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8. Prise en compte des besoins d’adaptation des employés au travail

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a) L’obligation d’adaptation sous réserve du préjudice injustifié

Sous réserve d’un préjudice injustifié, le Code exige qu’un effort soit fait pour tenir compte des besoins des personnes qui bénéficient de sa protection. Il serait injuste d’exclure quiconque du milieu de travail ou des activités qui se déroulent dans le milieu de travail parce que leurs besoins protégés en vertu du Code sont différents de ceux de la majorité. Le principe de l’adaptation s’applique à tous les motifs du Code, mais les problèmes d’adaptation en milieu de travail se rapportent le plus souvent aux besoins :

  • des employés handicapés (handicap);
  • des travailleurs âgés (âge);
  • des employés qui observent une religion (croyance);
  • des femmes enceintes (sexe);
  • des employés qui doivent apporter des soins à quelqu’un (état familial).

La présente section porte sur le principe de l’adaptation, sur les obligations et les responsabilités liées au processus d’adaptation et sur les limites de l’obligation d’adaptation. On y aborde ensuite certains points particuliers concernant les motifs de discrimination présentés ci-dessus.

b) Le principe de l’adaptation

Le droit des personnes au respect de leurs besoins et l’obligation qu’ont les employeurs et les syndicats de tenir compte de ces besoins sont, de nos jours, bien ancrés dans la loi et la jurisprudence. Les principes de l’adaptation, aussi désignée par le terme accommodement, sont exposés en détail dans le document de la Commission intitulé Politique et directives concernant le handicap et l’obligation d’accommodement et sont résumés ci-dessous.

L’adaptation est une partie fondamentale et intégrante du droit à l’égalité de toute personne. Le principe de l’adaptation recouvre trois facteurs: le respect de la dignité, l’adaptation individualisée et l’intégration.

  • Respect de la dignité : L’adaptation doit se faire de la façon la plus respectueuse possible de la dignité de la personne, soit dans le respect de la vie privée et de la confidentialité des renseignements personnels, du confort et de l’autonomie de la personne.
  • Adaptation individualisée : En matière d’adaptation, il n’existe aucune formule préétablie. Les besoins de chaque personne sont uniques et doivent être considérés de nouveau lorsque des mesures d’adaptation sont demandées. Bien que certaines mesures d’adaptation soient avantageuses pour un grand nombre de personnes, il est possible qu’une solution satisfaisante pour les uns ne le soit pas pour les autres.
  • Intégration : Pour en arriver à l’intégration et à la pleine participation, on devra promouvoir une conception inclusive et éliminer les obstacles existants. Pour prévenir et éliminer les obstacles, toute personne doit pouvoir accéder à son lieu de travail et satisfaire aux mêmes obligations et aux mêmes exigences que les autres, avec dignité et sans empêchements. Consulter la section IV-1a(i) – « Prévention, examen et élimination des obstacles ».

Les mesures d’adaptation les plus appropriées doivent être identifiées et mises en place sans toutefois causer de préjudice injustifié. Toute décision sur ce qui constitue ou non une adaptation appropriée nécessite une analyse distincte de celle du préjudice injustifié. L’adaptation est jugée appropriée si elle offre à la personne visée des chances égales d’atteindre le même niveau de rendement ou de jouir des mêmes avantages et privilèges que les autres employés, ou si elle est proposée ou exécutée dans le but d’atteindre l’égalité des chances et à répondre aux besoins liés à un motif prévu par le Code. L’adaptation la plus appropriée sera celle qui favorise le plus l’inclusion et une pleine participation, et qui permet de régler efficacement tout problème systémique.

Exemple : Au lieu de faire une seule exception pour un employé qui a d’importantes responsabilités en tant qu’aidant naturel, un employeur se penche à nouveau sur la question de savoir si les quarts de travail de 10 heures à temps plein constituent une exigence justifiée. Si l’employeur décide qu’elle ne l’est pas, il modifie la règle en instaurant des quarts de huit heures et des modalités de travail à temps partiel.

L’adaptation aux besoins peut se faire de deux façons : en offrant des solutions fondées sur les besoins du groupe auquel la personne appartient (voir, par exemple, le paragraphe 11(2) du Code) ou des solutions axées sur les besoins particuliers d’une personne (dans le cas notamment d’une personne qui a un handicap) lesquels sont évalués de façon individuelle (voir, par exemple, les paragraphes 17(2) et 24(2) du Code).

Il est possible de mettre des mesures d’adaptation en place en modifiant les termes et conditions de l’emploi ou encore les aspects physiques d’un lieu ou d’un poste de travail. Par exemple, lorsque la conduite automobile est une exigence essentielle d’un emploi, l’employeur peut essayer de tenir compte des besoins particuliers d’une personne ayant un handicap en apportant certaines modifications à un véhicule de l’entreprise, à moins que cette mesure ne lui cause un préjudice injustifié. Les adaptations aux besoins vont de celles qui ne respectent guère la vie privée, l’autonomie ou la dignité d’une personne à celles qui les respectent parfaitement. Les adaptations qui n’ont aucun égard pour la vie privée, l’autonomie ou la dignité d’une personne sont inacceptables.

L’employeur peut, selon les circonstances, avoir de la difficulté à financer sur-le-champ la totalité d’une adaptation. Dans ce cas, il lui est permis de prendre des mesures d’adaptation provisoires ou d’échelonner la mise en œuvre de l’adaptation définitive, à condition de ne pas retarder cette dernière indûment. Cette façon de faire pourrait le mettre à l’abri d’une éventuelle plainte pour défaut. La question de savoir si une adaptation provisoire ou progressive est acceptable sera toutefois tranchée à la lumière d’une analyse visant à déterminer si une adaptation définitive et immédiate causerait réellement un préjudice injustifié à l’employeur.

Les conventions collectives et autres dispositions contractuelles ne doivent pas entraver la mise en place de mesures d’adaptation. Les tribunaux ont statué que les dispositions des lois régissant les droits de la personne primaient sur celles des conventions collectives et des autres contrats.[48] La situation contraire autoriserait les parties à se soustraire par contrat aux dispositions du Code, renonçant ainsi aux droits et obligations que celui-ci prévoit à leur égard. Par conséquent, sous réserve de la norme du préjudice injustifié, les modalités d’une convention collective ou d’autres dispositions contractuelles ne peuvent justifier une situation de discrimination interdite par le Code.

Les employeurs et les syndicats doivent unir leurs efforts pour trouver une solution lorsqu’une mesure d’adaptation est incompatible avec une convention collective. La Cour suprême du Canada a toutefois noté que, malgré le principe de la responsabilité partagée, il demeure que l’employeur est responsable du lieu de travail, et, de ce fait, est le mieux placé pour prendre des mesures d’adaptation.[49] En conséquence, il incombe à l’employeur d’entamer le processus d’adaptation. La Cour suprême a toutefois relevé que le syndicat était également dans l’obligation de proposer des solutions de rechange envisageables et qu’il sera tenu responsable de sa décision s’il ne le fait pas. L’employeur et le syndicat ont la responsabilité partagée d’éliminer tout traitement discriminatoire ou d’en atténuer la source.

Si un employeur et un syndicat ne peuvent s’entendre sur les mesures à adopter pour résoudre un problème d’adaptation, l’employeur doit procéder à ces mesures en dépit de la convention collective, sous réserve d’un préjudice injustifié. Si le syndicat s’objecte aux mesures d’adaptation ou ne coopère pas au processus de leur mise en place, il peut être mis en cause à titre d’intimé dans le cadre d’une plainte déposée devant la Commission.

Les syndicats sont soumis aux mêmes exigences en ce qui concerne la norme du préjudice injustifié. Ainsi, si l’on peut démontrer que la modification d’une convention collective entraîne des coûts directs, ce fait peut être pris en compte en vertu de la norme des coûts.

La méthode visant à évaluer l’adaptation est aussi importante que la substance de l’adaptation.[50] Tout manquement de l’employeur à l’obligation d’examiner et d’évaluer individuellement les différentes possibilités d’adaptation peut être vue comme une infraction distincte au Code.

Exemple : Une femme est engagée comme aide familiale en résidence pour deux jeunes enfants. Au début de son emploi, elle dit à son employeur qu’elle est enceinte et souffre de nausées, mais qu’elle souhaite quand même travailler. L’employeur décide cependant de ne pas continuer de l’employer car il craint que la femme ne satisfasse pas aux exigences physiques de l’emploi, étant donné les symptômes de grossesse qu’elle éprouve. L’employeur ne s’est pas acquitté de son obligation procédurale de prendre des mesures d’adaptation.

Exemple : Un homme révèle qu’il a un handicap, soit un trouble bipolaire, peu après son embauche. Au lieu d’évaluer la nature de ses besoins en matière d’adaptation par rapport aux tâches essentielles du poste et à la norme du préjudice injustifié, l’employeur se fonde sur des stéréotypes discriminatoires et conclut hâtivement que l’employé ne peut pas exercer les fonctions du poste. L’employé est renvoyé huit jours après le début de sa période probatoire. L’employeur ne s’est pas acquitté de son obligation procédurale de prendre des mesures d’adaptation.

Les tribunaux des droits de la personne ont conclu que l’employé avait fait l’objet de discrimination dans ces deux exemples. Leur décision dans ces deux affaires s’appuie notamment sur l’élément clé voulant que l’employeur n’ait pas amorcé un processus approprié pour déterminer s’il était possible de prendre des mesures d’adaptation sans que cela entraîne un préjudice injustifié. Consulter la section IV-8d) – « Que faut-il entendre par préjudice injustifié? » et l’annexe E – « Modèle de formulaire d’évaluation des besoins d’adaptation ».

c) Vue d’ensemble des obligations et responsabilités

Dans les lieux de travail, les employeurs sont tenus de prévoir des politiques et des procédures en matière d’adaptation. Les syndicats et les employeurs doivent collaborer pour veiller à ce que des politiques soient élaborées et que tous les membres du personnel en prennent connaissance pour qu’ils soient au courant de leurs droits. Les superviseurs et les supérieurs immédiats doivent également connaître la marche à suivre lorsqu’une demande d’adaptation est présentée. Pour obtenir de plus amples renseignements sur la façon d’élaborer une politique en matière d’adaptation, consulter la section IV-1a(iv) – « Politique et procédures en matière de mesures d’adaptation ».

