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Mémoire présenté par la CODP au Comité permanent des affaires gouvernementales

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Commission ontarienne des droits de la personne Mémoire présenté au
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES GOUVERNEMENTALES
Objet : Projet de loi 114, Loi prévoyant des mesures contre le racisme
Le 9 mai 2017

La Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) est chargée d’assurer la promotion et l’avancement des droits de la personne et de prévenir la discrimination systémique. Le Code des droits de la personne de l’Ontario (Code) confère plusieurs fonctions à la CODP, y compris le pouvoir de surveiller et de signaler toute situation se rapportant aux droits de la personne en Ontario. Cela inclut le pouvoir d’examiner les lois, règlements et politiques afin d’assurer leur conformité au Code.

La CODP accueille favorablement le dépôt du projet de loi 114, la Loi prévoyant des mesures contre le racisme (projet de loi). La lutte contre le racisme est au cœur des activités de la CODP depuis sa création il y a 56 ans, et nous réclamons depuis longtemps l’élargissement des efforts du gouvernement et de ses organismes à ce chapitre.

Nous sommes heureux de constater que la nouvelle loi proposée exige l’engagement soutenu du gouvernement envers la lutte contre le racisme et qu’elle prévoit plusieurs mesures clés de lutte contre le racisme, ciblées antérieurement par la CODP. Parmi ces mesures figurent l’adoption d’une stratégie antiraciste mesurable, dotée de cibles et d’indicateurs, l’application d’une perspective antiraciste aux travaux d’élaboration, de mise en œuvre et d’évaluation des politiques gouvernementales, ainsi que la collecte, l’analyse et la divulgation de données relatives à la race.  

La CODP est aussi heureuse de constater que le Plan stratégique triennal de l’Ontario contre le racisme, intitulé Une meilleure façon d’avancer, reconnaît les aspects intersectionnaux du racisme et de la discrimination, et contient des initiatives ciblant les formes systémiques de racisme ayant des répercussions sur de nombreux groupes racialisés, y compris le racisme à l’égard des personnes noires et autochtones. Le Plan stratégique aborde également la hausse inquiétante de l’antisémitisme et de l’islamophobie au sein de la société.

Bien que le cadre d’évaluation de l’impact de l’action contre le racisme mis de l’avant dans le projet de loi représente un pas positif vers l’avant, la CODP recommande de prendre les mesures qui suivent pour faire en sorte qu’il atteigne ses buts importants de la façon la plus efficace possible.

Sommaire des recommandations

  1. Faire référence au Code des droits de la personne dans le préambule
     
  2. Indiquer que les exigences et normes prévues dans la Loi ou dans tout règlement pris en application de la Loi n’ont pas pour effet de remplacer les exigences prévues dans le Code ou de s’y substituer
     
  3.  Inclure explicitement la CODP à la liste des organisations exemptées des mesures régissant l’accès aux renseignements personnels
     
  4.  Exiger que l’on consulte la CODP à propos de la stratégie antiraciste de la province (paragraphes 4(4) et 5(1)) et du cadre d’évaluation de l’impact de l’action contre le racisme (EIAR) (alinéa13(2)(b)
     
  5. Accroître la période par défaut de conservation de données de un an à cinq ans (paragraphe 7(10))
     
  6. Émettre des règlements établissant les normes relatives aux données et le cadre EIAR le plus rapidement possible
     
  7. Veiller à ce que les normes relatives aux données tiennent compte de l’importance de l’analyse intersectionnelle
     
  8. Exiger non seulement la collecte de données, mais également l’analyse des données en vue de cerner les effets disproportionnés sur les groupes protégés par le Code, la divulgation des données au grand public et la prise de mesures concrètes là où les données révèlent un manque d’équité
     
  9.  En consultation avec la CODP, repérer les organisations du secteur public responsables du maintien de l’ordre, des services correctionnels, du bien-être de l’enfance, de l’éducation, des soins de santé physique/mentale et de la prestation de l’aide sociale qui devraient être contraintes de recueillir des données le plus tôt possible

Nous discutons de chacune de ces recommandations ci-après.

Application du Code des droits de la personne

Premièrement, le projet de loi devrait clarifier la relation entre les exigences de la loi proposée et le Code, y compris la primauté du Code et les pouvoirs d’enquête qu’il confère à la CODP et qui permettent à celle-ci d’exiger la collecte de données relatives à la race.

Le Code a joué et continuera de jouer un rôle central de protection des personnes contre le racisme et la discrimination. Les lois complémentaires comme le projet de loi 114 peuvent encourager le respect du Code. L’idéal est d’assurer l’harmonisation des exigences du projet de loi et des exigences du Code. Cependant, il est important d’indiquer clairement que le respect de toute loi de lutte contre le racisme ne remplace pas le respect du Code, qui pourrait imposer une norme de conduite plus élevée. Dans de tels cas, en raison du statut quasi constitutionnel du Code et de sa primauté sur les autres lois ontariennes, le respect des exigences du Code aura préséance.

