de malnutrition, se retrouver dans la rue ou subir de la violence et peut-être me les faire retirer par le bureau de protection de l’enfance, ou dois-je retourner avec mon conjoint violent et offrir à mes enfants de la nourriture dans leur assiette et un toit, mais en nous exposant tous à de la violence, voire à la mort? (CERA, SRAC, NWWG)

D’autres mémoires, y compris celui du MAML, ont souligné que les gestionnaires de services peuvent, à leur discrétion, déterminer les priorités locales afin de répondre aux besoins des « groupes défavorisés ». Par exemple, le réseau SMHN a indiqué que les priorités locales pourraient comprendre les jeunes de 16 et 17 ans, les malades en phase terminale et les nouveaux arrivants au Canada. Toutefois, en raison de la rareté du logement, la Commission a appris qu’il était difficile d’établir ces priorités et que celles-ci pouvaient donner l’impression de créer des injustices.

La conciliation des besoins des résidents actuels avec ceux des personnes inscrites sur la liste d’attente présente également un problème. On a expliqué à la Commission que, même si l’on veut maximiser le nombre de personnes qui peuvent avoir accès à un logement abordable, les personnes dont le statut familial change sont souvent visées.

Dans les logements coopératifs, les personnes dont les enfants ont quitté le domicile familial emménagent souvent dans une unité plus petite, à l’intérieur de leur coopérative qui, pour la plupart, considère ces transferts comme une priorité. Mais si la coopérative ne dispose d’aucun petit logement, il y a un conflit entre l’intérêt du parent dont le nid est vide, qui pourrait être forcé de quitter son logement, ses amis et peut-être le soutien médical qu’il reçoit, et celui de la famille inscrite sur la liste d’attente et qui a besoin d’un logement plus grand. Il est évident que ce sont des choix qui ne devraient être imposés à personne. La solution réside dans le fait d’offrir davantage de logements abordables dans une vaste gamme de dimensions. (FHCC)

Des fournisseurs de logements sociaux, y compris la Ville d’Ottawa, ont particulièrement insisté sur le niveau actuel de financement du gouvernement, lequel constitue un obstacle à leur capacité à offrir un logement aux personnes sur leurs listes d’attente, et à entretenir et à réparer leurs unités et leurs édifices où résident les actuels locataires. L’OFCMHAP a indiqué que le manque de financement se traduit par des pratiques discriminatoires, des services inadéquats, l’itinérance chez certains clients, ainsi qu’un fardeau beaucoup plus lourd sur le système des soins de santé et sur les services sociaux. Même lorsque des programmes efficaces sont mis sur pied, on a parlé du caractère transitoire ou de la courte durée du financement et de ses conséquences sur les fournisseurs de logements, les professionnels offrants des services et les personnes ayant besoin d’un logement.

Les personnes ayant besoin d’un logement en ont assez des longues listes d’attente et du manque d’aide, tandis que les travailleurs d’approche en santé mentale sont frustrés par le manque de ressources humaines et financières qui leur permettraient de venir en aide aux personnes dans le besoin. Cette frustration est exacerbée par le financement gouvernemental des projets de logements à très court terme. Les travailleurs avouent que le nombre de clients qui leur est dirigé est bien trop élevé pour ce qu’ils sont en mesure de traiter de façon réaliste et ils précisent que les projets d’accès à un logement font grimper le nombre de personnes sur les listes d’attente et le niveau de leurs espérances, qui est ensuite anéanti par l’abandon du financement. (PACE)

Bon nombre de personnes consultées se sont montrées favorables à la modification de l’approche chronologique des listes d’attente. Les groupes de défense des droits des locataires et les fournisseurs de logements ont tous plaidé en faveur d’allocations de logement ou de subventions transférables. Ce point est abordé plus en détail à la section 5.3, « Pauvreté et niveaux de revenu inadéquat ». Toutefois, certaines personnes et organisations consultées, notamment la FHCC, se sont prononcées en faveur du maintien du système selon lequel le premier arrivé est le premier traité, en accordant une priorité spéciale aux victimes de violence conjugale. Le groupe St. Joseph’s Care a décrit le dilemme auquel seraient confrontés les fournisseurs de logements si l’attribution des logements sociaux était fondée sur le besoin perçu plutôt que sur l’ordre chronologique de présentation des demandes :

Dans nos projets de logements pour personnes âgées, comment déterminer qui en a le plus besoin? Le dialysé ou celui qui est cloué à un fauteuil roulant? La personne qui a des problèmes cardiaques ou de santé mentale? Comment décider quel besoin est le plus urgent? Créerait-on une grille de points permettant de déterminer la personne qui, obtenant le plus haut « pointage », aurait droit à un logement plus rapidement?(...) C’est le fournisseur qui devrait alors prendre une décision, ce qui ouvrirait la voie à des accusations de fausse interprétation, de parti pris ou de discrimination fondées sur la maladie.

Logement coopératif

La Fédération de l’habitation coopérative du Canada (FHCC) a indiqué que le modèle d’habitation coopérative s’est avéré un moyen efficace et durable de fournir aux Canadiennes et aux Canadiens un logement abordable. Toutes les coopératives d’habitation en Ontario sont régies par la Loi sur les sociétés coopératives[115] et bon nombre d’entre elles font partie du réseau de logements sociaux à but non lucratif. Par exemple, environ la moitié des coopératives ontariennes à but non lucratif de la FHCC est financée en vertu d’ententes d’exploitation fédérales, tandis que les autres sont régies par la LRLS et administrées par des gestionnaires de services municipaux. Les coopératives optent souvent pour le logement socialement intégré, dont une partie de leurs unités est subventionnée. Dans les coopératives, on a également parlé de problèmes liés aux programmes d’aide sous forme de loyer indexé sur le revenu.

La Commission a appris que l’avenir des programmes de supplément au loyer fournis par les coopératives est incertain, que bon nombre des coopératives ne disposent pas des réserves de capital nécessaires pour entretenir leurs immeubles et que certaines risquent de ne plus pouvoir offrir des logements aux locataires à faible revenu.

Le secteur du logement locatif privé

En raison de l’offre insuffisante en matière de logements sociaux, bon nombre de locataires se tournent vers le secteur du logement locatif privé. Les groupes de défense des droits des locataires craignent une aggravation de la discrimination dans le secteur du logement locatif privé s’il n’y a pas suffisamment de logements convenables et abordables à louer. Lorsque la demande et le besoin surpassent l’offre, les locateurs peuvent se permettre d’être davantage sélectifs sans craindre des taux d’inoccupation élevés (ATTSO). À la section 4.2, « Méthodes de sélection des locataires », on décrit les répercussions sur les droits humains des moyens utilisés couramment pour choisir les locataires.

Puisqu’il n’existe aucun contrôle sur les augmentations de loyer à l’arrivée d’un nouveau locataire, le locateur et le locataire peuvent s’entendre sur n’importe quel montant (MAML)[116]. Des groupes de défense des droits des locataires, notamment le CODDL, étaient préoccupés par cette situation et ont indiqué que la suppression des mécanismes de contrôle des vacances a entraîné une diminution rapide du nombre de logements abordables en Ontario. Selon la clinique juridique communautaire Parkdale Community Legal Services:

(...) pour la clientèle qui accède au secteur du logement locatif, et qui est composée en très grande partie de nouveaux arrivants, de familles à la recherche d’appartements plus grands, de jeunes ou d’étudiants, le prix des loyers est beaucoup plus élevé que ce que payaient les locataires précédents. Cette situation crée un préjudice financier pour ces locataires qui, en général, n’ont pas les moyens de payer cher pour un loyer.

Des groupes de défense des droits des locataires ont également mentionné que, s’ils sont conscients qu’ils peuvent hausser le prix du loyer du prochain locataire, les locateurs peuvent avoir une motivation financière à expulser des locataires de leur appartement abordable ou être moins disposés à établir des programmes de paiement des arriérés. Les incidences sur les anciens locataires et les nouveaux arrivants sont décrites à la section 4.1, « Discrimination fondée sur des motifs prévus au Code ».

D’un autre côté, la FRPO, l’EOLO et d’autres associations de fournisseurs de logements ont allégué que le contrôle des loyers nuit à l’offre de logements locatifs, car la qualité des propriétés se dégrade lorsque les locateurs sont incapables de hausser les loyers pour aller de pair avec les salaires, les frais d’immobilisations, les taxes, les taux d’intérêt et les coûts des services publics. Ils ont également fait valoir que le contrôle des loyers contribuait à une réduction artificielle des prix et que les unités les plus abordables sont occupées par des ménages qui pourraient payer le prix du marché pour leur loyer, empêchant ainsi les locataires à faible revenu d’avoir accès à un marché du logement locatif peu ouvert. L’EOLO a indiqué à la Commission que les facteurs associés au contrôle des loyers réduisaient l’accès des groupes défavorisés au logement, plutôt que de l’augmenter[117].

La discussion concernant les logements sur le marché locatif privé a porté principalement sur les maisons de chambres et les appartements de sous-sol. Les maisons de chambres jouent un rôle important et viable, car elles répondent aux besoins en matière de logement abordable de certaines personnes protégées en vertu du Code, qui sont incapables de se payer un logement ordinaire[118]. La Commission a appris qu’en Ontario, bon nombre de groupes marginalisés, comme les personnes à faible revenu, les aînés, les étudiants, les nouveaux réfugiés et immigrants, ainsi que les personnes ayant un handicap, notamment des problèmes de santé mentale, se tournent vers les maisons de chambres pour se loger (Rupert Coalition).

La Rupert Coalition définit une maison de chambres comme « un édifice dans lequel les locataires occupent des chambres simples et partagent la cuisine, la salle de bain et la partie commune. Le loyer dans une maison de chambres autorisée varie entre 400 $ et près de 600 $ par mois, ce qui fait de ce type d’hébergement le moyen le plus abordable de se loger de façon permanente pour les personnes seules et à faible revenu. » Les mémoires reçus confirment que les tendances indiquées il y a près de 10 ans dans le rapport The Report of the Mayor’s Homelessness Action Task Force: Taking Responsibility for Homelessness (Golden Report) existent encore aujourd’hui :

Les maisons de chambres et les appartements accessoires jouent un rôle important dans le marché de l’habitation, rôle qui prend une importance accrue à mesure que disparaissent les autres options. Avec les compressions de l’aide sociale, la fin des nouveaux programmes de logements sociaux et le faible taux d’inoccupation dans le secteur des appartements locatifs, les maisons de chambres et les logements supplémentaires sont devenus une façon de vivre permanente pour bon nombre de personnes et de familles. Ces types de logement ne constituent plus une forme temporaire d’habitation.

Des personnes et des organisations consultées, notamment le Project Connect, ont insisté sur le fait que lorsque les travailleurs d’un service de recherche de logement sont à la recherche d’un logement dont le loyer est inférieur à 500 $ par mois pour des clients à faible revenu ou vivant de l’aide sociale, les maisons de chambres sont parfois leur unique ressource. Pour bon nombre de ces clients, la maison de chambres constitue la dernière option de logement permanent avant l’itinérance (Rupert Coalition)[119].

Bien que les maisons de chambres soient l’option la plus viable pour les personnes et les familles à faible revenu, trop souvent, elles ne constituent pas un chez soi sûr et confortable. La Commission a appris que, étant donné l’imposition de restrictions sur les maisons de chambres légalement enregistrées, on s’inquiète de plus en plus du nombre croissant de maisons de chambres qui ne font l’objet d’aucune réglementation ni inspection, qui ne servent qu’à combler cette lacune dans le marché locatif et dont les conditions de location auxquelles peuvent être soumis leurs occupants sont non conformes aux normes. Par exemple, l’organisme PACE a fait état des problèmes fréquents que vivent les locataires désespérés et désemparés dans certaines maisons de chambres : les souris et d’autres rongeurs, les vols commis par d’autres locataires, des problèmes d’électricité, de chauffage et d’isolation, et le délabrement.