L’adaptation appropriée qui vise à répondre aux besoins fondés sur un motif prévu au Code peut également changer avec le temps. Les demandes d’adaptation et les mesures adoptées doivent donc être surveillées et rajustées au besoin, selon les changements qui surviennent en ce qui a trait à l’employé, à l’employeur et au lieu de travail.

Les employés, les employeurs et les syndicats ont tous des obligations et des responsabilités à respecter au cours du processus d’adaptation.

i) L’employé :

  • demander la mesure d’adaptation appropriée;
  • donner les raisons pour lesquelles l’adaptation est nécessaire, de façon à faire connaître ses besoins;
  • décrire le mieux possible la nature de ses besoins, de préférence par écrit;
  • répondre aux questions ou fournir de l’information sur ses restrictions ou limites pertinentes à l’emploi, en incluant au besoin de l’information provenant de professionnels de la santé;
  • participer aux discussions sur les mesures d’adaptation possibles;
  • collaborer avec les spécialistes dont l’aide s’avère nécessaire;
  • satisfaire aux normes de travail et de rendement convenues une fois que les mesures d’adaptation ont été prises;
  • continuer de collaborer avec l’employeur dans la gestion du processus d’adaptation;
  • discuter de ses besoins en matière d’adaptation uniquement avec les personnes qui ont le droit d’en être informées, notamment le superviseur, le représentant syndical ou un responsable en matière de droits de la personne.

De nombreuses plaintes pour discrimination résultent de ce qu’un employeur interrompt un processus d’adaptation parce que l’employé ne lui semble pas remplir les exigences du poste. Par ailleurs, il existe certainement des circonstances où, en dépit de ses efforts pour accommoder l’employé, l’employeur ne peut y arriver à cause de la réticence de l’employé à coopérer.

Exemple : Une employée a de très mauvais antécédents d’assiduité. L’employeur offre de prendre des mesures d’adaptation et demande des renseignements concernant les motifs prévus au Code qui peuvent influer sur la capacité de l’employée d’être assidue. Même si l’employée est informée des politiques et procédures en matière d’adaptation, elle signale son handicap à l’employeur, mais ne lui demande pas de l’accommoder. L’employeur lui recommande un programme d’aide aux employés (PAE) et lui offre de prendre un congé rémunéré pour consulter des professionnels ou obtenir un examen médical. L’employée refuse ces deux options.

Étant donné que le problème d’assiduité persiste sur une longue période, l’employeur prend progressivement des mesures disciplinaires qui aboutissent au renvoi. Pendant toute cette période, il s’assure que l’employée sait qu’il est disposé à l’accommoder dans la mesure où il n’en subira pas de préjudice injustifié. Vu le refus de l’employée de collaborer au processus, cette dernière aura du mal à prouver qu’elle a fait l’objet de discrimination.

Par ailleurs, craignant la stigmatisation ou la discrimination, certains employés taisent leurs besoins d’adaptation jusqu’à ce qu’il soit absolument nécessaire de les communiquer, ce qui est tout à fait compréhensible. Le fait qu’un employé mente au sujet de ses besoins au début du processus de sélection ou au moment de faire une demande d’emploi n’est pas pertinent lorsqu’on détermine si l’employeur a satisfait à son obligation de prendre des mesures d’adaptation à l’intention des employés dont les besoins sont connus.

De même, un employé peut refuser de se soumettre à tout processus d’adaptation défectueux géré par l’employeur. Pour évaluer toute allégation voulant que le manque de coopération d’un employé ait entravé le processus d’adaptation, on doit toujours soumettre à un examen critique les événements qui ont précédé la rupture du processus d’adaptation. Si le processus d’adaptation est inflexible, punitif ou n’est pas appliqué de bonne foi par l’employeur, un tribunal peut conclure que l’employé a agi de façon raisonnable dans les circonstances et que c’est l’employeur qui a manqué à son obligation de prendre des mesures d’adaptation.

ii) Le syndicat :

  • jouer un rôle actif en tant que partenaire dans le processus d’adaptation;
  • partager avec l’employeur la responsabilité de faciliter l’adaptation, notamment en jouant un rôle actif dans la proposition et la mise à l’essai d’approches parallèles et en coopérant pleinement lorsque des solutions sont proposées;
  • respecter le caractère confidentiel de la demande;
  • appuyer les mesures d’adaptation peu importe les dispositions de la convention collective à cet égard, sous réserve d’un préjudice injustifié.

Consulter la section III-4d) – « Syndicats ».

iii) L’employeur :

  • accepter de bonne foi la demande d’adaptation présentée par l’employé, à moins d’avoir des raisons légitimes d’agir autrement;
  • obtenir l’opinion ou les conseils de spécialistes, au besoin;
  • veiller activement à ce qu’on examine d’autres approches et solutions de rechange et faire des démarches pour découvrir diverses formes d’adaptation et de solutions de rechange, dans le cadre de l’obligation d’adaptation;
  • conserver dans ses dossiers la demande d’adaptation et consigner les mesures prises;
  • respecter le caractère confidentiel de la demande;
  • limiter les demandes d’information aux questions qui se rapportent raisonnablement à la nature des limites de la personne handicapée, de manière à pouvoir répondre à la demande d’adaptation;
  • accorder l’adaptation demandée en temps opportun et dans la mesure où elle n’entraîne pas un préjudice injustifié, même lorsque la demande n’est pas présentée en bonne et due forme;
  • assumer les frais de tout renseignement ou de tout document à caractère médical (par exemple, les coûts associés aux notes et lettres du médecin précisant les besoins d’adaptation de la personne devraient être assumés par l’employeur);
  • si l’adaptation entraîne un préjudice injustifié, en faire part clairement à l’employé et être disposé à démontrer pourquoi.

iv) Rôle du fournisseur d’assurances – L’employeur demeure responsable de prendre les mesures d’adaptation

L’impartition, par un employeur, d’une partie ou de la totalité du processus d’adaptation à un fournisseur d’assurances peut soulever des questions en matière de droits de la personne. Il est dans l’intérêt du fournisseur d’assurances de favoriser le retour au travail de l’employé et de limiter les coûts. Cependant, ces objectifs s’opposent parfois à la mise en œuvre d’une adaptation appropriée et à la norme du préjudice injustifié. Le fournisseur d’assurances peut être assigné à titre d’intimé avec l’employeur dans le cadre d’une plainte en matière de droits de la personne.

Exemple : La note du médecin d’un employé indique que celui-ci est incapable de retourner au travail en raison de son handicap et fixe un délai de trois mois pour la réintégration de l’employé. Le fournisseur d’assurances conteste le pronostic sans motif valable et, en bout de ligne, adopte la position selon laquelle l’employé n’a plus de handicap, n’est pas admissible aux prestations et doit se présenter au travail sur-le-champ. Sur l’avis du fournisseur d’assurances, l’employeur applique des mesures disciplinaires progressives à l’endroit de l’employé pour son défaut de se présenter au travail. L’employé est congédié pour avoir « abandonné son poste ». Même si l’employeur comptait sur l’avis et les compétences du fournisseur d’assurances, l’employeur ne s’est pas acquitté de ses propres obligations en vertu du Code. Le fournisseur d’assurances a également enfreint le Code.

Même si la compagnie d’assurances a aussi des obligations en tant que fournisseur de services, l’employeur a avant tout la responsabilité de prendre en compte les besoins de son employé, sous réserve d’un préjudice injustifié. La compagnie d’assurances n’est pas elle même en mesure de modifier l’emploi, le lieu de travail ou ses règles et politiques du lieu de travail; ces mesures sont du ressort de l’employeur.[51]

L’employeur n’est pas dégagé de ses obligations en vertu du Code même si l’assureur est le principal point de contact dans la planification des mesures d’adaptation ou du retour au travail d’un employé à l’issue d’un congé d’invalidité de courte ou de longue durée. L’employeur est censé collaborer activement avec l’assureur et avec l’employé pour faire en sorte que le retour au travail éventuel se déroule de façon appropriée, selon les renseignements médicaux pertinents. L’évaluation du préjudice injustifié pour la compagnie d’assurances fournissant des services se distingue de l’évaluation du préjudice injustifié pour l’employeur.

d) Que faut-il entendre par « préjudice injustifié »?

Le préjudice injustifié est une défense prévue au Code. L’employeur doit prouver que cette défense est légitime, sous peine de voir le tribunal conclure à la discrimination. Il n’incombe pas à la personne qui demande l’adaptation de prouver que les mesures peuvent être prises sans entraîner de préjudice injustifié.

Selon le Code, seuls trois facteurs peuvent être pris en compte afin de déterminer si les mesures d’adaptation entraînent un préjudice injustifié; ce sont, aux paragraphes 11(2), 17(2) et 24(2) :

  • le coût;
  • les sources extérieures de financement, le cas échéant;
  • les exigences en matière de santé et de sécurité, le cas échéant.

L’employeur doit donc pouvoir apporter la preuve que le coût de l’adaptation (même en tenant compte d’éventuelles sources extérieures de financement) ou les risques qu’elle crée pour la santé et la sécurité lui causeraient un préjudice injustifié.

Il ne fait aucun doute que l’employeur devra déployer certains efforts afin de prendre des mesures d’adaptation pour ses employés. Cependant, il faut s’attendre à un certain degré de préjudice, ce qui explique pourquoi le critère prévu au Code est celui du « préjudice injustifié », et non du « préjudice mineur » ou du « préjudice raisonnable ». L’employeur pourra conclure qu’une demande d’adaptation entraîne un préjudice injustifié seulement après pris soigneusement et rigoureusement en considération tous les éléments de la demande et l’aptitude de l’entreprise à y répondre. Une telle conclusion ne doit jamais constituer la première réponse de l’employeur à la demande d’adaptation. Pour obtenir des conseils sur le processus d’adaptation, consulter l’annexe E – « Modèle de formulaire d’évaluation des besoins d’adaptation ».

