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La nature de notre planète hyperconnectée est telle que des événements se déroulant à des milliers de kilomètres de chez nous ont des répercussions dans nos quartiers. C'est le pouvoir et la promesse des médias sociaux — rendre notre monde plus petit.
Au mieux, notre connectivité nous rend plus empathiques. Le petit corps d'Alan Kurdi, échoué sur une plage turque, a mobilisé la population canadienne qui a réclamé une meilleure protection pour les réfugiés. Nous avons ensuite élu un gouvernement fédéral qui s'est justement engagé à le faire et qui a affirmé qu'il était déterminé à remplir ses promesses. Nous avons agi de la sorte en dépit de nos différences de nationalités, de circonstances et de religions.
Il y a toutefois un revers de la médaille : des événements éloignés, comme ceux de Paris, de Beyrouth, du Nigeria et d'Égypte, encouragent parfois, chez nous, le déploiement de forces haineuses, autrement marginales. Nous avons observé une recrudescence troublante de violence antimusulmane et raciste la semaine passée — un incendie criminel dans une mosquée de Peterborough, l'agression d'une femme musulmane à Toronto, le vandalisme d'un temple à Kitchener, et même une menace anonyme en ligne (déjouée) de tuer des Musulmans au Québec.
Dans une déclaration diffusée le 17 novembre, j'ai rappelé aux Ontariens et Ontariennes que la haine et la discrimination fondées sur la religion n'avaient pas de place dans notre province, et que nous ne pouvons pas lutter contre l'extrémisme et la haine en déployant ces mêmes moyens. J'ai précisé qu'il était plus important que jamais, dans des moments comme celui-là, de célébrer les meilleures traditions canadiennes de respect mutuel, d'empathie, d'inclusion et de reconnaissance de notre humanité commune et de la dignité individuelle, qui reposent sur la protection des droits de la personne.
Ma déclaration s'est ajoutée aux nombreuses autres déclarations émanant de dirigeants de l'ensemble du pays, dont celles du premier ministre Justin Trudeau et de la première ministre Kathleen Wynne, qui ont enjoint les Canadiens et Canadiennes à s'accrocher à leurs idéaux précieux. Le maire de Calgary, M. Nenshi, lui-même musulman, a avoué avoir été « secoué » par les sentiments antiréfugiés qui sont apparus après les attaques de Paris.
Et pourtant, ces incidents profondément préoccupants se poursuivent. Hier, une femme musulmane, à Ottawa, a reçu une lettre anonyme lui déclarant que « Le Canada n'est pas un pays pour les immigrants ou les terroristes. Rentrez chez vous ». La femme a confié aux médias que depuis cette lettre elle ne se sentait plus en sécurité dans son propre domicile. Hier, à Toronto, dans le métro, deux femmes musulmanes portant le voile ont été accostées par trois passagers qui leur ont fait des commentaires racistes, insinuant qu'elles étaient des terroristes, et ont poussé l'une d'entre elles. Par ailleurs, des graffitis antimusulmans ont été aperçus dans des toilettes d'un train Go.
Nous devons condamner ces actes avec force, en public, pour que tout le monde sache qu'ils ne représentent pas la population canadienne ni ses valeurs enchâssées dans la Charte des droits et libertés et dans les codes provinciaux des droits de la personne. En effet, le Code des droits de la personne de l'Ontario nous exhorte à collaborer en vue de « créer un climat de compréhension et de respect mutuel de la dignité et de la valeur de toute personne de façon à ce que chacun se sente partie intégrante de la collectivité et apte à contribuer pleinement à l’avancement et au bien-être de la collectivité et de la province ».
Prenons donc un moment pour reconnaître que parfois des actes éloignés peuvent causer des fissures troublantes dans notre identité collective, qui nous rappellent que l'islamophobie et le racisme sont vécus par des personnes qui vivent ici, chez nous.
En dépit de nos relatives harmonies et paix, il reste encore beaucoup à faire. Le Code des droits de la personne de l'Ontario encourage la CODP à agir en vue de réduire les situations de tension et de conflit. Alors, relevons ce défi ensemble et utilisons notre connectivité pour exprimer notre solidarité avec les victimes de terreur et avec nos voisins, chez nous, qui font l'objet de discrimination à cause de cette connectivité.
La commissaire en chef de la Commission ontarienne des droits de la personne,
Renu Mandhane, J.D., LL.M.
Lire l'article dans le Huffington Post Canada (11/20/2015, en anglais)