Les locateurs et les groupes de défense des droits des locataires se sont montrés préoccupés par l’opposition « pas dans ma cour » au développement du logement abordable dans le marché privé, comme des maisons de chambres, des appartements de sous-sol et des ensembles domiciliaires à haute densité. Ces types de questions sont abordées à la section 5.5, « Opposition "pas dans ma cour" et logement abordable ».

Bon nombre de personnes consultées ont indiqué que les appartements de sous sol et les logements supplémentaires, lorsqu’ils sont adéquatement réglementés, offraient une option de logement sûr et abordable dans le marché locatif privé. Le MAML a précisé que les municipalités pouvaient établir des politiques concernant les deuxièmes unités sans faire appel à la Commission des affaires municipales de l’Ontario. Toutefois, d’autres personnes ont indiqué que la loi avait déjà appuyé la création d’appartements de sous-sol et de logements supplémentaires de bonne qualité[120]. La Commission a appris que certains locataires à faible revenu louent des appartements de sous-sol « illégaux » qui ne sont pas conformes aux règlements de zonage municipaux et ne respectent pas les normes relatives à la santé et à la sécurité. Ces locataires risquent davantage l’itinérance si cette situation est portée à l’attention des autorités locales.

[D]ès que la direction des règlements municipaux découvre la présence des logements, les locataires sont tenus de libérer les lieux très rapidement. Se trouvant dans cette situation malencontreuse et se sentant impuissants pour remettre en question cette ordonnance, les locataires risquent fort de se retrouver sans abri. Vu ces conséquences éventuellement désastreuses, les locataires de ces logements illégaux hésitent à faire valoir leurs droits en vertu de la LLUH et ne portent pas plainte auprès des autorités ni des services de santé et de prévention des incendies même s’ils se posent de sérieuses questions sur ces logements. (Community Legal Clinic of York Region)

Des associations de locateurs privés ont fait valoir que les politiques de conversion, qui empêchent la démolition, le réaménagement et la densification d’anciens immeubles à usage locatif, ont un effet adverse sur l’accroissement de l’offre en matière de logements locatifs. La FRPO a indiqué que ces politiques créaient un obstacle à l’offre de logements abordables en réduisant les possibilités d’accession à la propriété pour les locataires à la recherche d’une résidence abordable et disponible, en décourageant l’investissement de capitaux dans les anciens édifices et en empêchant l’investissement dans le logement locatif neuf. Réciproquement, certaines personnes consultées ont allégué que les conversions se traduisent par une diminution de l’offre de logements locatifs disponibles, étant donné que la rentabilité réside dans la conversion des propriétés locatives en résidences à acheter.

À Cabbagetown, où l’on a connu une gentrification comme nulle part ailleurs dans la ville, le nombre de maisons de chambres a considérablement diminué. Les anciennes maisons de chambres ont été converties de nouveau en maisons unifamiliales. Ce qui n’a rien de mal. Toutefois, notre expérience nous apprend que les nouveaux propriétaires en viennent simplement à ne plus tolérer la présence des maisons de chambres, car ils ne veulent pas de « ces gens » dans leur quartier et ils sont préoccupés uniquement par la valeur de leur propriété. (Project Connect)

Plusieurs locateurs et associations ont indiqué que le taux d’imposition des logements multi-résidentiels nuit à l’accès à un logement abordable pour les personnes à faible revenu. Selon la London Property Management Association, le taux d’imposition des unités de logement multi-résidentiel est 2,5 fois plus élevé que celui des logements occupés par leur propriétaire. En conséquence, les locataires qui, pour bon nombre d’entre eux, ont un revenu relativement faible et sont protégés en vertu du Code, se retrouvent à payer proportionnellement plus de taxe dans la part de leur loyer que n’en paient les propriétaires. La FRPO a plaidé en faveur d’une égalisation des taux de taxe pour les résidences et les propriétés multi-résidentielles (de plus de six unités) et la répartition des coûts parmi toutes les classes de propriétés afin d’encourager le développement du logement locatif[121].

Logement non convenable et prise en charge d’enfants

La Commission a été extrêmement surprise d’apprendre qu’en Ontario, des parents renoncent à leurs enfants ou des sociétés d’aide à l’enfance retirent des enfants de leur famille parce qu’elle ne dispose pas d’un logement adéquat. D’ailleurs, le CESCR avait déjà exprimé ces préoccupations[122]. Des personnes consultées ont relié ce problème aux motifs prévus au Code comme l’état familial, la dépendance à l’égard de l’aide sociale et la race. Des recommandations ont déjà été formulées afin que le gouvernement recueille des données statistiques concernant la renonciation, en vue d’un placement en famille d’accueil, d’enfants issus de familles à faible revenu, de familles monoparentales et de familles autochtones et afro canadiennes, de façon à évaluer précisément l’ampleur du problème. On a également recommandé que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux prennent toutes les mesures nécessaires, et fournissent au besoin du soutien financier, pour éviter les renonciations d’enfants[123]. La Commission a appris que, malgré ces recommandations, ce problème est encore très préoccupant dans certaines collectivités de notre province.

Même si un logement non convenable ou des problèmes de logement ne constituent pas des motifs suffisants pour affirmer qu’un enfant a besoin de protection en vertu de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille[124], sur le plan pratique, le logement joue un rôle de plus en plus important dans le revenu des familles. La société CAST a précisé que ses clients défavorisés sur le plan économique sont confrontés à des obstacles de taille lorsqu’il s’agit d’obtenir un logement adéquat et approprié et, pour certains d’entre eux, cette situation nuit à leur capacité de s’occuper de leurs enfants. Une société d’aide à l’enfance a d’ailleurs indiqué ce qui suit :

Bien que notre organisme hésite à prendre en charge des enfants uniquement pour des mauvaises conditions de logement, nous avons dû avoir recours à ces mesures et nous ne pouvons pas retourner ces enfants dans leur milieu sans savoir que l’environnement dans lesquels ils vivront est sûr.

Les participants aux tables rondes ont indiqué qu’un facteur important contribuait à séparer les parents de leurs enfants, et c’est la combinaison de mesures législatives et de politiques appliquées par des sociétés d’aide à l’enfance et des fournisseurs de logements. Par exemple, on a parlé des nombreuses situations où le parent ne pouvait pas reprendre ses enfants avant d’avoir trouvé un logement convenable, mais que ce parent n’était pas admissible à un logement adéquat avant d’avoir obtenu la garde de ses enfants. La Commission a également appris qu’en raison de la pénurie de logements appropriés et de services disponibles, des familles se voient obligées de vivre dans des refuges, ce qui retarde le moment où elles pourront reprendre leurs enfants.

Une recherche menée en 2000 indiquait que, dans 20 % des cas, c’était le logement de la famille qui était à la source du placement temporaire d’un enfant dans une famille d’accueil. Cette même année, dans 11,5 % des cas, le retour de l’enfant était reporté en raison de problèmes liés au logement. Ce sont des problèmes de logement qui, dans 26 % des cas, ont motivé les parents à accepter de plein gré de placer leurs enfants en foyer d’accueil et c’est ce qui explique 74 % des cas de prise en charge par l’État. Depuis 1992, on a connu une hausse du pourcentage de cas pour lesquels le logement a constitué un déterminant dans les décisions de placer un enfant en famille d’accueil ou de retarder le retour de l’enfant dans sa famille[125].

5.3. Pauvreté et niveaux de revenu inadéquat

Les violations des droits de la personne en matière de logement sont souvent reliées à la pauvreté et au revenu. Bien que la condition sociale et économique ne constitue pas un motif en vertu du Code, la discrimination ayant trait à la pauvreté a été abordée dans les motifs visés par le Code lorsqu’on est en mesure de démontrer qu’il existe un lien entre la pauvreté et ces motifs. Par exemple, on a mentionné le lien entre la pauvreté et les motifs prévus au Code, comme la race, le sexe et l’état familial, dans la cause Kearney c. Bramalea Ltd[126]. En règle générale, on peut faire intervenir le Code lorsque le faible revenu est relié aux motifs tels que la race, l’état familial, l’âge, un handicap ou la dépendance à l’égard de l’aide sociale, comme dans le cas du programme Ontario au travail (OT) ou du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH).

Le fait qu’une proportion exagérément élevée de gens visés selon les motifs prévus au Code comme l’âge, le sexe, un handicap (y compris une maladie mentale), l’état familial, la dépendance à l’égard de l’aide sociale et la race, le lieu d’origine et la citoyenneté (y compris les réfugiés et les immigrants) faisaient partie des personnes vivant dans la pauvreté a constitué un sujet de préoccupation pour des personnes consultées. Certaines ont fait référence aux critiques au niveau international selon lesquelles les taux de pauvreté au Canada demeureraient très élevés parmi les personnes défavorisées et marginalisées et les groupes comme les Autochtones, les Afro Canadiens, les immigrants, les personnes handicapées, les jeunes, les travailleuses à faible revenu et les mères de famille monoparentale[127].

Les locataires à faible revenu disposent de moins de choix sur le marché locatif en raison du prix élevé de bon nombre des options de logement. En outre, on a noté que 31 % des ménages à faible revenu déménageaient chaque année comparativement à 27 % des ménages à revenu plus élevé (CERA et SRAC). Des études ont démontré qu’une grande proportion de locateurs préfère ne pas louer à des personnes à faible revenu[128], ce qui réduit d’autant le choix de logements auxquels celles-ci peuvent avoir accès. La Commission a appris que les locataires ayant les revenus les plus faibles sont souvent forcés de louer un appartement de qualité non convenable et mal entretenu, mais plus dispendieux que d’autres.

Une nouvelle arrivante, ayant des enfants mais aucune preuve de solvabilité ni référence, qui serait disqualifiée en raison des critères de revenu et qui est vulnérable au racisme caché, découvrira que le choix des appartements à Toronto est très restreint pour elle. Elle s’apercevra qu’elle devra payer beaucoup plus cher que d’autres locataires pour un appartement non convenable. (CERA et SRAC)

On a également formulé des inquiétudes sur l’interprétation des dispositions de la LLUH à l’intérieur du cadre du PIDESC, en particulier en ce qui a trait aux expulsions ordonnées pour de faibles arriérés de loyer et l’incidence que ces mesures ont sur les locataires à faible revenu[129].

Stratégie de réduction de la pauvreté et droits de la personne

Le plus récent discours du Trône du gouvernement provincial, prononcé le 29 novembre 2007 par l’honorable David C. Onley, lieutenant-gouverneur de l’Ontario, faisait référence au début des travaux portant sur une stratégie visant à réduire la pauvreté chez les enfants[130]. On a créé un comité ministériel chargé d’établir des indicateurs et des cibles en matière de pauvreté, ainsi qu’une stratégie ciblée de réduction de la pauvreté chez les enfants[131].

La Commission a le plaisir de voir qu’on a étendu la portée de la stratégie visant la réduction de la pauvreté de façon à englober les enfants ainsi que leur famille. Toutefois, le fait qu’un grand nombre d’autres personnes, dont plusieurs sont protégées en vertu des motifs prévus au Code, vivent également dans la pauvreté, constitue pour la Commission un sujet de préoccupation[132]. Il est également inquiétant de constater que la stratégie annoncée ne vise pas explicitement à régler les problèmes soulevés par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CESCR) lors de ses trois dernières études et à mettre en œuvre les recommandations qui sont du ressort du gouvernement provincial. Par exemple, le CESCR a recommandé d’augmenter les allocations de logement et les taux des prestations d’aide sociale à des niveaux réalistes[133].