Exemple : Un employé demande une semaine de congé pour s’occuper d’un membre de sa famille qui est atteint d’une maladie mentale. L’employeur répond : « Désolé, mais si je vous accorde ce congé, tout le monde voudra s’absenter et cela constituerait un préjudice injustifié pour l’entreprise. »

Dans les circonstances, l’employeur serait vu comme ayant manqué à ses obligations à la fois au point de vue du processus, en n’étudiant pas tous les aspects de la demande d’adaptation, et au point de vue de la substance, en ne prenant aucune mesure d’adaptation. Que l’employeur déclare l’existence du préjudice injustifié ne suffit pas à prouver que le préjudice injustifié existe bel et bien.

La preuve nécessaire pour établir le préjudice injustifié doit être objective, réelle, directe, et, s’il s’agit du coût, quantifiable. L’employeur doit fournir des faits, des chiffres ainsi que des avis ou données scientifiques à l’appui de l’argument du préjudice injustifié éventuellement entraîné par les mesures proposées. Il ne suffit pas de déclarer que le risque ou le coût est « trop élevé » à partir d’impressions ou d’idées reçues, sans preuves à l’appui.

L’employeur ne peut pas invoquer de facteurs autres, tels qu’une perturbation de ses pratiques commerciales, le moral des employés ou les préférences de sa clientèle. L’incompatibilité avec certaines dispositions d’une convention collective ne peut pas non plus entraver la prise de mesures d’adaptation.

Seules des circonstances existantes peuvent entrer en ligne de compte au moment de déterminer si une adaptation pourrait causer un préjudice injustifié. Aucune conjecture quant aux risques ou circonstances à venir n’est permise. L’employeur ne doit pas, par exemple, faire de conjectures sur le degré futur d’un handicap au moment d’évaluer les besoins présents d’une personne dont l’état pourrait se détériorer avec le temps. Une personne atteinte de sclérose en plaques pourrait ultérieurement se fatiguer plus rapidement, mais il est impossible de prévoir exactement quand, pendant combien de temps ni de quelle manière cette détérioration pourrait se produire.

Le fait d’avoir pris des mesures d’adaptation pour d’autres employés ou pour ce même employé dans le passé ne dégage pas l’employeur de son obligation de répondre à d’autres besoins en matière d’adaptation à l’heure actuelle et dans l’avenir. Par ailleurs, il peut y avoir des circonstances dans lesquelles la prise de mesures d’adaptation visant à répondre à tous les besoins de nombreux employés entraînerait un préjudice injustifié. Cela aussi devra faire l’objet d’une évaluation par rapport aux critères énumérés ci-après.

i) Frais quantifiables entraînés par l’adaptation (y compris les sources extérieures de financement)

L’employeur peut être en mesure de prouver que le coût d’une adaptation représente un préjudice injustifié si les conditions suivantes sont réunies :

  • les frais sont quantifiables;
  • ils sont réputés découler de l’adaptation nécessaire;
  • ils ont une importance telle qu’ils modifieraient la nature essentielle de l’entreprise ou ont une incidence telle qu’ils influeraient considérablement sur sa viabilité.

Les frais quantifiables entraînés par l’adaptation comprennent tous les frais prévus que l’on peut quantifier et dont on peut démontrer la pertinence pour l’adaptation envisagée. Cependant, les conjectures, par exemple, sur les pertes financières pouvant découler de l’adaptation aux besoins de la personne handicapée ne sont généralement pas acceptables. Sont compris dans le coût financier de l’adaptation :

  • les dépenses d’immobilisation, ainsi l’installation d’une rampe d’accès, l’achat d’un logiciel de grossissement d’écran;
  • les frais d’exploitation, ainsi la rémunération d’interprètes gestuels, d’accompagnateurs ou de personnel supplémentaire;
  • les sommes engagées par suite d’une restructuration exigée par l’adaptation;
  • toute autre dépense quantifiable engagée directement par suite de l’adaptation.

Il faudra d’abord étudier l’accessibilité à des sources extérieures de financement ainsi que les autres considérations et pratiques d’entreprise qui pourraient atténuer le coût des mesures d’adaptation.

Les sources extérieures de financement comprennent les subventions, octrois ou prêts offerts par les gouvernements et les organisations non gouvernementales en vue d’améliorer l’accessibilité des immeubles, les exonérations d’impôt ou mesures incitatives visant à faciliter ces changements, ainsi que les subventions et services directement accessibles par la personne qui a un handicap.

Considérations et pratiques liées à l’entreprise :

  • La taille de l’organisation – Ce qui pourrait être coûteux au point d’entraîner un préjudice injustifié pour un petit employeur pourrait ne pas l’être pour une entreprise d’envergure.
  • Y a-t-il possibilité de récupérer les frais dans le cadre normal des activités de l’entreprise?
  • Les autres divisions, usines ou services de l’entreprise pourraient-ils absorber une partie des coûts?
  • Y a-t-il possibilité de répartir les frais sur plusieurs années ou de les financer au moyen de prêts?
  • Y a-t-il possibilité pour l’employeur de placer dans une réserve une certaine somme annuelle aux fins des mesures d’adaptation?

Tant la réalisation progressive des mesures que l’établissement d’un fonds de réserve ne doivent être envisagés qu’après démonstration, par le responsable de l’adaptation, que les mesures indiquées ne peuvent pas être mises en place dans l’immédiat.

ii) Risques pour la santé et la sécurité

Les exigences en matière de santé et de sécurité peuvent être imposées par une loi ou un règlement, ou découler de règles, pratiques ou procédures établies de façon autonome ou en collaboration avec d’autres entreprises ou services, du même secteur ou de secteurs analogues. Lorsqu’une exigence en matière de santé et de sécurité a pour effet de créer un obstacle pour une personne identifiée par un motif interdit par le Code, il peut s’avérer nécessaire pour l’employeur d’y apporter des modifications ou d’y renoncer.

Si l’abolition d’une exigence en matière de santé et de sécurité risque d’entraîner la violation de la Loi sur la santé et la sécurité au travail (LSST), l’employeur doit trouver des solutions de rechange en fonction des clauses d’équivalence de la LSST. Ces clauses autorisent le recours à des mesures autres que celles qui sont stipulées dans les règlements, à condition que ces mesures de rechange offrent une protection égale ou meilleure aux intéressés. Les mesures de rechange qui sont prises doivent être consignées par écrit.

La modification d’une exigence en matière de santé et de sécurité ou la renonciation à celle-ci peut susciter des risques qu’il faut étudier à la lumière du droit de l’employé à un traitement égal. Si, une fois la mesure d’adaptation en place, ces risques demeurent d’une telle importance qu’ils l’emportent sur les avantages d’une plus grande égalité, ils sont réputés donner lieu à un préjudice injustifié.

En cherchant à déterminer si le fait de modifier une exigence en matière de santé et de sécurité ou d’y renoncer engendre un risque important pour quiconque, l’employeur doit considérer les facteurs suivants :

  • L’employé est-il disposé à assumer le risque dans les cas où est en jeu uniquement sa propre santé ou sa propre sécurité?
  • Le risque est-il évalué après que toutes les mesures d’adaptation ont été prises pour le réduire (comme on s’y attend)?
  • La modification de l’exigence ou la renonciation à celle ci est-elle raisonnablement susceptible d’entraîner un risque grave pour la santé et la sécurité de personnes autres que l’intéressé?
  • Quels sont les autres types de risques assumés au sein de l’entreprise?
  • Quels sont les types de risques tolérés dans la société en général, ainsi qu’en attestent les normes légales concernant, par exemple, la délivrance des permis ou l’exploitation d’entreprises analogues?

Les risques pour la santé et la sécurité de l’employé : Un employeur peut être d’avis que l’adaptation aux besoins d’une personne peut entraîner la modification de l’exigence en matière de santé ou de sécurité ou la renonciation à cette exigence et que cela pourrait compromettre la sécurité de la personne en question. Dans ce cas, il doit faire part de ce risque à la personne afin qu’elle puisse décider en connaissance de cause si elle désire l’assumer. Cette obligation ne vaut que dans les cas où le risque éventuel vise la santé et la sécurité de cette seule personne. Si l’employeur peut démontrer que le risque qui demeure à l’issue d’une adaptation ou de ses solutions de rechange est tel qu’il élimine les avantages d’une égalité accrue, on peut conclure que l’adaptation entraînerait un préjudice injustifié.

Les risques pour la santé et la sécurité d’autrui : Si l’employeur est d’avis que la modification d’une exigence en matière de santé et de sécurité ou la renonciation à cette exigence entraînerait un risque pour la santé et la sécurité d’autrui, il doit évaluer le risque en question. Au moment d’évaluer la gravité de ce risque, il doit tenir compte des autres types de risques assumés au sein de l’entreprise. L’évaluation des risques potentiels créés par les mesures d’adaptation doit se faire à la lumière de ces autres sources de risques plus répandues sur les lieux de travail.

La gravité du risque doit être établie en supposant que des précautions convenables ont été prises afin de réduire ce risque. En établissant la gravité du risque, l’employeur peut prendre en compte les facteurs suivants :

  • La nature du risque : quel tort pourrait s’ensuivre, le cas échéant?
  • La gravité du risque : quelle serait la gravité du tort causé, le cas échéant?
  • La probabilité du risque : quelle est la probabilité que le tort s’ensuive effectivement? S’agit-il d’un risque réel, ou purement hypothétique? Des retombées fréquentes sont-elles à prévoir?
  • L’étendue du risque : quelles sont les personnes qui en subiraient les conséquences?

Si le risque de causer du tort est minime et s’il est peu probable que le tort se concrétise, le risque ne doit pas être considéré comme grave. Si la sécurité publique est en jeu, l’employeur doit tenir compte du nombre de personnes qui pourraient subir les retombées du risque et de la probabilité que le risque devienne réalité.

iii) Qu’en est-il d’autres facteurs qui ne sont pas énumérés dans le Code?