Pour veiller à ce que les organisations du secteur public ne croient pas à tort que le respect des exigences du projet de loi les soustrait à leurs obligations aux termes du Code, la CODP recommande d’indiquer expressément dans la nouvelle loi proposée que rien dans la Loi ou dans quelconque règlement pris en application de la Loi ne limite de quelque façon que ce soit les obligations prévues au Code des droits de la personne de l’Ontario. Le Règl. de l’Ontario 191/11 pris en application de la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario utilise un langage semblable au paragraphe 1(2) :

Les exigences des normes énoncées dans le présent règlement ne remplacent pas les exigences établies en vertu du Code des droits de la personne ni ne s’y substituent. Ces normes ne limitent pas non plus les obligations à l’égard des personnes handicapées que prévoit tout autre texte législatif.

Le préambule pourrait aussi faire référence au rôle du Code relativement à la promotion de l’égalité et de la dignité humaine, à la protection des personnes contre le racisme et la discrimination et au règlement des atteintes aux droits de la personne.

Autorisation expresse de divulguer des renseignements personnels à la CODP  

Le projet de loi protège contre la divulgation de renseignements personnels, sauf dans quelques rares circonstances (paragraphe 7(14)). Ces quelques circonstances tiennent compte du fait que la divulgation est parfois nécessaire, par exemple quand l’information est exigée par la loi, quand elle concerne une instance poursuivie ou éventuelle, ou encore quand elle est transmise au commissaire à l’information et à la protection de la vie privée.

Aux termes de l’art. 31 du Code, la CODP a le pouvoir de mener une enquête aux fins de l’accomplissement des fonctions que lui confère le Code si elle croit qu’il est dans l’intérêt public de le faire. Pour ce faire, la CODP bénéficie de vastes pouvoirs lui permettant d’exiger la production de documents et de dossiers. La CODP a pour position que les exemptions relatives à la divulgation de renseignements prévues au paragraphe 7(14) du projet de loi s’appliquent déjà à ses propres pouvoirs d’obtention de renseignements personnels dans le cadre d’enquêtes. Cependant, à des fins de clarification, la CODP demande qu’il soit explicitement indiqué que, comme dans le cas du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée, une organisation du secteur public peut divulguer des renseignements personnels recueillis à la CODP. Cela fera en sorte que la CODP puisse accomplir sans délai ou obstacle le mandat que lui confère le Code.

Consultation de la Commission ontarienne des droits de la personne

Le projet de loi exige qu’on consulte la CODP au moment d’établir ou de modifier des normes relatives aux données. Il devrait également énoncer explicitement que la CODP doit faire partie de toute consultation sur la stratégie antiraciste (paragraphes 4(4) et 5(1) du projet de loi) et sur le cadre d’évaluation de l’impact de l’action contre le racisme (EIAR) de la province (alinéa 13(2)(b) du projet de loi). Cela est conforme à l’expertise de la CODP et à son mandat, qui consiste à surveiller et à signaler les situations se rapportant aux droits de la personne, et à examiner les lois, règlements et politiques connexes dans le but d’assurer leur conformité au Code.

Conservation de données

Le paragraphe 7(10) du projet de loi indique que les organisations du secteur public conserveront les renseignements personnels recueillis pendant la période précisée dans les normes applicables relatives aux données ou, si aucune période n’est précisée, pendant un an. Une période par défaut d’un an ne suffit pas à l’évaluation des tendances, des habitudes ou des changements au fil du temps. Elle est également trop courte pour assurer que les données puissent être utilisées dans le cadre de requêtes devant le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario (TDPO). Les requêtes au TDPO doivent habituellement être soumises dans l’année suivant le dernier incident de discrimination alléguée, et les audiences peuvent avoir lieu beaucoup plus tard.

Par conséquent, la CODP recommande que la période par défaut de conservation des données recueillies fixée dans les normes relatives au données sont étendue à cinq ans.

Réglementation touchant les normes relatives aux données et le cadre EIAR

Bon nombre des mesures importantes du projet de loi, y compris les normes relatives aux données et le cadre EIAR, seront mises en œuvre au moyen de règlements. La CODP exhorte le gouvernement à fixer des normes relatives aux données et à établir le  cadre EIAR le plus rapidement possible. Sans réglementation correspondante, le projet de loi ne sera pas en mesure d’atteindre son important objectif.

Les normes relatives aux données devraient tenir compte de l’importance de l’analyse intersectionnelle. Elles devraient non seulement se concentrer sur la collecte de données, mais également exiger que les organisations du secteur public analysent les données de façon à déceler tout effet disproportionné sur les groupes protégés par le Code, fassent publiquement rapport des données et prennent des mesures concrètes si les données révèlent un manque d’équité. Cela aiderait à faire en sorte que les organisations du secteur public utilisent les données de façon proactive pour respecter leurs obligations aux termes du Code.

Aux termes du projet de loi, certaines organisations du secteur public pourraient devoir recueillir des renseignements spécifiques (alinéa 5(5)(a)) tandis que d’autres pourraient être autorisées à le faire (alinéa 5(5)(b)). La collecte de données devrait être requise dans plusieurs secteurs d’activités prioritaires. Ces secteurs incluent le maintien de l’ordre, les services correctionnels, le bien-être de l’enfance, l’éducation, la santé physique/mentale et la prestation d’aide sociale. La CODP devrait être consultée afin de déterminer quelles organisations du secteur public devraient être tenues de recueillir des données.

Nous vous remercions de nous avoir donné l’occasion de soumettre ce mémoire et de  comparaître devant vous.