Certaines personnes consultées, qui partageaient ces inquiétudes, ont également indiqué que le fait que les différents gouvernements n’aient pas pris de mesures significatives pour atténuer la pauvreté entraîne un désavantage continu auquel sont confrontés les chefs de famille monoparentale, les personnes racialisées, les personnes handicapées et les autres personnes protégées en vertu du Code. L’exemple donné par bon nombre de ces personnes concernait la renonciation d’enfants en vue de les confier aux sociétés d’aide à l’enfance, et dont on a discuté plus haut.

Aide sociale et salaire vital

Les participants à la consultation ont exprimé leur point de vue relativement aux hausses récentes des taux de prestations d’aide sociale et de salaire minimum[134] qui, bien qu’accueillies favorablement, ne sont pas suffisantes pour permettre aux locataires dépendants de ces formes de revenu de bénéficier d’une égalité d’accès au logement. Plusieurs personnes consultées ont indiqué que les bénéficiaires de l’aide sociale sont plus mal en point qu’avant, puisque les augmentations de cette aide n’ont pas suivi le rythme de l’inflation et des hausses de loyer.

En Ontario, les taux des prestations d’aide sociale avaient été coupés de 21,6 % en 1995 et, malgré de légères augmentations au cours des dernières années, on n’a pas réussi à réduire l’écart entre les revenus et le prix des loyers. Ainsi, en 1995, une personne seule recevait 663 $ par mois et aujourd’hui, elle reçoit une prestation mensuelle de 560 $. Si l’on prend en compte le taux d’inflation, ainsi que les hausses du prix des loyers, cette personne a subi une perte d’environ 40 % de son revenu. (Housing Help Centre)

Le CODDL et d’autres personnes consultées ont fait remarquer que la vaste majorité des personnes bénéficiant de l’aide sociale demeurent dans des logements du marché locatif privé[135]. Cela signifie que les assistés sociaux ne sont pas en mesure de se trouver un logement de qualité au prix moyen du marché en raison de leur revenu insuffisant. Par exemple, l’Alliance pour résoudre la question des sans-abri a fait remarquer qu’en 2006, les prestations du programme OT versées à une personne seule étaient de 548 $ par mois tandis qu’un loyer moyen coûtait 633 $ pour un studio ou 774 $ pour un appartement à une chambre. Des problèmes semblables se posent pour les personnes qui participent au programme POSPH, lequel verse une allocation de logement pour personne seule d’un maximum de 346 $, tandis qu’en moyenne, il en coûte 787 $ pour louer un appartement à une chambre en Ontario[136] (BIPEP).

Des préoccupations semblables ont été soulevées au sujet de programmes comme la prise en charge et les soins prolongés, offerts aux pupilles de la Couronne à titre de programme d’aide à la vie autonome. Ces programmes sont financés par des sociétés d’aide à l’enfance qui pigent dans leurs allocations provinciales générales, mais cette prestation mensuelle de 663 $ est insuffisante pour permettre au jeune de quitter le programme de soins et de se trouver un logement dans un environnement sûr et favorable (CAS of London & Middlesex). L’absence d’un financement et d’un soutien adéquats, permettant aux pupilles de la Couronne de quitter le programme de soins, peut avoir des conséquences à long terme importantes, tant pour le jeune que pour la société en général. Cela peut se traduire par une hausse des coûts associés à l’aide sociale, à la justice pénale, aux services de santé et aux services en santé mentale[137].

Une fois installés dans leur logement, les locataires qui disposent d’un revenu insuffisant éprouvent des difficultés à conserver leur loyer et à subvenir à leurs autres besoins. Lorsque le prix du loyer est supérieur à l’allocation de logement versée dans le cadre des programmes OT et POSPH, les bénéficiaires de l’aide sociale doivent piger dans leur allocation servant à leurs besoins essentiels pour payer leur loyer mensuel ou ils sont forcés de chercher un autre type de logement, comme les motels ou l’hébergement temporaire chez l’un et chez l’autre (Algoma Community Legal Clinic). Ces ménages utilisent une part importante de leur argent destiné à la nourriture pour payer leur loyer et font souvent appel aux banques alimentaires pour nourrir leur famille. De jeunes parents sont forcés de louer un logement qui ne convient pas à leur famille, qui est dangereux, insalubre et inabordable, leur laissant peu d’argent pour répondre à leurs autres besoins (Humewood House). Une locataire participant au programme POSPH a indiqué à la Commission qu’elle avait eu beaucoup de difficultés à conserver son appartement étant donné que les coûts de location étaient plus élevés que ce qu’elle pouvait réellement payer.

Des participants aux tables rondes ont eu de vives discussions sur les répercussions qu’ont eues les fortes réductions imposées aux bénéficiaires de l’aide sociale et à leurs familles. Par exemple, lorsqu’un enfant atteint l’âge de 18 ans, sa famille perd une partie de son revenu. Ainsi, c’est la capacité de la famille à demeurer dans son logement social qui est réduite[138]. Toutefois, comme il a été précisé à la section 4.1, « Discrimination fondée sur des motifs prévus au Code », ce jeune adulte peut être confronté à des obstacles et à de la discrimination dans sa recherche d’un logement convenable sur le marché locatif, et il risque de se retrouver sans abri ou de vivre dans un quartier défavorisé. Des recommandations ont été formulées à l’effet que les autorités responsables du logement social, le programme Ontario au travail, les organismes de soins à l’enfance, d’aide aux étudiants et d’autres types de soutien aux étudiants collaborent à la mise au point d’un système de planification de la transition visant à permettre aux jeunes adultes admissibles de stabiliser leur revenu et celui de leur famille[139].

Les travailleurs touchant le salaire minimum sont, eux aussi, désavantagés sur le marché locatif, car leur revenu est insuffisant pour payer le loyer moyen en vigueur dans la province. Des personnes consultées ont soulevé le fait que le salaire minimum actuel de 8,00 $/heure ne constitue pas un salaire vital et qu’une personne travaillant à plein temps et au salaire minimum pendant une année complète ne gagnera pas suffisamment d’argent pour échapper à la pauvreté[140] . En Ontario, le salaire minimum augmentera graduellement pour atteindre 10,25 $/heure en 2010[141]. Toutefois, des groupes de pression ont demandé que le salaire minimum soit porté à 10,00 $ dès 2005, de façon à être indexé au coût de la vie[142]. Il semble donc que les inquiétudes formulées lors de la consultation et à l’échelle internationale concernant le niveau de vie des travailleurs touchant le salaire minimum ne soient pas encore prises en compte dans leur intégralité.

Comme bon nombre de personnes consultées l’ont fait remarquer, les travailleurs à salaire minimum sont souvent liés à des motifs prévus au Code. Par exemple, des statistiques indiquent que les « travailleurs de couleur »[143] et les femmes sont exagérément représentés dans le groupe des travailleurs à salaire minimum[144]. En outre, la Commission a appris que le « travailleur à faible salaire » éprouve des difficultés lorsqu’il s’agit de louer un appartement abordable et qu’on lui refuse la location s’il ne peut verser les avances de loyer ou ne répond pas aux critères de revenu exigés par les locateurs. Voir aussi la section 4.2, « Méthodes de sélection des locataires ».

On a également noté que les femmes représentent une part importante des travailleurs à temps partiel, bien souvent en raison des soins qu’elles donnent à leur famille. Elles ont grandement besoin d’avoir accès à un salaire décent ainsi qu’à des avantages en matière d’emploi, comme une assurance en cas de maladie et d’invalidité prolongée. Toutefois, le CERA a fait remarquer qu’en Ontario, il n’existe aucune loi obligeant les employeurs à fournir des avantages sociaux établis au prorata à leurs employés à temps partiel. De ce fait, la pratique chez les employeurs varie et bon nombre de travailleurs et leurs familles ne bénéficient d’aucune protection en cas de perte soudaine de revenu pour invalidité. Cette situation accroît donc les risques d’itinérance chez ces personnes.

Les taux de prestations d’aide sociale et de salaire minimum doivent être reliés au coût réel de la location d’un logement en plus d’être conformes aux obligations internationales et tenir compte de la plupart des critiques émises à l’égard de la conformité du Canada avec ces obligations. Toutefois, un grand nombre des recommandations du CESCR formulées en 1993 et en 1998 n’ont toujours pas été mises en œuvre et plusieurs préoccupations graves concernant les niveaux de revenu sont encore présentes[145]. Ce sont les suivantes :

  • L’absence d’un droit exécutoire conféré à toutes les personnes dans le besoin de recevoir des prestations d’aide sociale adéquates de façon non discriminatoire;
  • Les incidences négatives de certains programmes de travail obligatoire imposés aux bénéficiaires de l’aide sociale;
  • Un salaire minimum et des prestations d’aide sociale qui ne suffisent pas à assurer la concrétisation du droit à un niveau de vie convenable pour tous;
  • Des prestations d’aide sociale moins élevées qu’il y a dix ans, équivalant à environ moins de la moitié du seuil de faible revenu et qui ne procurent pas un revenu suffisant pour répondre aux besoins de base en matière de nourriture, de vêtements et de logement;
  • L’« incidence discriminatoire » du « système de récupération fiscale » de la Prestation nationale pour enfants sur les familles les plus pauvres du Canada, en particulier celles qui sont dirigées par une mère seule;
  • Des taux d’allocation de logement et de prestation d’aide sociale qui continuent de chuter sous la barre des prix de loyer moyens.

Effets d’un faible revenu

Plusieurs personnes et organisations consultées, notamment l’Alliance pour résoudre la question des sans-abri, ont indiqué que le risque d’itinérance était relié à l’écart croissant entre les prestations d’aide sociale ou les salaires obtenus dans des emplois à salaire minimum et le seuil de la pauvreté. Bon nombre de locataires à faible revenu se retrouvent à vivre dans un logement qu’ils n’ont pas les moyens de payer et à sacrifier d’autres besoins importants, comme la nourriture ou les vêtements. Le CAS of London & Middlesex a donné l’exemple d’un jeune qui a consacré presque toute son allocation mensuelle au paiement de son loyer situé dans un quartier convenable, non fréquenté par les consommateurs et les trafiquants de drogue, ce qui ne lui laisse pratiquement plus rien pour combler ses autres besoins quotidiens.

D’autres locataires se résignent à accepter un logement peu dispendieux, mais qui leur impose de vivre, ainsi que leur famille, dans des conditions de vie inadéquates. Comme l’organisme PACE l’a indiqué, bon nombre de locataires se disent : « prends ce qu’on te donne », même si cela signifie de vivre dans un appartement de sous-sol sombre, humide et froid, une maison de chambres crasseuse ou un logement délabré. Les principales plaintes sur la qualité des logements concernaient les pièces ou les appartements qui nécessitent beaucoup de réparations, qui sont situés dans des quartiers miteux, pollués ou marqués par des taux élevés d’activités criminelles, comme le trafic de la drogue.

La Commission a appris que certains fournisseurs de logements et des administrations publiques responsables omettaient de maintenir des normes d’hygiène de base, comme le chauffage des unités en hiver ou l’installation de fenêtres ou de balustrades de balcon sûres, dans des quartiers occupés par des locataires à faible revenu. Des personnes et des familles à faible revenu ne disposent par conséquent pas du droit à l’égalité en matière d’occupation de leur logement, ce qui va à l’encontre des obligations internationales en matière de droits de la personne (CERA et SRAC).