Certaines décisions judiciaires et décisions d’arbitre prises au cours de procédures de griefs laissent supposer que des facteurs tels que l’ancienneté ou l’incidence sur d’autres membres d’un syndicat peuvent être pris en considération dans l’évaluation visant à établir le préjudice injustifié. Cependant, la Commission maintient que le Code mentionne seulement trois facteurs à prendre en compte dans l’évaluation du préjudice injustifié (le coût, les sources extérieures de financement, et la santé et la sécurité). Les autres facteurs ne sont pas pertinents, sauf dans la mesure où ils peuvent être insérés dans ces trois considérations.

Exemple : Un employeur et un syndicat sont tous deux d’avis que la prise des mesures d’adaptation demandées entraînera un préjudice injustifié aux points de vue de l’ancienneté et du moral des employés. Si rien ne prouve que l’incidence sur d’autres employés ou sur l’ancienneté entraînera un préjudice injustifié compte tenu du coût, du financement et de la santé et de la sécurité, la Commission conclura que les tribunaux ne devraient pas prendre ces autres facteurs en considération.

e) L’obligation d’adaptation : questions pratiques

La présente section aborde certaines des questions courantes auxquelles les employeurs font face lorsqu’ils reçoivent des demandes d’adaptation des employés. Par exemple, quels renseignements l’employeur est-il en droit d’attendre et qu’arrive-t-il lorsqu’une demande d’adaptation est incompatible avec les droits d’une autre personne?

i) Quels renseignements l’employeur est-il en droit d’attendre?

Une demande d’adaptation peut exiger la divulgation de renseignements confidentiels ou de nature très délicate. L’auteur de la demande ne devrait être tenu de fournir que l’information nécessaire pour permettre de préparer le terrain et de répondre à la demande d’adaptation de façon appropriée.

Dans certains cas, la nécessité de prendre des mesures d’adaptation est évidente et aucune documentation spéciale n’est requise. Par exemple, les personnes qui circulent en fauteuil roulant auraient de la difficulté à entrer dans un édifice accessible par un escalier et les employées enceintes ont souvent besoin de prendre plus de pauses pour se rendre aux toilettes. Même lorsqu’une certaine documentation se révèle nécessaire, une « chasse à l’information » n’est pas pour autant justifiée. Par exemple, une demande visant à faire adapter du matériel informatique pour tenir compte d’une baisse de la vue ne justifie pas généralement le besoin d’examiner le dossier médical complet de l’auteur de la demande. L’emploi d’une approche avisée pour obtenir la documentation voulue protège la vie privée de l’auteur de la demande et protège la personne qui acquiesce à la demande contre toute plainte potentielle. Toutes les parties doivent faire preuve de bonne foi en demandant et en donnant l’information.

L’employeur peut demander de plus amples renseignements concernant la demande d’adaptation dans les circonstances suivantes :

  • la demande d’adaptation n’indique pas clairement un besoin lié à un motif prévu au Code;
  • il est nécessaire d’obtenir de plus amples détails sur les limites ou les restrictions de l’employé pour pouvoir déterminer quelles seraient les mesures d’adaptation appropriées;
  • il existe une raison objective de mettre en doute le bien-fondé de la demande d’adaptation.

ii) Quels documents l’employeur devrait-il conserver et pendant combien de temps?

L’employeur doit conserver les types de renseignement suivants :

  • la demande d’adaptation;
  • tout document fourni par l’auteur de la demande ou par des spécialistes;
  • les notes prises lors des réunions;
  • les autres solutions d’adaptation qui ont été examinées;
  • la mesure d’adaptation qui a été prise.

Afin que les employés soient suffisamment en confiance pour présenter leurs demandes d’adaptation, ils doivent avoir la certitude que les renseignements fournis demeureront confidentiels et seront communiqués seulement dans le but de permettre la prise des mesures d’adaptation. Les renseignements personnels doivent être conservés en lieu sûr, ailleurs que dans les dossiers du personnel, et être communiqués uniquement aux personnes qui en ont besoin pour prendre les mesures d’adaptation ou pour enquêter dans l’éventualité d’une plainte en matière de droits de la personne pouvant découler de la demande d’adaptation et de la réponse de l’employeur. Ces dispositions devraient être expliquées aux employés dans la politique et la procédure relatives à l’adaptation. Consulter la section IV-1a(iv) – « Politique et procédures en matière de mesures d’adaptation ».

Sous réserve des dispositions législatives et des règles relatives à la protection de la vie privée qui sont stipulées dans la Loi sur les normes d’emploi, ces documents doivent être conservés tant et aussi longtemps qu’ils répondent aux objectifs suivants :

  • aider la partie responsable de l’adaptation à prendre les mesures d’adaptation appropriées (tout plan d’adaptation peut nécessiter une mise à jour à mesure que les besoins changent);
  • documenter la réponse de l’employeur aux questions soulevées par l’employé en matière de droits de la personne et à des demandes d’adaptation dans l’éventualité d’une action ou d’une audience en cour. Les documents ne devraient pas être détruits avant l’expiration de toute période de restriction ou, lorsqu’une action ou une plainte a été introduite, tant que celle-ci n’a pas pris fin.

La Loi sur les normes d’emploi stipule que les documents relatifs au congé d’un employé doivent être conservés pendant trois ans après la fin du congé et que d’autres types de documents doivent l’être pendant trois ans après la cessation d’emploi. Ces délais minimaux doivent être prolongés lorsqu’une plainte en matière de droits de la personne est déposée. L’employeur doit conserver tous les documents relatifs à la plainte et peut être tenu responsable si des documents pertinents sont détruits. En détruisant prématurément des documents relatifs à une adaptation, l’employeur risque de ne pas pouvoir prouver qu’il a pris des mesures d’adaptation appropriées quant au processus et à la substance, ni établir l’existence du préjudice injustifié.

Exemple : En 2002, un employeur a pris des mesures d’adaptation à l’endroit d’un employé, notamment en lui accordant un congé. Cet employé est retourné au travail au printemps 2003 et a été renvoyé à l’automne 2005. Au cours de la réunion tenue au moment de la cessation d’emploi, l’employé a déclaré son intention de déposer une plainte en matière de droits de la personne. Cependant, avant la réception de la plainte et conformément aux politiques de l’entreprise, tous les documents d’emploi concernant les mesures d’adaptation et le congé de l’employé ont été détruits au début de 2006.

Une plainte en matière de droits de la personne est reçue au cours de l’été 2006. L’employé prétend que l’employeur n’a pris aucune mesure d’adaptation concernant son handicap en 2002 et en 2003, et que ce facteur a contribué à sa cessation d’emploi en 2005. L’affaire n’est portée devant un tribunal des droits de la personne que beaucoup plus tard. L’employeur s’est sans doute acquitté de ses obligations en vertu du Code et la cessation d’emploi a peut-être été non discriminatoire, mais lorsque l’affaire sera instruite, l’employeur aura du mal à le prouver sans les documents qui ont été créés lorsque les incidents se sont produits.

iii) Qu’arrive-t-il si un employé ne peut pas satisfaire à une norme, même après l’adaptation?

Si un employé ne semble pas pouvoir satisfaire à une norme, même lorsque des mesures d’adaptation ont été prises, l’employeur doit prendre un certain recul afin de s’assurer que les exigences sont justifiées. Pour obtenir de plus amples renseignements sur la façon d’évaluer les exigences d’un poste, consulter la section IV-2 – « Établissement des exigences professionnelles ».

iv) La prise de mesures d’adaptation malgré l’incompatibilité apparente des droits

Un employeur peut se trouver aux prises avec une situation où la demande d’adaptation d’un employé semble incompatible avec un autre droit prévu en vertu du Code. Il peut s’agir des droits d’autres employés ou de ceux des personnes qui constituent la clientèle de l’entreprise.

Exemple : Conformément à sa responsabilité d’offrir un traitement égal en matière de services en vertu du Code, un hôpital fournit une vaste gamme de services, y compris l’avortement. Cependant, l’hôpital est également tenu de prendre en compte les besoins liés aux croyances des médecins et des infirmiers, qui peuvent demander à être dispensés de fournir de tels services pour des motifs religieux.

Ce cas diffère des situations où une personne ou un groupe a des besoins prévus au Code dont la prise en compte est contestée par d’autres personnes qui ne revendiquent pas elles-mêmes un droit protégé par le Code ou un droit prévu par la Charte. Les droits protégés par le Code doivent être respectés sans égard à d’autres considérations telles que les préférences de la clientèle ou l’incompatibilité avec une convention collective.

Exemple : Des employées musulmanes présentent une demande d’adaptation afin d’obtenir la permission de porter un foulard de tête avec leur uniforme. Les employés masculins non musulmans se plaignent du fait qu’il ne leur est pas permis de porter une casquette de baseball et demandent pourquoi ces employées bénéficient d’un traitement spécial. Il n’y a ici aucune incompatibilité entre l’obligation de prendre des mesures d’adaptation et un autre droit prévu au Code.

Les employeurs ont la responsabilité de prendre des dispositions à l’avance afin de pouvoir accommoder les utilisateurs de services et les employés qui ont des besoins en matière d’adaptation. Si une entreprise fournit des services au public, elle doit les fournir à tous de façon égale et sans discrimination. Cette question demeure distincte des obligations d’une entreprise envers ses employés. Le fait qu’un employeur ait pris des mesures d’adaptation pour ses employés ne constitue pas forcément une défense contre les allégations d’un utilisateur de services qui se plaint d’avoir fait l’objet de discrimination parce qu’il a reçu un niveau de service inférieur ou s’est vu refuser un service.

Exemple : Un conducteur employé par une entreprise est chargé de passer prendre un homme aveugle avec son chien. Le conducteur, qui est musulman, ne permet pas au chien de monter dans la voiture. Il affirme que la foi musulmane proscrit tout contact avec les chiens et refuse donc de conduire l’homme. La situation se traduit par un déni de service et une plainte pour atteinte aux droits de la personne fondée sur le handicap est déposée. L’employeur ne peut pas fonder sa défense uniquement sur les besoins religieux de l’employé musulman. Il devra prouver qu’il a pris des dispositions pour éviter tout déni de service, même s’il lui faut prévoir des mesures d’adaptation pour certains de ses conducteurs, sous réserve de la norme du préjudice injustifié.

Ces types de situation liées à des droits concurrents soulèvent des problèmes complexes et font actuellement l’objet de travaux de recherche et d’élaboration de politiques à la Commission. Avant d’entreprendre une action qui priverait un employé ou un utilisateur de services de toute possibilité d’exercer ses droits en vertu du Code, l’employeur doit s’assurer d’examiner avec soin des solutions créatives qui pourraient lui permettre de satisfaire aux besoins des deux parties. Les employeurs qui se trouvent dans une telle situation sont invités à communiquer avec la Commission pour obtenir des conseils.

v) Réintégration d’un emploi après une absence liée à un motif prévu au Code

 Toute personne qui revient au travail après une absence liée à un motif prévu au Code, telle qu’un congé d’invalidité, un congé de maternité ou un congé permettant de s’occuper d’un parent par suite d’une urgence médicale, bénéficie de la protection du Code. Elle doit en principe pouvoir réintégrer le dernier emploi occupé avant son départ ou un emploi analogue, sous réserve d’un préjudice injustifié. Par conséquent, il sera souvent nécessaire de remplacer l’employé de façon temporaire seulement et de lui conserver son poste jusqu’à son retour. Si l’employé est remplacé de façon permanente et n’a aucune possibilité de revenir au travail, il sera considéré que l’employeur ne s’est pas acquitté de son obligation d’adaptation.

Exemple : Une employée informe son employeur qu’elle sera absente de son lieu de travail pendant un an au cours de son congé de maternité et de son congé parental. Cependant, l’employeur dote le poste à titre permanent et à son retour, l’employée apprend qu’elle doit postuler un autre emploi vacant car le sien n’est plus disponible. Les droits qui sont conférés à cette employée en vertu du Code n’ont pas été respectés.

La prise en compte des besoins fait partie intégrante du droit à un traitement égal des personnes qui réintègrent un emploi. Lorsqu’il est avisé qu’un employé a l’intention de réintégrer son emploi, l’employeur doit déterminer s’il existe des exigences en matière d’adaptation, que ce soit à court ou à long terme. L’employeur et le syndicat doivent collaborer pour tenir compte des besoins des employés qui reviennent au travail après une absence liée à un motif prévu au Code. Toutes les parties concernées par le processus d’adaptation doivent connaître leurs obligations et leurs responsabilités. Consulter la section IV-8c) – « Vue d’ensemble des obligations et responsabilités ».

Même si des modifications ont été apportées au poste ou au lieu de travail pour des raisons commerciales légitimes pendant l’absence de l’employé, l’employeur est tenu d’examiner d’autres options pour s’assurer que l’employé n’est pas pénalisé à cause de son absence liée à un motif prévu au Code.

Exemple : Une employée occupe le poste de coordonnatrice des programmes dans une école privée au moment où elle prend congé. À son retour au travail, elle apprend que son poste a été « fermé » en raison d’une diminution des inscriptions et de difficultés financières. L’employée aurait pu travailler comme enseignante puisqu’elle a donné des cours complexes dans le passé, mais cette possibilité n’est pas envisagée. Il y a discrimination parce que l’employeur n’avait aucune raison commerciale légitime de ne pas offrir cette possibilité à l’employée lorsque le poste qu’elle occupait précédemment a été éliminé.

vi) Demandes d’adaptation liées à la tenue vestimentaire :

Si la nature de l’emploi soulève des problèmes valides de santé ou de sécurité, un employeur peut légitimement imposer une certaine tenue vestimentaire. Par exemple, les travailleurs de la restauration peuvent être obligés de couvrir leurs cheveux avec un filet ou toute autre coiffure appropriée, ou les travailleurs d’un chantier de construction peuvent être tenus de porter des vêtements de protection. Les facteurs que l’employeur doit prendre en considération pour toute demande d’adaptation liée au Code en ce qui concerne la tenue vestimentaire sont les suivants :

  • la nature exacte de la demande;
  • le motif du Code qui s’applique;
  • la raison justifiant le Code vestimentaire ou le port de l’uniforme ou d’équipement de sécurité;
  • les mesures envisageables pour tenir compte des besoins d’une personne, y compris d’éventuelles solutions de rechange;
  • les facteurs de santé et de sécurité entrant en jeu, aussi bien pour la personne qui fait la demande d’adaptation que pour d’autres employés, et la preuve que ces risques entraînent un préjudice injustifié pour l’employeur.

Sexe : Des mesures d’adaptation doivent être prises pour tenir compte des besoins liés à la grossesse.

Croyance : En règle générale, l’employeur qui impose le port d’un uniforme sans aucune justification aux plans de la santé ou de la sécurité doit modifier cette exigence de façon à permettre à une personne croyante et pratiquante de se conformer aux exigences vestimentaires de sa religion.

Exemple : Un employeur exige de son personnel au comptoir le port d’un uniforme qui comprend un chapeau. Une employée musulmane se couvre la tête d’un foulard pour des motifs religieux. L’employeur a l’obligation de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de l’employée et de l’autoriser à porter le foulard plutôt que la coiffure de l’uniforme.

Même lorsque certains articles vestimentaires constituent une exigence professionnelle justifiée, l’employeur doit modifier cette exigence, sous réserve d’un préjudice injustifié. Il doit s’efforcer de modifier la tenue exigée de façon à permettre à la personne de porter en toute sécurité la tenue prescrite par sa religion.

Tout employeur doit agir avec circonspection s’il s’agit d’interdire à un employé sikh de porter la dague cérémoniale, ou kirpan, au travail. Dans la plupart des cas, on peut atténuer les risques pour la santé et la sécurité en prenant par exemple des dispositions pour exiger que la dague soit bien dissimulée. Consulter la section IV-8f(ii) : « Croyance – Prise en compte des besoins des personnes croyantes et pratiquantes ».

vii) Modalités de travail flexibles – Pauses et journées de congé :

Dans le passé, la participation au monde du travail suivait le principe du « tout ou rien », c’est-à-dire travail à temps plein, retraite ou congé autorisé. Pour les employés plus âgés qui, tout au long de leur vie active, ont travaillé à temps plein, le fait de passer du jour au lendemain à un arrêt absolu d’activité constitue cependant un changement majeur, qui a des conséquences sociales, psychologiques et financières. En outre, il y a des répercussions importantes lorsque des employés ayant des responsabilités en matière de prestation de soins ou un handicap sont obligés de cesser complètement de travailler, alors qu’ils pourraient continuer de contribuer à la productivité de l’organisme à temps partiel.

L’approche idéale consiste à prévoir inclusivement des moyens tels que des heures de travail flexibles, le mentorat, le travail à temps partiel et la retraite progressive, de manière à permettre l’intégration de tous les employés, y compris les personnes handicapées ou celles qui ont des responsabilités en matière de prestation de soins, dans le milieu de travail. On peut ensuite prendre les mesures d’adaptation nécessaires pour tenir compte d’autres besoins éventuels.

Certains employés observent des périodes de prière à des moments précis de la journée ou prennent part à des observances religieuses à un jour particulier. D’autres ont des rendez-vous ou des obligations qui peuvent les retenir pendant toute une journée ou une partie de la journée. Par exemple, une employée handicapée peut avoir besoin d’aller voir son médecin de famille ou un travailleur dont le fils a un handicap grave peut avoir besoin de quitter le travail plus tôt pour s’occuper de son fils après l’école. Un travailleur plus âgé peut aussi être obligé de prendre des périodes de repos supplémentaires au cours de la journée.

Ces types de besoins protégés en vertu du Code peuvent entrer en conflit avec l’horaire normal de l’entreprise ou le déroulement des activités courantes. L’employeur doit cependant prendre des mesures d’adaptation, sous réserve d’un préjudice injustifié. Il peut à cet effet, entre autres, modifier sa politique concernant les pauses, instaurer un horaire souple ou réserver une aire ou un local privé aux dévotions ou à l’allaitement. Ainsi, les employés qui ont besoin de pauses pour des raisons prévues au Code devraient pouvoir les prendre sans perdre leur pause-repas ou faire des heures supplémentaires pour compenser, à moins que l’employeur puisse prouver qu’il en subit un préjudice injustifié.

L’une des mesures d’adaptation courantes consiste à prévoir une certaine souplesse dans l’horaire de travail, afin de permettre aux employés de modifier ou de reporter leurs jours de travail en fonction de leurs observances religieuses ou d’autres besoins prévus au Code. L’employeur peut s’acquitter de son obligation d’adaptation en apportant certaines modifications à l’horaire; dans certains cas, ces modifications représentent la mesure d’adaptation la plus raisonnable et la plus équitable.

Exemple : Les adventistes et les Juifs observent le sabbat depuis le coucher du soleil, le vendredi, jusqu’au coucher du soleil, le samedi. Les adeptes de ces religions ne peuvent travailler pendant cette période. L’employeur répond à ces besoins en aménageant un horaire souple.

Consulter la section IV-8f(ii) intitulée « Croyance – Prise en compte des besoins des personnes croyantes et pratiquantes », laquelle comprend une sous-section qui porte sur les demandes de congé payé pour observances religieuses.

viii) Demandes d’adaptation liées au stress :

Le stress n’est pas en soi un motif prévu au Code, bien qu’il puisse être lié à des motifs énumérés au Code, tels que le handicap, l’état familial ou le sexe (grossesse), ou en découler. Le stress peut se rapporter à des événements positifs, comme un mariage, un déménagement ou un nouvel emploi. Un employé peut aussi ressentir un stress négatif en rapport avec des événements tels que la maladie, le décès d’un être cher, des problèmes familiaux ou la discrimination et le harcèlement au travail.