On a également indiqué à la Commission que certains arbitres de la CLI semblaient prendre les attitudes suivantes à l’égard des locataires de logements modiques :

  • ils estiment que ces personnes ne doivent pas s’attendre à ce que le locateur effectue le même niveau d’entretien et de réparation que si elles payaient leur loyer plus cher;
  • ils dévaluent les dommages causés à la propriété d’un locataire parce que celui-ci est pauvre et ne font pas la même chose pour les dommages à la propriété d’un locateur;
  • ils considèrent que les préoccupations du locateur sont plus importantes que celles des locataires, en particulier des personnes qui n’ont ni le français ni l’anglais comme langue maternelle.

Allocations de logement transférables et autres façons d’augmenter l’accès au logement

Un certain nombre de personnes consultées ont suggéré que soient augmentés les taux de prestations d’aide sociale et de salaire minimum à des niveaux permettant aux familles de vivre dans un logement adéquat, même dans le marché locatif privé. D’autres personnes ont recommandé l’amélioration des mécanismes d’aide aux assistés sociaux afin de les faire passer du statut de dépendant des prestations d’aide sociale à celui de travailleur, ou de réduire les retenues sur les prestations qui leur sont versées.

Elles ont remarqué que, bien que les augmentations de l’allocation de logement aident parfois certaines personnes à se procurer un logement, il est nécessaire d’adopter une approche plus proactive pour répondre aux besoins de toutes les personnes à faible revenu. Il s’est dégagé parmi les fournisseurs de logements et les groupes de locataires un large consensus en faveur d’une option viable visant à permettre aux locataires à faible revenu d’accéder au même titre que les autres au marché locatif. Il s’agirait de verser des allocations de logement transférables directement aux locataires afin qu’ils puissent louer le logement de leur choix[146].

Le MAML a indiqué que les allocations de logement constituent l’un des quatre volets du PAL, avec le logement locatif et le logement avec services de soutien, les accédants à la propriété et le logement dans le Nord. Ces éléments visent à créer des logements abordables dans les marchés locatifs ayant des taux élevés d’inoccupation, et à faire le pont entre le loyer qu’un ménage peut s’offrir et les prix en vigueur sur le marché.

D’autres personnes consultées ont indiqué à la Commission que les allocations de logement transférables visaient les gens dont les besoins sont les plus aigus et évitent les exclusions discriminatoires dont font l’objet les jeunes, les nouveaux arrivants et d’autres personnes associées à un système fondé sur des listes d’attente chronologiques pour obtenir un logement social désigné.

Cette allocation permettrait aux locataires de choisir parmi un plus grand éventail d’unités de logements, d’avoir le même choix, en fait, que celui dont bénéficient ceux qui n’ont pas le « handicap » des difficultés financières. Les locataires sont parfois forcés de tolérer de piètres conditions de vie ou des voisins désagréables uniquement parce qu’ils ne peuvent pas se permettre de perdre leur logement subventionné. Si le supplément au loyer, plutôt qu’être destiné au logement, leur était remis à titre personnel, ils pourraient emménager dans un meilleur endroit sans crainte de perdre l’aspect abordable de leur logement. (Waterloo Region Community Legal Services)

Les associations de fournisseurs de logements comme l’EOLO et la FRPO ont convenu qu’il y a un certain nombre d’avantages à offrir aux ménages à faible revenu une allocation supplémentaire pour faire le pont entre les niveaux de revenu et le prix des loyers sur le marché. Par exemple, les allocations de logement transférables peuvent offrir une aide immédiate aux locataires et aider des personnes à éviter les longues listes d’attente pour du logement social. Elles permettent également aux locataires de choisir où ils vont vivre et favorisent les quartiers caractérisés par une plus grande mixité des revenus. Ces allocations peuvent être directement versées au locataire, qui la remettra au fournisseur du logement, respectant du même coup le droit à la vie privée du locataire et à la gestion autonome de son revenu, et elles peuvent être utilisées dans les régions rurales et les petites villes où les logements subventionnés sont peu nombreux.

(...) Je crois que les allocations de logement seraient un choix avisé, car elles permettent aux locataires à faible revenu d’accéder à un logement dans un édifice occupé par des personnes ayant d’autres types de revenu. Elles ouvrent également aux locataires à faible revenu un choix plus vaste de logements, car ils peuvent dès lors choisir l’endroit où habiter, sans se restreindre à certains quartiers de la ville. (Un locateur ayant entre 50 et 99 logements)

Des fournisseurs de logements ont également indiqué que, si les suppléments au loyer ou les allocations de logement transférables sont discrètement versés aux locataires, ceux-ci évitent les stigmates rattachés au fait de vivre dans un logement social. Enfin, on a indiqué à la Commission qu’il était possible d’administrer ces programmes à peu de frais, comparativement aux coûts de construction de nouveaux logements sociaux, et de concevoir une variété de programmes qui répondraient aux différents besoins, selon les régions et les budgets provinciaux.

5.4. Itinérance et droits humains

Bien que les causes, et les solutions, associées à l’itinérance soient complexes, c’est une question qui relève tout simplement des droits humains. Les personnes associées à des motifs prévus au Code, comme les handicaps (y compris la maladie mentale et la toxicomanie), la race, les motifs reliés à la race (y compris les Autochtones) et l’état familial sont plus susceptibles de connaître l’itinérance que les autres[147]. Par exemple, le CODDL a fait remarquer que la population d’itinérants canadiens compte un nombre dix fois plus élevé d’Autochtones[148]. La branche ontarienne de l’Association canadienne de la santé mentale a indiqué que les personnes ayant une maladie mentale grave courent un plus grand risque de se retrouver dans la rue, soit en général 30 à 35 % de la population itinérante, et qu’une proportion de plus de 75 % des femmes sans abri ont une maladie mentale[149]. La Commission a également appris que les personnes ayant une maladie mentale risquent de rester plus longtemps sans abri.

Des personnes consultées ont insisté sur le fait que le problème des sans-abri n’englobe pas uniquement les personnes qui vivent dans la rue, mais toutes celles qui dépendent du logement temporaire que leur offrent les amis et la famille ou qui dorment dans les refuges. Un nombre croissant d’enfants et de femmes dépendent actuellement des refuges pour répondre temporairement à leurs besoins de logement[150]. La Commission a également appris que les personnes ayant eu affaire avec la justice pénale tendent à demeurer dans des refuges pendant un ou deux mois après leur remise en liberté, même si les séjours en refuge ont été associés à un risque accru de réincarcération (Société John Howard de Toronto).

Des personnes consultées ont discuté de la vaste gamme de facteurs propices à l’itinérance, notamment les politiques et les programmes municipaux, provinciaux et fédéraux, la désinstitutionnalisation et les problèmes de situation. Pour plusieurs, ces facteurs situationnels sont aggravés par l’existence de caractéristiques protégées en vertu du Code, comme la race, le handicap, le sexe, la dépendance à l’égard de l’aide sociale, l’état familial et la pauvreté connexe.

Les familles et les personnes perdent leur logement pour toutes sortes de raisons : une mise à pied, un revenu trop faible pour le prix du loyer ou la nécessité de fuir une situation de violence. Des situations complexes s’ajoutent à ces problèmes, notamment les cas de maladie physique ou mentale ou de toxicomanie. (Alliance pour résoudre la question des sans-abri)

La Société John Howard de Toronto a fait remarquer que la remise en liberté de personnes incarcérées contribue de façon importante au phénomène du sans-abrisme[151]. On a également fait part à la Commission des obstacles au logement que vivent les personnes qui ont été incarcérées et relâchées. Étant donné que la portion qui est destinée à l’allocation de logement dans les prestations des programmes OT et POSPH cesse d’être versée durant l’incarcération de la personne, celle-ci risque davantage de devenir sans-abri à sa libération, surtout depuis que l’on a décidé que les prestations n’étaient pas restaurées avant la mise en liberté.

Quelques personnes et organisations consultées, notamment le BIPEP, ont également soulevé le fait qu’il n’existait pas d’aide à la recherche d’un logement pour les personnes qui sortent d’un hôpital ou d’une prison[152] . Ces personnes sortent de ce milieu et sont souvent sans le sou, ne disposent d’aucune allocation de transport, n’ont pas d’autres vêtements que la combinaison qu’ils portaient en dedans, ni de pièces d’identité ou d’accès à des services qui les aideraient à réintégrer la société. Il est peu probable que les personnes dans cette situation puissent obtenir un logement sur le marché locatif, ce qui signifie qu’elles vont devoir vivre dans la rue, dans des refuges ou chez des amis (lorsque c’est possible) durant leur processus de réintégration de la société. Pour certains d’entre eux, le stress que cette situation engendre les amène à récidiver (Société John Howard de Toronto).

Le CERA et le SRAC estiment qu’au Canada, l’itinérance et les atteintes au droit au logement résultent des réductions des prestations d’aide sociale et d’aide au logement social, ainsi que de l’absence de mesures appropriées pour s’attaquer au problème de l’itinérance, qui porte atteinte aux droits humains. Outre le CESCR, d’autres organismes internationaux en matière des droits de la personne se sont montrés préoccupés par l’itinérance, qui constitue une violation des droits fondamentaux[153].

La Commission a également appris que la discrimination généralisée dont les sans-abri font l’objet les empêche d’accéder à un logement abordable, même lorsqu’il y en a de disponibles.

On refuse les sans-abri simplement parce qu’ils n’ont pas de chez soi (....). En ne voulant pas louer de logement à des personnes qui vivent dans un refuge, les locateurs les condamnent à rester plus longtemps des sans-abri (...). Lorsque les familles et les personnes se retrouvent dans la rue, la discrimination dont elles font l’objet augmente exponentiellement dans les secteurs du logement et de l’emploi, et exerce une pression considérable sur la liste d’attente pour un logement social. (Housing Help Centre)

Stratégies et solutions pour lutter contre l’itinérance

Le risque de décès chez les sans-abri est plus élevé que dans la population générale en raison de leur exposition à une combinaison de facteurs : problèmes de santé, pauvreté et, parfois, accès inadéquat aux soins de santé[154]. Même pour les personnes qui arrivent à survivre dans cette situation, il est important d’être en mesure d’accomplir les activités essentielles de la vie quotidienne. Un locataire a affirmé qu’il était impossible pour un sans-abri de se trouver un emploi.

De l’avis de certains organismes, comme la Rupert Coalition, le fait de vivre dans un endroit sûr est essentiel à la stabilité des personnes itinérantes et à leur rétablissement suite à une maladie mentale et aux problèmes de toxicomanie si fréquents au sein de cette population[155]. En outre, des recherches ont démontré que le fait d’être sans abri augmente la durée et la gravité d’une maladie mentale[156].

Vu la gravité des conséquences liées à l’itinérance, il est essentiel d’agir sans tarder pour éliminer et prévenir ce problème urgent qui relève des droits de la personne. La Commission est d’avis qu’il existe plusieurs moyens de s’attaquer à cette difficile situation. Toutefois, il faut d’abord démontrer une volonté de donner suite aux nombreux rapports qui ont été rédigés à ce sujet, accepter qu’il existe une panoplie de violations systémiques des droits de la personne, lesquelles constituent des facteurs favorisant l’itinérance, et s’engager à répondre directement aux critiques formulées au niveau international en ce qui concerne l’itinérance dans cette province et ce pays. Certaines idées soulevées à ce sujet sont présentées dans les paragraphes suivants.

Le CERA et le SRAC ont proposé de mettre en œuvre une stratégie sur les droits de la personne visant à aborder le problème de l’itinérance en tant qu’atteinte au droit à l’égalité en vertu du Code. La stratégie que ces organismes ont décrite s’attaquerait à « l’intersection de l’égalité à l’emploi et au logement ainsi qu’aux obstacles de plus en plus nombreux auxquels sont confrontés les groupes défavorisés qui cherchent à obtenir un revenu adéquat et stable, essentiel pour conserver et entretenir un logement adéquat. » Cette approche repose avant tout sur des principes clés, comme la reconnaissance que le logement adéquat constitue un droit humain fondamental, la nécessité d’adopter des mesures positives afin d’assurer aux groupes protégés par le Code un accès égal au logement et le droit à des recours efficaces.