Certains personnes emploient le terme « stress » pour faire référence en « langage clair » à des troubles médicaux réels, qu’ils soient physiques (comme l’hypertension) ou psychologiques (comme l’anxiété ou la dépression). La stigmatisation liée à la maladie ou l’ignorance d’une terminologie médicale particulière incite parfois à parler de « stress » au lieu de handicap. Ces troubles peuvent équivaloir ou non à des handicaps exigeant des mesures d’adaptation. Dans d’autres situations, le stress peut être le symptôme d’un handicap. Avec le temps, il peut également provoquer un handicap ou des problèmes de santé graves, y compris des maladies mentales ou la toxicomanie.

Dans certains cas, même s’il n’équivaut pas à un handicap, le stress peut nécessiter la prise de mesures d’adaptation parce qu’il s’apparente à un autre motif prévu au Code. Par exemple, un médecin peut conseiller à une femme enceinte éprouvant beaucoup de stress de demander une adaptation à cause des craintes que suscite l’effet du stress sur la grossesse.

Le stress est souvent un effet secondaire survenant lorsqu’une approche inflexible ou punitive est adoptée pour tenir compte du handicap d’un employé ou d’un autre besoin énuméré au Code. Dans certains cas, il peut s’ensuivre une prolongation de l’absence de l’employé à son travail.[52]

Exemple : Un employé souffrant du syndrome de fatigue chronique est tenu de présenter un billet du médecin à chacune de ses absences, même si son employeur a déjà un billet attestant que l’employé a besoin de s’absenter régulièrement chaque mois. Cette règle ne s’applique pas à d’autres employés ayant aussi un handicap et a pour effet de prolonger les absences de l’employé du bureau. Lorsque l’employé fait part de ses préoccupations à ses supérieurs, ceux-ci ne lui donnent que des réponses évasives. Ce sentiment de frustration constitue une source de stress qui aggrave ses symptômes et augmente le nombre de ses absences de quatre à six par mois. Un tribunal conclut à la discrimination.

Lorsqu’une personne demande des mesures d’adaptation pour des raisons de « stress », il serait sensé que l’entreprise considère les points suivants :

  • Existe-t-il un besoin d’adaptation lié à un handicap?
    • De quelle nature sont les limites de la personne?
  • Existe-t-il une autre situation exigeant des mesures d’adaptation?
    • Par exemple, les sources de stress se rapportent-elles à la grossesse, à des responsabilités en matière de prestation de soins ou à la difficulté de trouver un juste milieu entre des besoins d’ordre religieux et les règles du milieu de travail?
    • Comment peut-on répondre aux besoins de l’employé en matière d’adaptation?
    • À quelle source d’aide extérieure l’employé peut-il aussi être adressé?
  • Y a-t-il une autre source de stress en milieu de travail qui exige des mesures de suivi supplémentaires?
    • Quelles conditions de travail peuvent intensifier le stress?
    • L’employé a-t-il fait l’objet de discrimination et de harcèlement? Si c’est le cas, comment ces problèmes ont-ils été réglés?

Outre les mesures d’adaptation visant à tenir compte de besoins individuels, une approche axée sur le design inclusif peut aider un employeur à réviser les exigences d’un emploi pour augmenter la satisfaction au travail et réduire le stress pour tous les employés. La section IV-2c) – « Penser au stress lors de l’aménagement des postes » décrit les types de conditions de travail qui sont associés à des degrés de stress élevés pour les employés.

Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), on peut réduire le stress professionnel par différentes interventions visant soit à améliorer la capacité d’un employé de composer avec des facteurs de stress au travail, soit à réduire les facteurs de stress en milieu de travail.[53] Il a été démontré que les programmes de gestion du stress sont efficaces pour améliorer la santé mentale des employés et leur aptitude à composer avec le stress. L’OMS propose les moyens suivants pour réduire les sources de stress :

  • modifier les tâches du poste ou les conditions de travail, par exemple en assurant l’enrichissement des tâches, en diminuant la charge de travail ou en améliorant les postes de travail, notamment par l’ergonomie ou la réduction du bruit;
  • clarifier les rôles et améliorer les relations sociales grâce à la résolution des conflits ou à la communication afin d’atténuer encore davantage les sources de stress;
  • appliquer simultanément ces deux stratégies en les adaptant aux employés et au lieu de travail.

f) Préoccupations particulières en rapport avec des motifs visés par le Code

i) Âge (travailleurs âgés) :

Les travailleurs âgés peuvent avoir besoin de mesures adaptées pour des motifs tels qu’un handicap, et de congés pour raisons familiales et matrimoniales (par exemple, la nécessité de s’occuper d’un membre de la famille ou du conjoint qui est malade). Ces obligations existent sans égard à l’âge des employés; cependant, à cause du rapport qui existe entre l’âge et le handicap, ces besoins peuvent se manifester parallèlement au vieillissement des travailleurs et des membres de leur famille.

Lorsqu’un travailleur âgé effectue la transition vers la retraite, son employeur peut être appelé à prendre des mesures d’adaptation en offrant un horaire variable et des conditions de travail flexibles, des modalités de travail à temps partiel et le partage d’emploi. Dans certains cas, une personne retraitée peut être réengagée à titre de conseiller ou en vertu d’un contrat à court terme. Il peut aussi se révéler nécessaire de modifier des postes de travail, de fournir une formation complémentaire ou de prendre d’autres moyens pour aider les travailleurs âgés à s’acquitter des tâches essentielles de leur emploi. Les capacités du travailleur âgé doivent être évaluées de façon individuelle pour assurer que l’adaptation répond à des exigences et à des aptitudes changeantes.

Exemple : Un travailleur âgé trouve difficile de répondre aux exigences physiques d’une tâche. L’employeur devrait affecter cette tâche à un autre membre du personnel s’il ne s’agit pas de fonctions essentielles du poste, ou, dans le cas contraire, trouver d’autres solutions, à moins qu’il n’en découle un préjudice injustifié.

ii) Croyance : Prise en compte des besoins des personnes croyantes et pratiquantes :

La croyance d’une personne peut entrer en conflit avec une exigence, qualité requise ou pratique liée à l’emploi. Dans pareil cas, l’adaptation aux besoins peut nécessiter la dérogation à tout ou partie d’une règle ou sa modification. Le plus souvent, les demandes d’adaptation concernent :

  • la tenue vestimentaire;
  • les règles relatives aux pauses;
  • le recrutement et les demandes d’emploi;
  • l’horaire des quarts de travail et les heures de travail;
  • la modification de l’horaire et les absences pour observances religieuses.

L’employeur est dans l’obligation de tenir compte des besoins liés à la religion d’une personne si les règles ou pratiques en vigueur sur un lieu de travail ont sur celle-ci un effet préjudiciable ou si elles créent des conditions auxquelles la personne ne peut pas se conformer pour un motif prévu au Code.

Exemple : Un certain employeur préfère engager des hommes qui ont les cheveux courts. Cependant, certaines religions interdisent aux hommes de se couper les cheveux. L’employeur agit donc de façon discriminatoire, sous réserve d’une exception légale aux termes du Code.

Au moment d’évaluer une demande d’adaptation liée à la croyance, l’employeur doit éviter de contester la validité de la demande en s’appuyant sur son opinion personnelle de la religion de l’employé ou sur l’opinion des autres, même des experts. En effet, le critère à satisfaire consiste à déterminer si l’employé exerce sa croyance de façon sincère et conforme à la religion, et non si l’employé interprète correctement les principes de sa croyance ou si d’autres personnes ont la même interprétation.[54] Consulter la section III-3j) – « Croyance » dans la partie intitulée « Motifs de discrimination illicites- définitions et portée des dispositions relatives à la protection conférée par le Code ».

Exemple : Un employé demande un congé pour observances religieuses. L’employeur se renseigne et apprend auprès de certains experts que la foi ou la croyance de l’employé ne comporte pas cette exigence. L’employeur agirait probablement de façon discriminatoire en se fondant sur cette raison pour refuser la demande d’adaptation.

Les Sikhs sont autorisés à porter la dague cérémoniale, appelée kirpan, en vertu de la législation sur les droits de la personne et dans la plupart des cas, ce droit n’est pas considéré comme un risque pour la santé et la sécurité équivalant à un préjudice injustifié. Au cours d’une affaire particulière, un employeur a suggéré à l’auteur de la plainte de porter une réplique en plastique ou de coudre le kirpan dans sa gaine. Cependant, aucune de ces adaptations n’a été jugée acceptable par le tribunal. On a plutôt conclu qu’il est juste de s’attendre à ce que le kirpan soit dissimulé, bien engainé et de dimensions raisonnables.

De même, le droit de porter une coiffure religieuse telle que la kippa ou le turban est protégé en vertu du Code, sous réserve des critères liés aux exigences professionnelles justifiées et à la norme du préjudice injustifié. Les employeurs doivent s’attendre à devoir prendre des dispositions centres sur un design inclusif, à prendre des mesures d’adaptation et à évaluer individuellement les risques pour la santé et la sécurité en fonction de la norme du préjudice injustifié lorsqu’un employé demande à être exempté de l’exigence du casque de protection pour pouvoir porter une coiffure religieuse. Il est préférable d’éviter toute tentative pour limiter le port des coiffures religieuses en raison de préoccupations liées à l’image ou aux préférences de la clientèle. Consulter la section IV-7c(ii) – « Code vestimentaire ».

Il peut également y avoir discrimination lorsqu’un employeur ne prend aucune disposition visant à fournir une adaptation liée à la croyance, même s’il offre des mesures d’adaptation fondées sur d’autres motifs, tels que le handicap.