Des entités consultées, comme la Rupert Coalition, ont fait valoir que les efforts visant à augmenter la disponibilité des maisons de chambre peuvent avoir des incidences sur les taux d’itinérance étant donné que ce type d’hébergement constitue une source importante de logement abordable pour les locataires à faible revenu[157]. De telles mesures devraient tenir compte du cadre de réglementation en vigueur[158]. La section 5.2, « Logement convenable et abordable », traite également de la question.

L’ATTSO a indiqué qu’il était impératif de prendre des mesures concrètes pour contrer les « mécanismes anti-logement » en vigueur dans la société. Ainsi, il faudrait établir un plan d’action ayant pour cibles l’élimination et la prévention de l’itinérance. Pour mettre en place de telles actions, il faudra d’abord tenir compte des exigences et des critiques internationales. Par exemple, le CESCR a accueilli favorablement l’Initiative nationale pour les sans-abri et l’adoption d’autres mesures sur le logement, mais a été déçu de voir que les renseignements fournis n’étaient pas suffisants pour évaluer les résultats de ces mesures. En particulier, il a été inquiet de constater que le nombre estimatif de personnes sans abri au Canada varie toujours entre 100 000 et 250 000[159]. On a également recommandé de porter particulièrement attention aux difficultés auxquelles font face les jeunes filles sans abri[160].

On a fait valoir à la Commission qu’il était nécessaire d’adopter une approche multiple, qui favoriserait la hausse des niveaux de revenu, des services et de la qualité des logements. Une personne consultée a fait référence à une étude qui montrait les effets positifs de ces mesures sur le logement au sein de la collectivité faisant l’objet de l’étude :

Un rapport rédigé par un groupe d’experts et portant sur une étude de la population itinérante d’Ottawa au cours d’une période de deux ans a indiqué que des facteurs tels qu’un revenu plus élevé, l’accès au logement subventionné, l’aide d’organismes et de travailleurs communautaires, le soutien des colocataires, un ensemble permanent et approprié de services complémentaires et de soutien les ont aidés à se trouver un toit. Le fait de vivre dans un logement de meilleure qualité du point de vue du confort, de l’intimité et de l’espace a été associé à de plus hauts niveaux de santé mentale. (Alliance pour résoudre la question des sans-abri)

5.5. Mouvement discriminatoire « pas dans ma cour » et logement abordable

Un certain nombre de personnes consultées ont établi un lien entre l’opposition « pas dans ma cour » et les attitudes du genre « je ne veux pas de ces gens dans mon quartier » ou « on a déjà fait notre part » concernant un certain type de logement abordable. La Commission a déjà indiqué que les personnes et les groupes visés par le Code ne devraient pas avoir à demander à de futurs voisins la permission d’emménager[161]. Il est tout à fait légitime que des questions concernant les projets de logements abordables se posent durant le processus de planification, mais les prémisses stéréotypées concernant les personnes qui habiteront ces logements sont autre chose. Tenter de rejeter des personnes handicapées, dont celles qui ont une maladie mentale, n’est pas moins choquant que d’empêcher des personnes racialisées de s’installer dans un quartier.

On a indiqué à la Commission que le mouvement discriminatoire « pas dans ma cour » retardait le développement du logement abordable, en augmentait les coûts et contribuait à ce que de précieux fonds publics soient utilisés pour interjeter appel auprès de la Commission des affaires municipales de l’Ontario au lieu de servir à la création de logements abordables et avec services de soutien. Cette situation peut amener les fournisseurs de logements à sentir le besoin de faire des compromis pour obtenir l’établissement de nouveaux logements abordables, même si ces compromis nuisent à la dignité ou au bien être des résidents. La Commission a également appris que l’opposition « pas dans ma cour » peut dissuader certains fournisseurs de logements de créer des logements abordables. Il arrive que des personnes protégées par le Code soient exposées au harcèlement durant le processus de planification et, au moment d’emménager dans leur nouveau quartier, aient l’impression de ne pas y être bienvenues. Certaines personnes consultées ont parlé des effets de l’opposition à l’échelle des politiciens ainsi que des tactiques visant à retarder les projets, qu’on appelle parfois l’attitude « pas durant mon mandat ».

L’opposition « pas dans ma cour » aux projets de logement abordables est susceptible de violer le Code lorsqu’elle entraîne des changements dans les processus de planification existants, suscite des obstacles à l’accès au logement ou expose les résidents proposés à des commentaires ou à des comportements discriminatoires. Par exemple, la municipalité qui exige des réunions publiques supplémentaires ou des modifications au processus de planification sous le seul prétexte que les résidents visés par un éventuel projet de logements sont des personnes toxicomanes, jeunes ou âgées, des familles monoparentales, des prestataires d’aide sociale ou des personnes handicapées ou ayant une maladie mentale, pourrait faire l’objet d’une plainte pour discrimination. Lorsque des politiques ou des pratiques visent, ou touchent de manière disproportionnée, des populations protégées par le Code, elles peuvent être considérées comme des violations au Code. On a résumé ci dessous les formes les plus fréquentes d’opposition « pas dans ma cour » et leurs effets sur les droits humains, tel que l’on décrit les personnes consultées.

Définitions de zonage utilisées pour interdire ou restreindre l’accès de ces zones à certaines personnes protégées par le Code

Les définitions de zonage permettent d’inclure certains endroits dans un secteur particulier, ou de les y exclure, selon leurs caractéristiques physiques et leur fonction. Un très grand nombre de personnes consultées se sont montrées préoccupées de l’utilisation des définitions de zonage pour empêcher certains groupes protégés par le Code de vivre dans des endroits particuliers. Par exemple, on a soulevé le fait que de telles définitions pouvaient être utilisées pour réduire le nombre d’endroits pouvant accueillir des logements avec services de soutien et destinés à un groupe protégé ou encore pour imposer des exigences supplémentaires ou un processus d’approbation plus long (HomeComing Community Coalition). On a établi une distinction entre ce type de définitions de zonage et les définitions stipulées dans les règlements municipaux, lesquelles sont liées à des avantages, comme les approbations accélérées visant le logement avec services de soutien. Le MAML a indiqué qu’un règlement de zonage est invalide s’il a pour objet de réglementer l’utilisateur, plutôt que l’utilisation du terrain, ou de déterminer l’utilisation du terrain selon des caractéristiques relatives à des personnes.

Règlements qui limitent ou interdisent certains ensembles résidentiels abordables

On s’inquiète du fait que des règlements visent à interdire certains types d’ensembles résidentiels tout en en permettant d’autres. Par exemple, on a indiqué à la Commission que des règlements et des politiques de zonage de certaines municipalités de la province interdisent les maisons de chambres dans des quartiers particuliers. Des personnes et des organisations consultées, comme Project Connect, ont fait valoir à la Commission qu’en raison de telles mesures et de ces types de règlements de zonage, on refuse aux personnes qui dépendent de ce type de logement, et qui peuvent être protégées dans le cadre du Code, un endroit où vivre dans la collectivité de leur choix. Ces personnes devront peut-être accepter un logement ne convenant pas à leurs besoins, soit parce qu’il ne répond pas aux normes ou parce qu’il est situé loin des services, des membres de leur famille ou de leur réseau social (Rupert Coalition).

Des personnes consultées estiment qu’un règlement qui interdit tous les ensembles résidentiels dans un secteur particulier serait acceptable s’il ne comportait pas d’effets discriminatoires. Par contre, le règlement qui ne permet pas l’établissement de maisons de chambres, de foyers de groupe ou d’ensembles de logements subventionnés et destinés à des personnes protégées en vertu du Code, mais qui permet un ensemble résidentiel de taille semblable, serait discriminatoire. Par exemple, certaines municipalités interdisent la construction de tout nouveau logement social, foyer de groupe, refuge, foyer ou maison de chambres dans un quartier donné. Cette mesure touche les personnes handicapées et les bénéficiaires de l’aide sociale. D’autres municipalités font la distinction entre logement pour survivants psychiatriques vivant dans la collectivité et pour personnes ayant été hospitalisées dans un hôpital psychiatrique provincial de la région (Certaines personnes consultées).

Exigences en matière de distance et moratoires sur l’établissement de logements

Il existe un certain nombre de municipalités en Ontario qui exigent des distances minimales de séparation avec les foyers de groupe et d’autres types de logement pour personnes handicapées. Le MAML a indiqué que ces règlements relatifs aux distances minimales de séparation doivent être fondés sur une planification rationnelle, et adoptés de bonne foi et dans l’intérêt public.

La Commission a appris que les exigences en matière de distance, les plafonds et les quotas restreignent ou limitent les endroits où la construction de logements pour personnes handicapées ou prestataires d’aide sociale est possible, et peuvent donc avoir des effets discriminatoires. Des personnes consultées ont mentionné à la Commission les types de limites qui sont mentionnées dans les règlements de certaines municipalités de la province :

  • nombre maximal de locataires dans les foyers de groupe ou de soins spéciaux;
  • nombre maximal de foyers de groupe dans une zone résidentielle;
  • nombre maximal de foyers de groupe selon le nombre de personnes d’une population totale, par quartier, par lot ou par municipalité.

Étant donné que ces exigences limitent le nombre de sites où il est possible d’établir des foyers de groupe, les fournisseurs de logements peuvent se voir obligés de refuser des projets de logements qui, autrement, auraient été tout à fait appropriés. Par exemple, on a mentionné à la Commission l’histoire du couple qui voulait faire don de sa maison à un organisme qui offre du logement et du soutien à des personnes ayant une déficience intellectuelle, mais l’organisme en question a dû laisser passer cette occasion de créer de nouveaux logements avec services de soutien puisqu’il y avait déjà un autre foyer de groupe dans le quartier. On a expliqué à la Commission que les exigences en matière de distance présentent un obstacle au logement pour les personnes handicapées, même si les résidents du quartier sont en faveur du projet.

La Commission a appris que le moratoire sur les aménagements ou les règlements qui visent à stopper temporairement l’aménagement d’un terrain pendant un maximum de deux années consécutives limitent les possibilités de construire des logements abordables ou avec services de soutien. Des personnes consultées ont indiqué que ces pratiques ont le même effet que les exigences en matière de distance dans la mesure où elles limitent la création de logements qui s’adressent avant tout à des groupes ou à des personnes protégés. Le MAML a indiqué que les municipalités disposant des pouvoirs pour rédiger de tels règlements exercent généralement ce droit dans une situation où se présentent des problèmes d’aménagement imprévus aux termes d’une permission relativement au zonage, et que quiconque reçoit un avis concernant ce type de règlement peut interjeter appel auprès de la CAMO.

Consultation publique non exigée par la Loi sur l’aménagement du territoire

Dans une lettre envoyée au rédacteur du Toronto Star le 14 novembre 2007, la commissaire en chef a fait remarquer : « Il est tout à fait légitime que des questions concernant l’aménagement du territoire se posent durant le processus de planification.. Toutefois, des réunions qui autorisent les gens à décider qui doit vivre dans leur quartier sont autre chose. »[162] La Commission a d’ailleurs entendu beaucoup de choses sur cet autre type de réunion au cours de la consultation.

Le MAML a indiqué que la Loi sur l’aménagement du territoire a comme principe fondamental de donner à la population l’occasion de présenter son point de vue au cours d’une réunion publique portant sur certaines questions liées à l’aménagement du territoire. On veut par le fait même respecter la « philosophie basée sur l’ouverture et la transparence du système de planification ». Toutefois, la Commission a appris que des promoteurs de logements abordables et avec services de soutien peuvent être tenus de participer à des consultations publiques longues et coûteuses, qui ne sont prévues ni dans la Loi sur l’aménagement du territoire ni dans aucun règlement municipal.

On a indiqué à la Commission que, dans certains cas, ces réunions étaient convoquées par des conseillers municipaux, des fonctionnaires municipaux ou même des comités de dérogation lorsqu’un projet de logements semblait « controversé », même si le seul élément prêtant à la controverse portait sur les caractéristiques des personnes qui habiteraient ces logements. Certaines personnes consultées doutaient que ces réunions extraordinaires aident les gens à surmonter leurs craintes et les stéréotypes erronés, mais ont plutôt remarqué qu’elles pouvaient faire croire aux résidents qu’ils avaient le pouvoir d’empêcher ou de retarder la venue de personnes non désirées dans leur quartier (HomeComing Community Coalition).

Les personnes ont également parlé contre le fait d’obliger la diffusion d’avis publics ou la tenue de réunions de consultation dans le cas de projets de développement « de plein droit », destinés à des groupes protégés (c. à d. ceux pour lesquels aucun changement de zonage n’est exigé). Ces exigences constituent un triple sujet de préoccupation : on craint, premièrement, que le projet soit mis à part pour y ajouter des conditions supplémentaires sous prétexte qu’il est destiné à des personnes vulnérables et pouvant être protégées en vertu du Code, deuxièmement, qu’on ajoute des obstacles supplémentaires à la création de logements abordables et, troisièmement, que les personnes protégées par le Code soient exposées à des remarques et à des comportements discriminatoires au cours de ces réunions. Comme l’a fait remarquer l’organisme Project Connect :

Parfois, lorsque la ville invite la collectivité à une consultation concernant le logement abordable à Toronto, cela devient l’occasion tout indiquée pour les gens d’exprimer leur point de vue qui est, tout simplement, discriminatoire. De plus, bien qu’ils prétendent parler de valeur des propriétés et de sécurité (on a déclaré, au sujet du permis d’une maison de chambre : « je ne veux pas voir ces pédophiles autour de mes enfants »), les gens s’opposent généralement à tout type de logement pour personnes à faible revenu. De plus, il n’est pas rare d’entendre la réflexion suivante : « Je suis en faveur du projet, mais pas ici. » Puisque ce type de processus risque de susciter des points de vue discriminatoires dans le public, ce genre de consultation doit être mené de façon différente. Le processus d’approbation en vigueur peut s’avérer long et pénible (et, par conséquent, plus coûteux pour le fournisseur de logements).

Les personnes protégées en vertu du Code, et celles qui défendent le droit au logement en leur nom, sont souvent l’objet de commentaires inappropriés et d’insultes. Ces situations se produisent au cours de réunions dirigées par des conseillers ou des fonctionnaires municipaux, dans des sites Web, des brochures, des affiches ou des dépliants. On s’attend à ce que les municipalités et les élus évitent les atmosphères néfastes et contraires au Code durant leurs réunions. Toutefois, on s’inquiète de voir que certains conseillers municipaux utilisent parfois le même langage discriminatoire que leurs électeurs et revendiquent la liberté d’expression pour émettre leurs commentaires discriminatoires.

On prétend, pour autoriser une telle attitude, qu’elle s’appuie sur la liberté d’expression et la communication des véritables sentiments de la collectivité. Par exemple, à une réunion du conseil de la Ville de Toronto, plusieurs conseillers ont voté contre une recommandation du Service de planification voulant que soient appliqués les principes associés aux droits de la personne et à l’équité lors des réunions publiques sous prétexte qu’ils ne voulaient pas museler leurs électeurs. (HomeComing Community Coalition)

Durant tout le processus de consultation, la Commission a entendu parler de cas d’atteinte à la dignité durant des rencontres communautaires où l’on a, par exemple, entendu les commentaires et observé les comportements suivants :

  • des centaines de résidents qui s’opposaient avec vigueur à ce que des personnes ayant une maladie mentale emménagent dans leur quartier;
  • des personnes ayant une maladie mentale qui étaient traitées de violeurs, de meurtriers, de pédophiles et de terroristes;
  • des représentants d’organismes communautaires ou de fournisseurs de logements, eux-mêmes éventuellement protégés en vertu du Code en raison d’une maladie mentale ou pour un autre motif, qu’on ignore ou qui font l’objet de commentaires offensants;
  • de jeunes mères seules qui se font dire de « se trouver un mari ».

Compromis ou exigences en matière de conception et contrats octroyés à la collectivité

Plusieurs personnes et organisations consultées, y compris la division de l’Ontario de l’ACSM, ont reconnu que les compromis sur le plan de la conception font partie des projets de construction de logements. Toutefois, on a indiqué que les droits humains risquent d’être bafoués si les opposants et les résidents du quartier demandent des compromis fondés sur les préjugés ou les craintes concernant les personnes qui emménageront dans les logements.

Parfois, ces exigences font partie d’un règlement municipal ou bien un conseil, un comité du conseil ou un comité de dérogation en fait la demande à titre de condition pour obtenir les approbations de planification ou de financement ou comme condition de l’appui au projet d’un conseiller. Ces compromis et ces exigences peuvent contrevenir au Code dans les cas où ils stigmatisent les locataires protégés dans le cadre du Code ou ils portent atteinte à leur dignité et empêchent leur intégration naturelle dans la collectivité.

Par exemple, la Commission a appris qu’on avait fait à des fournisseurs de logements abordables et avec services de soutien les demandes suivantes :

  • veiller à ce que les fenêtres ne puissent pas être ouvertes par les locataires;
  • givrer toutes les fenêtres pour empêcher les locataires de voir leurs voisins;
  • enlever les balcons qui pourraient permettre aux locataires d’avoir vue sur leurs voisins;
  • ajouter une protection visuelle autour des foyers de groupe;
  • élever des murs séparant les logements abordables des maisons du quartier;
  • barrer ou supprimer, dans une rangée de maisons abordables, l’espace permettant aux locataires d’accéder à leur voiture;
  • fermer les entrées du secteur réservé aux logements abordables avec des portes de fer le soir afin d’empêcher les locataires de sortir;
  • ajouter des portes, des murs, des barrières, des détours et d’autres obstacles pour empêcher les groupes protégés d’accéder naturellement aux voies qui conduisent à leur résidence.

La Commission a également appris que certaines municipalités exigent ou recommandent que les fournisseurs de logements signent des contrats avec leurs voisins pour pouvoir occuper un immeuble. On a indiqué que les fournisseurs de logements se sentaient obligés de signer ces documents, afin de prouver leur bonne volonté pour obtenir le soutien des conseillers locaux, bien que ces papiers aient pour effet de porter atteinte à la dignité et au droit à la vie privée des groupes protégés. Les contrats ou les exigences qui imposent des obligations supplémentaires relativement au logement de groupes protégés peuvent être discriminatoires et pourraient donner lieu à divers problèmes liés aux droits de la personne.

Par exemple, les gestionnaires d’un refuge pour itinérants ont accepté de communiquer chaque année le revenu de tous leurs résidents à leurs voisins du secteur Est de Toronto. Lesdits voisins ont indiqué que cette « mesure » visait à s’assurer qu’aucun résident ne recevait une subvention à laquelle il n’avait pas droit. (HomeComing Community Coalition)

Responsabilité partagée en matière de prévention et d’élimination du syndrome « pas dans ma cour »

On a prétendu qu’il y avait deux poids, deux mesures lorsqu’il s’agissait du mouvement discriminatoire « pas dans ma cour », car les personnes qui clament « nous ne voulons pas de "ces gens" dans notre quartier », « nos propriétés vont perdre de la valeur à cause d’eux » ou « nous ne voulons pas de ces personnes sans supervision autour de nos enfants » ne considèrent pas avoir une attitude préjudiciable ou discriminatoire. Il semble que les effets de ces commentaires sur les droits humains, lorsqu’ils sont formulés, par exemple, dans une réunion publique, dans une lettre aux conseillers municipaux ou sur un site Web d’un groupe communautaire, ne soient pas souvent reconnus ni contestés, même par les personnes qui, autrement, se considéreraient comme des citoyens ou des leaders tolérants et respectueux.

Bon nombre de personnes consultées ont déterminé qu’il était nécessaire de sensibiliser davantage le public aux effets du syndrome « pas dans ma cour » sur les droits humains. Pour aider les gens à distinguer les déclarations discriminatoires, la HomeComing Community Coalition a mis au point un test spécial, le « cringe test »[163], qui permet aux personnes, notamment aux conseillers municipaux et aux membres de la collectivité, d’évaluer si les déclarations qu’elles font ou entendent concernant d’autres motifs prévus au Code, comme l’origine ethnique, sont appropriées.

Certaines personnes consultées ont insisté sur la nécessité d’établir un « zonage inclusif » dans lequel les promoteurs de logements privés et à but lucratif seraient tenus de construire du logement abordable pour rendre à la collectivité les avantages dont ils ont bénéficié. De nombreuses personnes ont indiqué que le MAML devait prendre des mesures concertées pour guider les municipalités, en particulier à l’égard de l’élaboration des règlements qui limiteraient les options de logement abordable pour les groupes et les personnes protégés par le Code. La FRPO a suggéré que soit élaborée une solide déclaration de principes provinciale et qu’on ait recours à une intervention énergique auprès de la CAMO lorsque des municipalités s’opposent à des demandes d’aménagement.

Un certain nombre de personnes consultées ont parlé du rôle que jouent les politiciens municipaux et les conseillers à l’égard de l’opposition « pas dans ma cour ». Il leur arrive de favoriser ou d’appuyer cette tendance ou de prendre fermement position contre cette attitude, qui relève des droits humains. Par exemple, la division de l’Ontario de l’ACSM a déclaré :

[L]es ensembles de logements sociaux sont victimes du manque de soutien politique et de l’ingérence politique qui alimente davantage la discrimination. Par exemple, certains conseillers de quartiers se sentent souvent obligés de s’opposer à des projets qui, selon eux, ne sont pas bien accueillis par leurs électeurs. Ainsi, des projets sont souvent rejetés à l’étape de l’autorisation et l’attitude « pas dans ma cour », qui constitue un acte discriminatoire, est alors renforcée.

On a félicité la Commission des affaires municipales de l’Ontario (CAMO) pour avoir refusé systématiquement d’accepter les arguments fondés sur la discrimination plutôt que sur des considérations relatives à la planification et pour ne pas avoir donné suite à ces appels. Malgré le mécanisme dont elle dispose pour rejeter les affaires futiles ou vexatoires, on croit que la CAMO hésite à utiliser ce pouvoir discrétionnaire s’il y a la moindre chance que l’appel soit bien fondé. La Commission a également appris que les coûts engagés pour contester un appel peuvent être assez importants pour forcer certains fournisseurs de logements à abandonner leur projet, après y avoir consacré temps, efforts et argent. Par exemple, un appel déposé auprès de la CAMO relativement à des appartements destinés à des personnes ayant une maladie mentale a coûté à un fournisseur de logements plus de 300 000 $ et près de 9 000 $ par mois pour les retards de construction. Certaines personnes consultées ont donc estimé que la CAMO pouvait jouer un rôle important en rejetant les appels de nature discriminatoire le plus tôt possible, et ce, avant que l’expert organise sa préparation en vue de l’audience.