Demandes de jours de congé payés pour observances religieuses : Lorsque des employés demandent des jours de congé pour observances religieuses ou d’autres absences liées au Code, les employés qui sont tenus de prendre ces journées sans salaire peuvent faire l’objet de discrimination. De nombreuses plaintes pour atteinte aux droits de la personne procèdent de demandes de congé payé pour des jours d’observance religieuse autres que ceux qui sont prévus à titre de fêtes légales. Conformément à la Loi sur les normes d’emploi, les employés ont maintenant droit à huit fêtes légales obligatoires en Ontario (le jour de l’An, le Vendredi saint, la fête de Victoria, la fête du Canada, la fête du Travail, l’Action de grâces, le jour de Noël et le lendemain de Noël). Un autre congé survenant en février, soit le « jour de la Famille », a été instauré en 2008. Cet horaire est traditionnellement fondé sur le calendrier chrétien et deux de ces congés tombent sur des jours d’observance religieuse chrétienne : le Vendredi saint et Noël. Certains employeurs offrent aussi le congé payé pour un troisième jour d’observance religieuse chrétienne, le lundi de Pâques.

La Cour suprême du Canada a déclaré que le calendrier moderne est maintenant considéré comme laïque, c’est-à-dire que les fêtes légales sont instaurées comme des « jours de repos » sans but religieux particulier. Cependant, la Cour suprême a également affirmé que ce calendrier laïque a des conséquences discriminatoires sur les non-chrétiens. En effet, sans les mesures d’adaptation de l’employeur, les non-chrétiens doivent prendre congé et perdre le salaire d’une journée pour observer leur jour saint. Par contraste, la majorité de leurs collègues chrétiens ont leurs jours saints reconnus comme fêtes légales.[55]

Dans l’affaire susmentionnée, trois enseignants juifs avaient besoin de prendre un jour de congé pour Yom Kippour. L’employeur a consenti à leur donner un congé sans salaire. Les enseignants ont formulé un grief, alléguant que cette décision était discriminatoire parce qu’elle les obligeait à renoncer au salaire d’un jour pour observer leurs pratiques religieuses. La Cour suprême du Canada a souscrit à ce point de vue. La perte du salaire d’un jour aurait été considérable pour les enseignants, qui étaient rémunérés selon un horaire de 200 jours de travail par an, mais rien ne prouvait que l’obligation de payer le congé imposerait un fardeau financier déraisonnable à l’employeur.

La Commission est d’avis que les employés devraient bénéficier de jours religieux payés dans la même mesure que les jours religieux chrétiens qui sont aussi des fêtes légales, à moins que l’employeur puisse montrer qu’il en subirait un préjudice injustifié.[56] L’employé aurait droit à deux congés payés si le lieu de travail observe seulement les fêtes chrétiennes du Vendredi saint et de Noël. Il aurait droit à un jour de congé payé supplémentaire si son lieu de travail offre un congé payé le lundi de Pâques.

La question est donc de savoir ce que les employeurs sont censés faire concernant les demandes de congés supplémentaires qui sont fondées sur la croyance. Il est clair que l’employeur a l’obligation de prendre des mesures d’adaptation sous réserve d’un préjudice injustifié. Cela dit, il y a plus d’une façon de satisfaire à cette obligation. L’approche doit être adaptée aux circonstances et aux besoins de l’employeur et de l’employé, mais quelques options peuvent être envisagées. Les mesures possibles pourraient comprendre des congés payés additionnels tels que des congés mobiles ou des congés pour raisons familiales, si ces dispositions existent dans la politique de l’entreprise ou la convention collective. Les congés non payés et la modification de l’horaire sont d’autres options possibles.

Selon la Loi sur les normes d’emploi, lorsqu’un employé en convient par écrit, il peut travailler le jour d’une fête légale au taux normal (c’est-à-dire sans prime de jour férié) et prendre un congé payé un autre jour.

Une autre option pourrait être de faire travailler l’employé pendant un nombre égal d’heures un autre jour n’étant pas régulièrement prévu à l’horaire (par exemple, un samedi ou un dimanche) et de compenser en lui accordant son congé payé un autre jour. Cette solution peut fonctionner si l’employé a suffisamment de travail productif à faire au cours de la journée non régulière.

Il peut être possible de permettre à un employé d’accumuler des heures de « réserve » en modifiant son horaire et d’utiliser cette réserve afin de prendre des jours de congé payés pour observances religieuses. Par exemple, l’employé peut faire une « semaine de travail comprimée » (en travaillant plus d’heures par jour, en raccourcissant son dîner, et ainsi de suite) et appliquer ce temps supplémentaire à des congés payés. La Cour d’appel a conclu dans une affaire particulière que l’employeur s’était acquitté de son obligation d’adaptation en permettant à son employé de modifier son horaire pour accumuler du temps au cours d’une semaine de travail comprimée et de s’en servir pour observer des jours saints additionnels.[57]

Exemple : La politique d’un employeur prévoyait deux congés payés et permettait la semaine de travail comprimée, de sorte qu’en temps normal, un employé travaillant une demi-heure de plus par jour pouvait prendre une journée de congé au bout des trois semaines nécessaires pour la gagner. L’employé, membre de la Worldwide Church of God, avait besoin de 11 jours pour observances religieuses et l’employeur a convenu qu’il pouvait accumuler les heures de sa semaine de travail comprimée et les utiliser à sa guise. L’employeur a rempli son obligation de prendre des mesures d’adaptation.

En résumé, il est judicieux pour l’employeur d’accorder deux ou trois jours de congé payés pour observances religieuses, et de faire preuve de sens pratique et de souplesse en cherchant des solutions lorsque des employés demandent des congés additionnels, sous réserve de la norme du préjudice injustifié.

Dans certaines circonstances, la modification de l’horaire peut soulever des problèmes dans un lieu de travail syndiqué si le syndicat considère que cette mesure va à l’encontre du principe d’ancienneté. Cependant, comme il est mentionné plus haut, le Code a priorité sur les conventions collectives et un syndicat peut être passible d’une action s’il entrave les efforts d’un employeur pour être souple et accommoder ses employés.[58]

iii) Sexe : Prise en compte des besoins des femmes enceintes :

Les besoins particuliers d’une femme enceinte peuvent nécessiter des mesures d’adaptation, notamment pour des traitements d’infertilité, une fausse couche ou un avortement, des complications durant la grossesse, la récupération après l’accouchement et l’allaitement maternel. L’employeur agit de façon discriminatoire en ne tenant pas compte des besoins liés à la grossesse de l’employée.[59]

Exemple : Une employée commence à travailler comme associée aux ventes et tombe enceinte peu après. Elle souffre de nausées et de fatigue. Bien qu’elle soit en mesure de remplir les fonctions de son poste, elle doit s’asseoir pour se reposer de temps à autre. En raison de problèmes de grossesse, elle prend un congé et réduit la durée de sa journée de travail. Ses ventes chutent brusquement et l’employeur la renvoie. La cessation d’emploi est considérée comme discriminatoire parce que l’employeur n’a pas pris en compte l’incidence possible de la grossesse et de la réduction des heures de travail sur le rendement de l’employée.

Les employeurs peuvent tenir compte des besoins des femmes pendant les périodes prénatale et postnatale, y compris pendant l’allaitement, de plusieurs façons sans subir un préjudice injustifié, à savoir :

  • en mutant une femme vers un autre poste de travail de façon temporaire;
  • en l’assignant à des fonctions modifiées;
  • en lui offrant un horaire de travail flexible pour qu’elle puisse aller voir son médecin, y compris pour subir des examens prénatals et postnatals et pour suivre un traitement contre l’infertilité;
  • en l’autorisant à prendre des pauses selon ses besoins – les employées qui ont besoin de pauses pour, par exemple, exprimer du lait ou allaiter, ou pour aller aux toilettes pendant la grossesse devraient normalement pouvoir prendre ces pauses sans que ce temps leur soit retranché, sans être pénalisées et sans devoir faire des heures supplémentaires pour compenser, à moins que l’employeur ne puisse prouver qu’il y a un préjudice injustifié;
  • en créant un milieu propice à l’allaitement, par exemple en autorisant la gardienne ou le gardien à amener le nourrisson au travail pour qu’il soit allaité, en changeant l’horaire de la mère pour exprimer le lait ou allaiter au travail et en aménageant un coin confortable, approprié et ne portant pas atteinte à la dignité où elle peut nourrir son enfant ou exprimer et entreposer du lait maternel au travail (par exemple, un endroit offrant une certaine intimité). Dans certains cas, ceci peut se traduire par un congé autorisé.

L’application d’une règle qui désavantage les femmes qui sont enceintes ou qui peuvent le devenir peut constituer une atteinte aux droits que leur reconnaît le Code. L’employeur doit tenir compte des besoins particuliers de ces femmes, à moins de ne pouvoir le faire sans subir lui-même un préjudice injustifié.

Exemple : Une agente de police avait demandé la permission de travailler en service réduit au dernier stade de sa grossesse. Or, la police, qui avait pour principe de ne pas accorder de modification de service à ses agents ou agentes, rejeta sa demande. La police a par contre offert à l’agente enceinte la possibilité d’une mutation vers un poste administratif à temps partiel, dont la rémunération était bien inférieure à son salaire habituel. Elle aurait pour cela dû démissionner du corps de police. Le refus d’accorder une modification de service s’appliquait à l’ensemble des agents et des agentes, sans exception, mais cette règle avait clairement des conséquences pour les femmes enceintes, du fait que le service actif pose plus de risques pour elles vers la fin de la grossesse. La solution proposée était inacceptable, étant donné qu’un agent de sexe masculin qui ne pouvait travailler en raison d’accusations avait été assigné à un service réduit. On a conclu que la police avait fait de la discrimination fondée sur le sexe.

Dans l’exemple précité, l’employeur, autrement dit la police, appliquait le même principe à tous ses agents et agentes et ne faisait donc a priori pas de discrimination. Toutefois, l’application du principe avait un effet défavorable sur les agentes enceintes et constituait une forme de discrimination fondée sur le sexe.

Le refus d’assigner d’autres fonctions à des employées enceintes, alors que les employés de sexe masculin peuvent se prévaloir de cette possibilité pour des raisons de santé et autres, peut être jugé discriminatoire.

Congé pour grossesse : Obliger une femme enceinte à prendre un congé, en l’absence de toute preuve tangible qu’il existe un risque pour cette employée, peut constituer une pratique discriminatoire. Il est interdit à un employeur d’obliger une femme enceinte à prendre un congé sans d’abord étudier toutes les autres mesures qu’il pourrait prendre pour tenir compte de ses besoins, et cela en consultation avec l’intéressée. L’employeur doit mettre en œuvre les mesures les plus opportunes, sous réserve de la norme du préjudice injustifié.

Si une femme enceinte peut apporter la preuve qu’elle doit s’absenter du travail pour motif de santé à quelque stade que ce soit de sa grossesse, il est interdit de lui réserver un traitement différent ou défavorable par rapport à celui assuré à d’autres employés qui s’absentent pour « motif de santé ».

L’interprétation de « santé » recouvre :

  • la santé physique et psychologique de la femme;
  • la santé, le bien-être, la croissance et le développement du fœtus;
  • la capacité d’une femme de fonctionner en société et notamment d’interagir avec les membres de sa famille, son employeur et d’autres personnes jouant un rôle important dans sa vie.

Le congé de maternité permet aux mères de former des liens affectifs avec leurs enfants et de leur donner toute l’attention dont ils ont besoin au premier stade de leur vie. Les femmes n’ont par ailleurs pas toutes les mêmes besoins physiques et psychologiques après un accouchement, et de ce fait leur durée de récupération varie. Comme chaque femme réagit différemment à la grossesse et à l’accouchement, les demandes d’absence pour des raisons de santé devraient être, en général, évaluées et accordées ou refusées au cas par cas. Les femmes enceintes qui ont besoin d’un congé pour motif de santé à cause de problèmes liés à une grossesse doivent suivre les procédures de demande d’indemnité mises en place par l’employeur et apporter la preuve que le motif de l’absence est valable.

Il se peut que des raisons de santé liées à la grossesse forcent une femme à s’absenter du travail avant ou après son congé de maternité ou son congé parental. Dans ce cas, elle a droit aux prestations d’assurance-santé ou d’assurance-invalidité offertes par son employeur. La décision de prendre un congé d’invalidité de courte ou de longue durée risque toutefois d’influer sur ses droits en matière de congé de maternité ou de congé parental. Consulter la section IV-7j(v) – « Avantages sociaux en relation avec la grossesse (sexe ou handicap)». En l’absence d’un régime de santé au travail ou d’un régime d’assurance individuelle, l’employée peut prendre un congé non payé ou des jours de vacances pour des raisons de santé, y compris sa santé physique et mentale ou la santé et le bien-être du fœtus ou de l’enfant.

Lorsqu’une employée est en congé de maladie, soit pendant la grossesse, soit pendant l’hospitalisation de son enfant prématuré et ce, avant le début du congé de maternité et du congé parental, l’employeur doit en tenir compte au moment de déterminer pendant combien de temps il tiendra ouvert le poste de l’employée. Il n’est pas acceptable pour l’employeur de fixer arbitrairement une date limite un an après la date du départ de l’employée. L’employeur est censé prendre des mesures d’adaptation sous réserve d’un préjudice injustifié, comme il le ferait pour tout employé qui s’absente du travail pendant une période prolongée en raison d’un handicap.

Exemple : La date prévue pour la naissance de l’enfant d’une employée enceinte est le 1er janvier 2006. L’employée tombe en congé le 1er septembre 2005 en raison de complications liées à la grossesse. Elle reçoit les prestations de maladie offertes par son employeur au cours d’une période de repos complet d’un mois et pendant les trois mois d’hospitalisation de son enfant né prématurément en octobre 2005. Elle commence son congé de maternité le 1er février 2006 et reçoit les prestations d’assurance-emploi à partir de cette date. Elle communique avec son employeur pour prendre les dispositions relatives à son retour au travail le 1er février 2007, date à laquelle les prestations d’assurance-emploi et celles du congé parental cesseront de lui être versées. Son employeur lui apprend alors qu’elle n’a plus d’emploi, étant donné qu’elle s’est absentée pendant plus d’un an. L’employée dépose une plainte pour discrimination fondée sur le sexe et l’état familial. L’employeur devra montrer qu’en dotant le poste de façon temporaire afin de le rendre à l’employée à son retour, il subirait un préjudice injustifié.

iv) Prise en compte des besoins des employés ayant des obligations familiales :

La question de l’obligation d’adaptation ne se posera que si un cas probable de discrimination au motif de l’état familial a été démontré. Dans le contexte de l’état familial, l’adaptation est habituellement associée aux besoins en matière de prestation de soins.

En matière d’emploi, l’adaptation joue un rôle central pour surmonter les désavantages auxquels font face les pourvoyeurs de soins et n’est la plupart du temps ni gênante ni coûteuse; c’est plutôt une affaire de flexibilité. Une approche flexible et adaptée représente en dernière analyse un avantage notable pour les employeurs qui veulent attirer et conserver de bons employés,

Généralement, l’obligation d’adaptation ne posera un problème que dans les cas où les règles, les politiques, les pratiques ou les structures institutionnelles, les a priori ou la culture perpétuent ou encouragent le désavantage des personnes identifiées par un état familial particulier. Dans ces circonstances, l’employeur devra montrer que l’exigence est justifiée et que les mesures d’adaptation ont été assimilées au critère et fournies dans la mesure où il n’en résultait pas un préjudice injustifié.

Pour décider si une obligation d’adaptation s’impose, les considérations suivantes peuvent être utiles :

  • La nature de la responsabilité en matière de prestation de soins et le conflit entre cette responsabilité et les règles, exigences, normes, processus et autres facteurs de l’organisme.
    • Plus l’obligation en matière de prestation de soins en cause est importante et plus l’interférence de cette règle, exigence ou facteur est grave, plus il y a de chances qu’une obligation d’adaptation s’impose.
  • Les obstacles systémiques auxquels font face les pourvoyeurs de soins, y compris les effets de recoupement avec les motifs du handicap, de l’âge, du sexe, de l’orientation sexuelle, de la race et des motifs liés à la race, et de l’état matrimonial.
    • Les organismes devraient s’interroger sur les obstacles systémiques qui risquent d’exister dans leur propre établissement et se poser des questions sur la représentation qu’ils se font des personnes avec d’importantes responsabilités en matière de prestation de soins, sur leur culture organisationnelle et sur le caractère inclusif de leurs politiques, procédures et pratiques en matière de prise de décisions.
  • La disponibilité et la pertinence des soutiens sociaux disponibles pour répondre aux besoins des pourvoyeurs de soins.
    • Les pourvoyeurs de soins ne devraient pas être obligés de placer les personnes qu’ils aiment dans des situations de risque notable, de préjudice physique, émotionnel ou psychologique afin de répondre aux besoins de leur employeur.

Un employeur n’a pas besoin d’offrir plus que ce que la personne requiert afin de répondre aux besoins réels identifiés liés à l’état familial. Par exemple, si le changement de l’emploi du temps permet à l’employé de s’acquitter d’une responsabilité importante en matière de prestation de soins, l’employeur n’a pas besoin de lui offrir un jour de congé payé.

Pour un organisme qui n’a pas pris les mesures nécessaires pour examiner et mettre en place des politiques et des pratiques qui soutiennent et incluent les pourvoyeurs de soins, il sera plus difficile de justifier son refus des demandes individuelles de flexibilité. Les employeurs devraient prendre des mesures pour veiller à ce que le lieu de travail soit favorable à la famille, qu’il y règne une culture de vie et de travail positive, et qu’il assure l’intégration des personnes ayant des responsabilités en matière de prestation de soins. Voici certains points à prendre en considération :

  • un énoncé visible exprimé au niveau des cadres supérieurs assurant le soutien continu à un milieu de travail inclusif et bienveillant envers la famille;
  • des programmes d’éducation et de formation pour les cadres et le personnel sur les exigences du Code eu égard à l’état familial;
  • l’élaboration d’une stratégie organisationnelle pour assurer la création d’un lieu de travail inclusif;
  • des programmes et des politiques qui reconnaissent et soutiennent la gamme et la diversité des familles canadiennes contemporaines;
  • l’accroissement de la flexibilité et des options offertes à tous les travailleurs, par exemple des heures flexibles, une semaine de travail comprimée, des heures réduites, le partage de l’emploi, des congés autorisés, des services de garde d’enfants et de soins aux personnes âgées, des programmes d’aide aux employés et des programmes de travail à domicile.

Pour en savoir davantage sur l’adaptation et l’état familial, consulter la politique de la Commission intitulée Politique et directives concernant la discrimination au motif de l’état familial.


[48] Parry Sound, supra note 28.
[49] Renaudsupra note 29.
[50] Meiorinsupra note 6, au par. 65, et Grismersupra note 7.
[51] Voir, par exemple, Datt v. McDonald’s Restaurants (No. 3), 2007 B.C.H.R.T. 324 (Datt).
[52] Keays v. Honda Canada Inc. (2006), 274 D.L.R. (4th) 107 (Ont. C.A.), autorisation d’en appeler à la C.S.C. accordée, [2006] S.C.C.A. No. 470 (Keays) au par. 8. Au moment de la publication, la C.S.C. avait instruit l’affaire mais n’avait pas encore rendu sa décision.
[53] Organisation mondiale de la Santé, « Prevention of Mental Disorders: Effective Interventions and Policy Options, Summary Report », accessible en ligne à : http://www.who.int/mental_health/evidence/en/prevention_of_mental_disorders_sr.pdf
[54] Amselemsupra note 20.
[55] Commission scolaire régionale de Chambly c. Bergevin, [1994] 2 R.C.S. 525 (Chambly).
[56] Commission ontarienne des droits de la personne, Politique sur la croyance et les mesures d’adaptation relatives aux observances religieuses, partie 7.4.
[57] Cette approche a été employée dans l’affaire Ontario (Ministère des Services sociaux et communautaires) c. SEFPO (2000) 50 O.R. (3d) 560 (C.A.).
[58] Renaudsupra note 29.
[59] Brooks, supra note 23.

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