En outre, des personnes ont préconisé l’élaboration d’une législation provinciale fondée sur la loi américaine Fair Housing Act[164] à titre d’élément clé de toute stratégie visant à éliminer la discrimination résultant des méthodes de gestion immobilière. L’organisme Good Shepherd a proposé d’intégrer dans une telle loi les éléments suivants :

  • Une exigence à l’effet que les municipalités disposent d’une « déclaration relative au logement abordable » qui comprend des mesures visant à éliminer la discrimination;
  • Des récompenses, comme l’attribution de logements supplémentaires aux collectivités qui s’engagent à fournir du logement abordable, et la possibilité que les municipalités offrent d’autres mesures incitatives;
  • Des mesures visant à rendre les effets de l’opposition « pas dans ma cour » moins pénibles et coûteux, notamment autoriser la CAMO à rejeter les appels qui ne reposent pas sur des arguments de fond concernant la planification.

[91] Document de référence, supra note 51, p. à 22.
[92] Mémoire de la Commission ontarienne des droits de la personne au sujet des dispositions du Code du bâtiment de l’Ontario concernant l’aménagement pour accès facile, mars 2002. Accessible sur Internet : www.ohrc.on.ca/fr/resources/submissions/BuildingCodeSubmissionFREN/pdf.
[93] Dans Quesnel c. London Educational Health Centre (1995), 28 C.H.R.R. D/474, une commission d’enquête de l’Ontario a déclaré ce qui suit : « Eu égard à l’allégation personnelle de l’intimé qu’il a satisfait aux codes du bâtiment locaux, qu’il suffise de noter que le paragraphe 47 (2) établit la primauté du Code sur toute autre loi ou tout autre règlement autorisant une conduite qui constitue une infraction aux droits établis à la Partie I. La conformité aux codes du bâtiment ne suffit pas à justifier une infraction aux textes de loi sur les droits de la personne. »
[94] Voir aussi le document de la Commission ontarienne des droits de la personne, « Proposition de norme initiale d’accessibilité pour le transport : un recul pour les personnes handicapées de l’Ontario », 30 août 2007, et Soumission de la Commission ontarienne des droits de la personne au Comité d’élaboration des normes d’accessibilité pour le transport au sujet de la Proposition de norme initiale d’accessibilité pour le transport, août 2007. Accessible sur Internet : www.ohrc.on.ca/fr/resources/submissions/transportsub/pdf
[95] Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario, Règlement 2005, chap. 11.
[96] Voir, par exemple, Eldridge c. la Colombie-Britannique (procureur général), 1997, 3 S.C.R. 624.
[97] KOTHARI, Miloon. « Statement of the Special Rapporteur on adequate housing as a component of the right to an adequate standard of living, and on the right to non-discrimination in this context », rapport présenté à la 7e session du Conseil des droits de l’homme, 12 mars 2008, p. 2.
[98] SMITH, Joanna. « UN special envoy to shine spotlight on housing in Toronto », The Toronto Star, 18 octobre 2007.
[99] KOTHARI, Preliminary Observations, supra note 11, p. 4.
[100] KOTHARI, supra note 97.
[101] Le libellé actuel du projet de loi indique que le gouvernement de l’Ontario s’engage à faire ce qui suit, dans la mesure de ce qu’il estime raisonnable et indiqué : veiller à ce qu’un logement convenable soit accessible aux personnes qui y ont droit; offrir une protection contre les violations du droit à un logement convenable, notamment les expulsions forcées; fournir des subsides en matière de logement aux personnes qui ne peuvent obtenir un logement convenable qui soit abordable; prendre les mesures qu’il juge appropriées pour reconnaître, promouvoir et protéger le droit à un logement convenable.
[102] Déclaration de principes provinciale (2005) produite par le ministère des Affaires municipales et du Logement (MAML). Le MAML a indiqué que l’énoncé de politique ayant été modifié en 2005 à la suite des réformes de l’aménagement, il permet et facilite « toutes les formes de densification et de réaménagement résidentiels, ainsi que toutes les formes de logement nécessaires pour répondre aux besoins sur le plan social et en matière de santé et de bien-être, y compris aux besoins en matière de logements adaptés, des résidents actuels et futurs ». Par logement adapté, on entend « tout logement qui sert à des personnes ayant des besoins particuliers qui ne se limitent pas à des besoins de nature économique, p. ex., les logements pour les personnes ayant un handicap physique, sensoriel ou mental et les logements pour personnes âgées ».
[103] VOLK, Nick. « Canadian Government’s response to Miloon Kothari – Special Rapporteur on Adequate Housing presentation in Canada », 16 mars 2008. Accessible sur Internet : www.hic-net.org./
[104] KOTHARI, supra note 97, p. 2.
[105] Au 25 avril 2008, des progrès avaient été accomplis sur 704 projets de logements abordables, lesquels représentent un total de 11 191 unités abordables. Des 9 327 logements locatifs et avec services de soutien, 3 752 unités sont occupées, 2 324 sont en cours de construction et 3 251 sont en attente des approbations nécessaires. Des 998 logements de propriétaires-occupants, 781 unités sont occupées, 53 sont en cours de construction et 164 sont en attente des approbations nécessaires. Des 866 logements du volet logement dans le Nord, 501 unités sont occupées, 33 sont en cours de construction ou de réparation et 332 sont à la phase de la sélection des clients. Gouvernement de l’Ontario, « Logement abordable ». Accessible sur Internet : www.mah.gov.on.ca/page2232.aspx.
[106] Le MAML a indiqué que le Programme de supplément au loyer pour l’épanouissement communautaire est un élément important de la stratégie globale provinciale en matière de logement et qu’il fournit de l’aide LPR, par l’intermédiaire des gestionnaires de services, aux ménages qui ont besoin d’un logement avec ou sans services de soutien. Selon le MAML, l’enquête la plus récente menée auprès des gestionnaires de services à l’automne de 2006 a indiqué que 6 610 ménages recevaient de l’aide en vertu du Programme de supplément au loyer, parmi lesquels 1 322 vivaient dans un logement avec services de soutien et 5 288, dans un logement sans services. On a également indiqué que la responsabilité du Programme de supplément au loyer est partagée entre la province et les gestionnaires de services municipaux. La province veille au maintien des lignes directrices en vue de l’administration du programme et fournit du financement et le soutien aux organismes offrant les services de soutien, tandis que les gestionnaires de services municipaux exécutent le programme conformément au protocole d’entente et aux grandes lignes du programme. Des locateurs participent à des accords de supplément au loyer avec des gestionnaires de services municipaux afin d’être en mesure d’offrir des logements locatifs à des ménages admissibles.
[107] Le MAML a indiqué que le financement accordé dans le cadre de ce programme s’élève à 18,8 millions de dollars et que les gestionnaires de services ont l’obligation, en vertu de règles provinciales, d’évaluer les demandes des locataires sur une base individuelle en tenant compte de leurs besoins et des « possibilités de logement à long terme ». À l’époque où le MAML a présenté son mémoire, on évaluait ce programme afin de déterminer les changements qui pourraient éventuellement y être apportés. Depuis ce temps, le gouvernement de l’Ontario a annoncé un investissement de 5 millions de dollars en banques d’aide au loyer afin d’aider davantage de familles à conserver leur logement. Les locataires peuvent demander une aide financière auprès d’une banque d’aide au loyer, mais pas plus d’une fois en deux ans, et l’aide reçue peut correspondre à deux mois de loyer. Si la demande est approuvée, le loyer impayé est versé directement au locateur, au nom du locataire. Voir le communiqué de presse du gouvernement de l’Ontario, « Les familles dans le besoin obtiennent de l’aide pour payer leur loyer : le gouvernement McGuinty annonce du financement pour les banques d’aide au loyer », 15 mai 2008.
[108] Par exemple, le SMHN s’en remet aux coopératives d’habitation fédérales, aux logements avec services de soutien administrés par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée et par le ministère des Services sociaux et communautaires, aux programmes d’allocation de logement, aux programmes de supplément au loyer et aux nouveaux programmes de logement abordable.
[109] Voir aussi Dartmouth/Halifax County Regional Housing Authority c. Sparks, 1993, 101 D.L.R. (4e) 224 (N.S.C.A.), p. 234 : « De façon générale, les personnes qui sont admissibles à un logement social font partie du groupe social défavorisé sur le plan économique, et elles sont ainsi défavorisées en raison de leur âge et de la baisse correspondante de leur revenu (personnes âgées), ou ce sont des familles à faible revenu dont une majorité est désavantagée parce qu’elle est constituée de mères célibataires qui vivent de l’aide sociale et dont beaucoup sont [N]oires. Le groupe de locataires des logements sociaux est, dans son ensemble, défavorisé historiquement parlant par suite des effets combinés de plusieurs des caractéristiques personnelles énumérées au par. 15(1). »
[110] En 2006, on a recommandé au gouvernement de prévoir un nombre suffisant de logements communautaires convenables afin que les personnes ayant une déficience mentale ne soient pas contraintes de vivre en institution sans raison médicale. Observations finales du Comité des droits de l’homme, supra note 17.
[111] STAPLETON, John. Rapport publié par la Fondation Metcalf, intitulé Why is it so tough to get ahead: How our tangled social programs pathologize the transition to self-reliance, 2007, p. 29.
[112] Ibid., p. 19.
[113] Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 28.
[114] Association du logement sans but lucratif de l’Ontario. Report on the Waiting List Statistics for Ontario, août 2007. Accessible sur Internet : www.onpha.on.ca/english/doc/wait_list.pdf.
[115] Loi sur les sociétés coopératives, L.R.O. 1990, chap. C 35.
[116] LLUH, supra note 29, article 113.
[117] À l’appui de cet argument, l’EOLO et la FRPO ont cité des éléments provenant d’une recherche approfondie, notamment une étude effectuée par des lauréats du prix Nobel, sur le contrôle des loyers.
[118] Voir, par exemple, GOLDEN, Anne. The Report of the Mayor’s Homelessness Action Task Force: Taking Responsibility for Homelessness (Golden Report), 1999, p. 262.
[119] Ibid., p. 265. Voir aussi le site Web du CODDL, section « Faits rapides : Le logement locatif en Ontario », dans lequel on indique que « [l]e marché locatif secondaire ou non conventionnel a été tour à tour évalué à 589 861 unités, soit 41,3 % de l’ensemble de l’univers locatif, et 894 000 unités, soit 50 % de l’ensemble des ménages locataires. » Accessible sur Internet : www.acto.ca/french/acto_content.php?topic=32&sub=185.
[120] Le projet de loi 120, la Loi de 1994 sur les droits des résidents, a remplacé les règlements de zonage municipaux et permis l’aménagement de logements supplémentaires dans des résidences, y compris des appartements de sous-sol, à la condition de respecter les normes en matière de santé et de prévention des incendies. Ce projet de loi prévoyait un processus simplifié de l’application des normes régissant le zonage municipal et la propriété. Cette loi était accompagnée du Règl. de l’Ont. 285/94, lequel établissait les normes de sécurité obligatoires pour ces types d’unité. Le projet de loi 20, la Loi sur la protection et l’aménagement du territoire, qui a été présenté en 1995 abrogeait la plupart des dispositions relatives aux logements supplémentaires stipulées dans la Loi sur les droits des résidents et réaffirmait l’autorité des municipalités à décider d’interdire les appartements de sous-sol. Cette loi a été remplacée par la Loi sur l’aménagement du territoire, L.R.O. 1990, chap. P.13, qui n’aborde pas la question autre que pour indiquer qu’il n’y a aucun appel à la Commission des affaires municipales de l’Ontario concernant les politiques sur les logements supplémentaires ou les règlements relatifs aux appartements accessoires dans une habitation individuelle, une maison jumelée ou une maison en rangée (paragraphe 19(1)). Voir aussi le Règl. de l’Ont. 384/94 (non traduit), « Apartments in Houses ».
[121] Voir aussi le communiqué de Urban Development Institute of Ontario, « Beaubien Report Released: Further Changes to Property Assessment System Recommended », émis le 2 décembre 2002. Accessible sur Internet : www.udiontario.com/issupd/upd021202.htm.
[122] Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 24.
[123] Ibid., par. 56.
[124] Loi sur les services à l’enfance et à la famille (LSEF), L.R.O. 1990, chap. C.11.
[125] COHEN-SCHLANGER, Miriam, et al. « Housing as a factor in admissions of children to temporary care: A survey », Child Welfare, mai 1995; et Shirley CHAU, et al. « One in Five ... Housing as a Factor in the Admission of Children to Care: New Survey of Children’s Aid Society of Toronto Updates 1992 Study », CUCS Research Bulletin no 5, Université de Toronto, novembre 2001.
[126] Kearney, supra note 49.
[127] Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 15.
[128] HULCHANSKI, supra note 84.
[129] Voir aussi le document Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 29 : « Le Comité note avec inquiétude que bon nombre des expulsions sont effectuées par suite d’arriérés de loyer d’un montant minimal, sans tenir compte des obligations de l’État en vertu du Pacte. »
[130] ONLEY, David. Aller de l’avant à la manière de l’Ontario, 29 novembre 2007. Accessible sur Internet : www.premier.gov.on.ca/news/Product.asp?ProductID=1799&Lang=FR Les éléments de la stratégie annoncée comprennent les suivants : porter le salaire minimum à 10,25 $ d’ici 2010, accroître le nombre de places dans les garderies, fournir un plus grand nombre de logements abordables et mettre complètement en œuvre la nouvelle Prestation ontarienne pour enfants en la portant à 1 100 $ par enfant.
[131] Le logement abordable est un élément critique des stratégies de réduction de la pauvreté. Le site Web du gouvernement de l’Ontario indique que sa stratégie à long terme visant à offrir du logement abordable sera étroitement liée au plan de réduction de la pauvreté. L’Ontario verse maintenant 35 000 allocations pour habitations neuves et finance plus de 18 000 unités de logement à prix abordable. Accessible sur Internet : www.growingstronger.ca/fr/facts_what_housing.html. Voir aussi le rapport rédigé par la Campagne 2000 : Mettons fin à la pauvreté des enfants au Canada, et intitulé  Rapport sur la pauvreté des enfants et des familles au Canada : Il faut une nation pour éduquer une génération : Le temps est venu pour une stratégie nationale de réduction de la pauvreté. Accessible sur Internet : www.campaign2000.ca/rc/rc07/2007_C2000_NationalReportCardFR.pdf.
[132] Selon Statistique Canada, 1,8 million d’Ontariennes et d’Ontariens vivaient sous le seuil de faible de revenu en 2005. Parmi ces personnes, 26 % avaient moins de 18 ans (474 000 enfants), environ 9 % étaient des adultes de plus de 65 ans (169 000 aînés) et quelque 64 % étaient des adultes ayant entre 18 et 64 ans (1,15 million de personnes). Ces données sont tirées du rapport de Michael Shapcott, intitulé Ontario Throne Speech and housing , et daté du 30 novembre 2007. Accessible sur Internet :www.wellesleyinstitute.com/ontario-throne-speech-and-housing.
[133] Le CESCR a également recommandé que l’État détermine dans quelle mesure la pauvreté constitue un motif de discrimination au Canada et de veiller à ce que les mesures et les programmes n’aient aucune répercussion négative sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier des personnes et des groupes défavorisés et marginalisés. Il serait encourageant de voir que ces objectifs sont intégrés dans les initiatives provinciales visant à éliminer la pauvreté. Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 44. Voir également Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels : Canada, ONU Doc. E/C. 12/1/Add.31, 1998.
[134] ouvernement de l’Ontario, Devenir plus forts ensemble. Accessible sur Internet : www.ontario.ca/growingstronger.ca. Cette brochure indique qu’entre 2004 et 2006, le gouvernement de l’Ontario a augmenté les taux des prestations d’aide sociale de 7 % et que le budget de 2008 a annoncé une autre hausse de l’ordre de 2 %. On y ajoute que des augmentations de 0,75 $/année porteront le salaire minimum actuel, qui est de 8,75 $/heure, à 10,25 $ d’ici 2010.
[135] 76 % des bénéficiaires du programme POSPH sont des locataires, mais une proportion de seulement 22 % vit dans des logements subventionnés. 96 % des bénéficiaires du programme OT sont locataires de leur logement, mais seulement 17 % d’entre eux vivent dans un logement subventionné. CODDL, Faits rapides, supra note 119. Voir aussi le « Rapport trimestriel sur les cas et les prestataires OT/POSPH selon les types de logement – juin 2005 », de l’Unité de la statistique et de l’analyse, Division de l’aide sociale et de la préparation à l’emploi, ministère des Services sociaux et communautaires.
[136] Coalition d’action du POSPH. « Coalition Social Assistance Rates Backgrounder ». Accessible sur Internet : www.incomesecurity.org/documents/Sabackgrounder.pdf.
[137] Voir, par exemple, le rapport : « We are your Sons and Daughters », publié en juin 2007 par le Bureau d’assistance à l’enfance et à la famille. Accessible sur Internet : www.oacas.org/pubs/external/childadvocatereview07june21.pdf.
[138] STAPLETON, John, supra note 111, p. 13.
[139] Ibid.
[140] Voir aussi le rapport de la Coalition ontarienne pour la justice sociale, « Ontario Campaign for Social Justice », paru en août 2007. Accessible sur Internet : www.ocsj.ca/network.php. Voir aussi Campagne 2000, supra note 131. Selon le rapport, « en 2005, 41 % de tous les enfants considérés à faible revenu vivaient dans une famille dont un parent travaillait à plein temps toute l’année, mais la famille vivait toujours dans la pauvreté », p. 3.
[141] Gouvernement de l’Ontario, « Hausses du salaire minimum de l’Ontario de 2007 à 2010 ». Accessible en ligne : www.labour.gov.on.ca/info/salaireminimum/.
[142] Bien qu’un travail à plein temps et à salaire minimum de 10 $ l’heure en 2005 aurait suffi à assurer un revenu supérieur au seuil de faible revenu avant impôt de 20 778 $ en 2005, si l’on suppose un taux d’inflation de 2,1 % entre 2005 et 2010, le salaire minimum devrait s’élever à 11,10 $ en 2010. MURRAY, Stuart et Hugh MACKENZIE. Centre canadien de politiques alternatives, « Bringing Minimum Wages Above the Poverty Line », mars 2007. Accessible sur Internet : www.growinggap.ca/files/Minimum%20Wages%20SUMMARY.pdf.
[143] Centre d’action pour la sécurité du revenu, « Ontario Needs a Raise Campaign – Minimum Wage Fact Sheet », février 2005. Accessible sur Internet : www.incomesecurity.org/.
[144] Ibid.
[145] Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 11 (c), (f), 18, 20, 23 et 28.
[146] Une allocation de logement est « une subvention gouvernementale permettant de réduire le coût de logement qui doit être assumé par une famille ou une personne seule. » Société canadienne d’hypothèques et de logement. « Options en matière d’allocation-logement au Canada », 2006. Accessible sur Internet : www.cmhc-schl.gc.ca, p. 1.Cette étude explore quatre options de conception en matière de programmes d’allocation de logement.
[147] Voir, par exemple, le Golden Report, supra note 118, qui décrit la nécessité d’établir des stratégies particulières visant à répondre aux besoins des sous-groupes à risque élevé, comme les familles avec enfants, les jeunes, les femmes victimes de violence, les Autochtones, les immigrants et les réfugiés. Document de référence, supra note 51, p. 50 et 53. Voir aussi le rapport du Community Social Planning Council of Toronto, intitulé : Homelessness in Toronto: A Review of the Literature from a Toronto Perspective, 2004, p. 1. Accessible sur Internet : intraspec.ca/HOMELESSNESS_in_Toronto.pdf.
[148] « Les personnes d’origine autochtone comptent pour 35 % de la population d’itinérants à Edmonton, 18 % à Calgary, 11 % à Vancouver et 5 % à Toronto, mais respectivement pour seulement 3,8 %, 1,9 %, 1,7 % and 0,4 % de la population générale de ces villes. » HWANG, Stephen. « Homelessness and health », CMAJ, vol 164, no 2, 2001. Accessible sur Internet : http://www.cmaj.ca/cgi/content/full/164/2/229.
[149] L’ACSM faisait référence à YANOS, P., S. BARROW et S. TSEMBERIS. « Community integration in the early phase of housing among homeless persons diagnosed with severe mental illness: successes and challenges. », Community Mental Health Journal, vol. 40, no 2, 2004, p.133 à 150. Voir aussi le Golden Report, supra note 118.
[150] L’Alliance pour résoudre la question des sans-abri a indiqué qu’en 2006, le nombre de femmes seules ayant fait appel à un refuge avait augmenté de 14,5 %, le nombre de jeunes, de 11,8 %, et le nombre d’enfants, de 12,4 %, et ce, même si le nombre de familles avait diminué de 7,9 %.
[151] La Société John Howard de Toronto a indiqué que, des 5 052 personnes ayant participé à l’enquête torontoise « Street Needs Assessment », 18 % ont eu une « interaction avec les services correctionnels » et 17 % ont eu « une interaction avec la direction de la probation ou la commission des libérations conditionnelles » au cours des six mois précédents. On a également remarqué qu’à Sudbury, 9,4 % des 148 personnes qui étaient considérées comme sans-abri en janvier 2004 ont indiqué la raison « sorti de prison » pour expliquer leur situation.
[152] Voir aussi le Golden Report, supra note 118.
[153] Voir, par exemple, les Observations finales du Comité des droits de l’enfant, Canada, supra note 15, et les Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, Canada, supra note 16.
[154] Le risque de décès chez les femmes itinérantes âgées entre 15 et 44 ans était 10 fois plus élevé que chez les femmes de la population générale de Toronto. CHEUNG, Angela M. et Stephen W. HWANG. « Risk of death among homeless women: a cohort study and review of literature », CMAJ, vol. 170, no 8, 2004, p. 1243 à 1245.
[155] Association canadienne de la santé mentale, Ontario. « Homelessness and the Seriously Mentally Ill », 31 janvier 2003. Voir aussi le Golden Report, supra notes 118 et 119.
[156] Ibid., p. 112.
[157] Selon les rapports précédents, on a associé la diminution du nombre de maisons de chambres à la hausse du taux d’itinérance et recommandé la création, de plein droit, de maisons de chambre dans le cadre de la stratégie pour lutter contre l’itinérance. Voir, par exemple, le Golden Report, supra note 118, p. 179.
[158] Voir, par exemple, Social Housing Strategies Inc. for the City de Toronto. « Rooming House Issues and Future Options, Background Report Two: Regulation and Licensing of Rooming Houses in the City of Toronto and Other Jurisdictions », avril 2004. Accessible en ligne : www.toronto.ca/housing/pdf/rooming-house-bg-2.pdf. Voir aussi Social Housing Strategies Inc. pour la Ville de Toronto. « Rooming House Issues and Future Options, Final Report », avril 2004. Accessible en ligne : www.urbancentre.utoronto.ca/pdfs/curp/2004_Toronto-Rooming-House-Report.pdf
[159] Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, supra note 13, par. 28.
[160] Ibid., par. 57.
[161] La commissaire en chef, Barbara Hall, dans une lettre à l’éditeur du Toronto Star : « Objet : Résidents en colère à cause d’un projet de logement », 14 novembre 2007. Accessible sur Internet : www.ohrc.on.ca/fr/resources/news/nimby
[162] Ibid.
[163] Le « cringe test » de la HomeComing Community Choice Coalition est accessible sur Internet à : www.homecomingcoalition.com/pdfs/iscringetest.pdf.
[164] Fair Housing Act, 42 U.S.C. 3601 et suiv.